Paul Hudson : « La santé est un sujet crucial de souveraineté, comme la défense »
Industrie pharmaceutique. Vaccins contre le Covid, relocalisations, géopolitique de la recherche… le patron de Sanofi se confie au Point.
Ne pas se fier à son air détendu et à son large sourire. L’homme en polo Ralph Lauren qui nous parle en visioconférence sur Zoom de chez lui, dans le 16e arrondissement de Paris, se trouve au coeur d’enjeux planétaires majeurs. Cet Anglais de 52 ans, père de trois enfants et fan absolu du club de football de Manchester United, est le directeur général de Sanofi depuis le 1er septembre 2019. La multinationale française de la pharmacie, qui emploie 106 000 personnes dans le monde et dont les usines tournent à plein régime pour produire l’anti-eczéma Dupixent ou encore l’antidouleur Doliprane, est au coeur de la recherche sur le Covid-19. Diplômé de l’Université métropolitaine de Manchester, cet ancien de Novartis et d’AstraZeneca, qui confesse rêver d’« être français », a beau avoir un nom de fleuve, sa vie n’a rien de tranquille. Vaccins, relocalisations, souveraineté sanitaire, responsabilités de l’industrie pharmaceutique, données de santé, relations avec les Gafam… le monde d’après selon Paul Hudson.
Le Point: Parlons déjà des médicaments que vous voulez proposer contre le Covid-19, le Kevzara mais aussi l’hydroxychloroquine. Où en êtes-vous?
Paul Hudson : Ce qu’il faut avoir en tête, c’est que ces médicaments ont été créés pour traiter d’autres maladies. Le Kevzara est un anticorps utilisé pour combattre la polyarthrite rhumatoïde ; nous lui consacrons deux études dont nous attendons les résultats de manière imminente. Et le Plaquénil, qui est le nom commercial de l’hydroxychloroquine, est utilisé dans le traitement du paludisme. Nous avons décidé de le tester contre le Covid-19 alors que la Chine et certaines institutions académiques étaient à la recherche de traitements en urgence.
Si ces médicaments s’avèrent efficaces, en aurez-vous en quantité suffisante?
Dès février, nous avons augmenté la production du Plaquénil. Nous nous sommes engagés à offrir gratuitement 100 millions de doses si les études cliniques prouvent qu’il peut être utilisé contre le Covid. Les deux questions sont : est-ce que cela fonctionne ? Et qui d’autre peut en fabriquer ? Il y a Novartis, Teva, Mylan… On est tous d’accord pour augmenter la production. Donc je pense que si le Plaquénil marche, il y en aura assez.
Êtes-vous en contact avec le Pr Didier Raoult qui, à Marseille, affirme avoir trouvé une solution grâce à l’hydroxychloroquine?
J’admire le fait qu’il essaie de faire quelque chose. Mais nous vivons dans un monde où on doit disposer de solides essais cliniques randomisés avant
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