Art : les plus beaux trésors de Carnavalet
Après de longs travaux, le musée dédié à l’histoire de Paris rouvrira à l’automne. Voici, en exclusivité, quelques-unes des beautés qui y dorment…
Paris n’est plus Paris. Entre un décor matinal à la Marathon Man et des scènes dignes du Retour des morts-vivants, les Parisiens peinent à reconnaître leur cité, hagarde. Puisque le présent nous fuit, réfugions-nous dans le passé. Oxygénons-nous dans le musée de l’histoire de Paris, ce Carnavalet initié en 1866 par un certain baron Haussmann, qui, tandis qu’il détruisait une partie de la ville, estima qu’il serait bon qu’on gardât la trace de quelques vestiges. Comme toute noble institution, le musée, fermé depuis 2016, avait besoin d’une cure de jouvence. « Il fallait repenser la scénographie, ouvrir de nouvelles salles qui résument le parcours et l’histoire de la ville, établir une vraie continuité de la préhistoire à nos jours, alors que le Moyen Âge, la Renaissance, les XXe et XXIe siècles n’avaient pas été présentés jusque-là, faute de place », nous explique sa directrice, Valérie Guillaume, qui aura visité en amont de nombreux musées d’histoire urbaine, à New York, Chicago ou Tokyo. « Il fallait aussi restaurer de nombreux objets, en exposer certains pour la première fois, revoir l’accrochage, ouvrir un centre de ressources qui rendra accessibles près de 500 000 oeuvres sur les 618 000 du musée. »
Le musée devait rouvrir ses portes en juin. Il attendra l’automne. « Pour l’heure, environ 1 000 oeuvres sont accrochées sur les 4 000 prévues. » Seules des équipes de sécurité veillent sur place aux collections des deux hôtels du Marais, Carnavalet et Le Peletier. Budgété à plus de 50 millions d’euros, ce chantier de quatre ans aura été le plus important du collectif Paris Musées, qui regroupe 14 établissements, dont le Petit Palais ou le nouveau musée de la Libération, place DenfertRochereau.
En exclusivité pour Le Point, voici un florilège d’objets que les conservateurs ont bien voulu nous commenter. Un voyage dans un musée qui incarne la densité politique et sociale d’une capitale. Un voyage dans le temps long d’une ville soumise à rude épreuve, mais qui, on le sait, ne coule jamais
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Au-delà d’une réévaluation financière, notre personnel soignant recevra-t-il une médaille en remerciement de son dévouement ? Il pourra en tout cas venir admirer les premières à avoir été décernées après une épidémie, celle du choléra qui toucha si sévèrement Paris en 1832. « Jusque-là, sous l’Ancien Régime, on n’avait émis que des médailles pieuses, invoquant la protection de saint Roch », précise Philippe Charnotet, conservateur. Parmi les récipiendaires de 1832, JeanJacques Berger, maire de l’ancien 2e arrondissement, ainsi que d’autres agents de l’administration. Pas de médecins ou d’infirmiers. Au droit de la médaille, la Ville de Paris tient un mourant qui donne la main gauche à Esculape, le dieu de la médecine ; au-dessus, un monstre ailé représente le choléra. Mgr de Quélen, archevêque de Paris, fut aussi récompensé, lui qui, durant l’épidémie, avait transformé les séminaires en hôpitaux, s’occupant personnellement des malades à l’Hôtel-Dieu et fondant l’OEuvre des orphelins du choléra.
Il nous reste quelques murs de maisons datant de la Lutèce antique. Provenant du 5e arrondissement, de la rue Amyot, du collège Sainte-Barbe, ils ne sont pas exposés. On pourra voir en revanche un mur effondré de la rue de l’Abbé-de-l’Épée, qui a été reconstitué pour la réouverture du musée. Pas de figuration humaine comme à Pompéi, mais, « à Lutèce, les riches citoyens voulaient avoir des maisons à la romaine avec des imitations de marbre: cela coûtait moins cher mais faisait très chic », commente Sylvie Robin, qui dirige le département d’archéologie. Principaux matériaux utilisés : le porphyre, rouge ou vert, et un marbre jaune de Chemtou (Tunisie) très à la mode au… IIe siècle. Il faut donc imaginer une Lutèce aux intérieurs colorés. Le haut du mur étant plus détérioré que le bas, la maison fut probablement abandonnée avant l’effondrement du mur, recouvert par d’autres constructions. Un effet du millefeuille parisien révélé lors d’une fouille en 1975, au n° 12, dans plusieurs caves.
sauvée (photo), mais deux vantaux seront accolés dans le musée afin de reconstituer cette porte en chêne massif. Longtemps perdue, elle fut retrouvée dans les années 1990 dans les réserves de la Ville. Un grand bas-relief qui la surplombait et représente Henri IV à cheval se trouve aussi dans la cour du musée. Le dernier élément de l’Hôtel de Ville sauvegardéestunestatuedeLouisXIV du XVIIe siècle (par Coysevox), qu’on peut voir à l’extérieur du musée.