L’ère de la campagne
La pandémie a marqué une ruée vers l’or vert, mais le regain du rural au détriment de la grande ville existait déjà avant la crise. Celle-ci pourrait accélérer le phénomène.
«J’en ai marre de la verdure, tout est vert ici (…) Parce que tu trouves ça calme toi (…) avec ces oiseaux à la con (…) Ils commencent à me taper sur le système… » Visiblement, tous les Français ne sont pas de l’avis de Bernard Blier, horripilé par la nature dans Buffet froid. Le Covid-19, c’est la revanche de la campagne sur la ville, vieille dichotomie réanimée ; la vengeance des « gilets verts » ; la victoire du jardinet et du pavillon sur la métropole et ses appartements, synonymes d’enfermement, d’entassement et de surveillance policière. « Respire, Bébert, c’est de la bonne », conseillait le Bardamu de Céline, comme si l’air pur était une drogue. Homme libre, toujours, tu chériras le vert ! Ce vert que le gouvernement a remis à l’honneur sur la carte du déconfinement de façon subliminale. Tandis que sur les territoires périurbains on aura peiné parfois à saisir l’état d’urgence sanitaire, dans les villes, privées de ce qui les définit depuis la polis grecque – contact, sociabilité, flânerie, culture –, on semble avoir été cloué au pilori, puni d’on ne sait quel péché originel. Plus d’espace public, un espace privé réduit à peau de chagrin ; aurait-on voulu dégoûter les urbains de la ville qu’on ne s’y serait pas pris autrement. À l’inverse, le «campagnard» a pu apprécier la pleine jouissance de son petit coin de paradis. Un « deux poids deux mesures » que les Français ont d’emblée deviné.
Deux symptômes ont traduit ce chamboulement des cotes à la Bourse de la qualité de vie. Une ruée vers
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