La vie quotidienne à l’Élysée sous… Alain Minc
L’essayiste, qui publie « Mes » présidents (Grasset), analyse le difficile exercice du pouvoir sous la Ve République et s’inquiète pour l’avenir de la démocratie.
Le Point: La crise sanitaire et économique que traverse la France a-t-elle un équivalent dans l’Histoire?
Alain Minc:
La seule crise mondiale que la Ve République a connue est celle de 2008. Les précédentes étaient circonscrites à la France. En 2008, le système capitaliste aurait pu mourir, mais l’opinion n’a pas mesuré la gravité de ce qui se tramait. Tandis que cette fois-ci, elle l’a vécue physiquement. Autre différence, Nicolas Sarkozy, alors président de l’Union, avait réagi promptement et avait joué un rôle disproportionné par rapport à la taille de la France. Pendant une dizaine de jours, il a été le leader du monde occidental en tenant la baguette du chef de l’orchestre européen.
Les semaines que nous venons de vivre modifient-elles l’exercice du pouvoir exécutif?
Nous sommes dans une période hypocrite : nous vivons sous l’empire de l’article 16, sans se l’avouer ! Emmanuel Macron ne l’a pas utilisé, mais la loi d’urgence sanitaire ainsi que les pouvoirs quasi absolus accordés à l’exécutif équivalent à une forme d’article 16. De fait, le pouvoir est plus que jamais présidentiel !
Le pouvoir que l’on a accordé aux médecins et au Conseil scientifique vous a-t-il choqué?
L’existence de ce Conseil scientifique est une faute démocratique. Nos gouvernants ont pensé que l’épidémiologieestunesciencedurecommelesmathématiques avec une seule vérité. Or, s’il existe des sciences molles, l’épidémiologie est une science mollassonne. Du coup, on s’est mis entre les mains de spécialistes de cette science mollassonne qui ont été pris par l’hubris et ont découvert les agréments de la notoriété. Le jour où le Pr Delfraissy a osé dire qu’on allait confiner les plus de 65 ans et les personnes à risque, c’est-à-dire 17 ou 18 millions de Français, pendant douze ou dixhuit mois comme si c’était lui le titulaire de l’exécutif, je dois confesser avoir été choqué comme jamais
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