Le Point

Immobilier, les bonnes stratégies

- PAR BRUNO MONIER-VINARD

Àvos masques, prêts, partez ! Au sortir du confinemen­t, les profession­nels de l’immobilier redoublent d’activité. « Le redémarrag­e est spectacula­ire, je m’attendais à une reprise plus progressiv­e », se réjouit Laurent Vimont, patron de Century 21. « Quelle agréable surprise de constater la rapidité avec laquelle nos compatriot­es ont retrouvé le chemin des agences ! L’intérêt pour la pierre est toujours là », confirme Christine Fumagalli, à la tête du réseau Orpi. « Les transactio­ns reprennent fort, ce n’est pas un désastre du tout», poursuit Éric Allouche, chez Era. Et du côté de Laforêt, son président, Yann Jéhanno, se félicite d’un rebond du marché sur les chapeaux de roues : « Nous sommes à 85 % de notre activité commercial­e d’avant le Covid.» Seuls quelques locataires et propriétai­res, surtout seniors, refusent encore de faire visiter leur bien à louer ou à vendre. À Lille, les acquéreurs sont au rendez-vous : « avec des prix équivalant à ceux de février », promet Emmanuel Chambat, président régional de la Fnaim. La demande ne faiblit pas non plus à Lyon. « Les acheteurs tentent de négocier mais les vendeurs ne lâchent rien », observe Yves Mettetal, patron des agences Primmo. Dans la capitale, le groupe Daniel Féau enregistre 42 entrées en négociatio­ns sur deux semaines : « 37 ont déjà abouti par une acceptatio­n de l’offre par le vendeur et la transmissi­on du dossier chez les

notaires pour signature de promesse ■ », se réjouit Nicolas Pettex-Muffat, directeur général du spécialist­e de l’immobilier haut de gamme.

Alors, l’impact du Covid-19, même pas mal ? « On vide le tuyau bloqué par un bouchon qui s’est formé avec les deux mois d’inactivité. Il y a toujours plus d’acheteurs que de vendeurs. Si la demande ne faiblit pas, aucune raison pour que les prix baissent », analyse Stéphane Fritz, dirigeant du réseau Guy Hoquet. Un agent immobilier peut rattraper le déficit au cours de l’été. Mais attendons de voir quelle va être l’ampleur des défaillanc­es d’entreprise­s pour se prononcer. » Les cartes sont aussi brouillées par la forte saisonnali­té de l’activité en mars et avril, pas mal de familles cherchant à se loger avant la rentrée scolaire d’automne. « Même si des projets ont été mis en pause à cause de l’incertitud­e, la plupart des clients relancent leurs recherches », veut rassurer Richard Tzipine, directeur général de Barnes. L’été sera chaud pour les notaires. Environ 160 000 actes de vente ont disparu des radars des ventes dans l’ancien. « Nous allons travailler tout l’été pour tenter de rattraper le retard des signatures qui ne se sont pas faites pour des raisons commercial­es, administra­tives et juridiques », promet Me Thierry Delessalle, porte-parole de la chambre des notaires du Grand Paris. Dont le récent observatoi­re rappelle que « la baisse des volumes de ventes se reflète souvent dans les prix, après une phase de latence. Quand la pression de la demande faiblit, les prix des logements se replient pour s’adapter aux nouvelles conditions du marché ». Or un sondage de SeLoger indique qu’un vendeur sur deux prévoit une baisse des prix de son logement dans les six prochains mois. Dans cette perspectiv­e et/ou conséquenc­e du gel des transactio­ns pendant le confinemen­t, bon nombre de particulie­rs mettent leur bien en vente dans les beaux quartiers de Paris. « Certains redoutent une correction des prix à l’automne. Cela étoffe un peu le stock d’offres et donne davantage de choix pour faire son marché, il faut en profiter. Mais n’escomptez pas bénéficier de gros rabais », analyse Roger Abecassis, président de Consultant­s Immobilier. « Nous avons trois fois plus de mandats. Des acheteurs opportunis­tes tentent le coup, faisant des offres à – 30 % ! Même si certains propriétai­res regrettent de ne pas avoir vendu avant la crise sanitaire, ils plafonnent leurs remises à – 5 ou – 7 %, soit au même niveau de prix qu’il y a un an », détaille Arthur Colarossi, directeur du développem­ent des agences de prestige, Breteuil Immobilier. « À Montmartre, comme ailleurs, la location touristiqu­e privée, de type Airbnb a du plomb dans l’aile. Les liaisons aériennes ne devraient pas revenir à la normale avant 2021 et il y a fort à parier que des petites surfaces locatives seront mises en vente ou changeront d’affectatio­n », souligne Brice Moyse, directeur des agences Immopolis. « Des vendeurs contraints devront accepter de revoir leur prétention à la baisse, autant face à des acheteurs privés d’une partie de leur pouvoir d’achat que vis-à-vis d’investisse­urs plus opportunis­tes », pronostiqu­e une étude de la banque Neuflize OBC. « Sommes-nous dans une bulle de décompress­ion, suivie cet automne d’une soupe à la grimace ? » s’interroge Nathalie Naccache, directrice des agences Keller Williams au coeur du Vieux-Paris.

Gagnant-gagnant. Pour l’heure, la situation est inédite car les deux parties peuvent avoir intérêt à passer à l’action sans (trop) tarder. D’un côté, les vendeurs pouvant tabler sur des prix encore élevés, soutenus par une forte demande et des acheteurs solvables. Ces derniers paieront assez cher la facture, mais devraient toutefois pouvoir la financer grâce à l’emprunt. Cela avant que les taux aient continué de grimper

« Dans beaucoup de recherches, le bonheur est dans le pré. »

Corinne Jolly, présidente de « Particulie­r à Particulie­r » (« PAP »)

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 ??  ?? Grand air. Près de Chartres, dans la vallée de l’Eure, cette maison de 3 chambres, avec 5 hectares de terrain, a été vendue 475 000 € par Century 21.
Grand air. Près de Chartres, dans la vallée de l’Eure, cette maison de 3 chambres, avec 5 hectares de terrain, a été vendue 475 000 € par Century 21.
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