Notre nécessaire de poche pour l’été 2020
Une goûteuse de plats, des lapins résistants, des lettres à fendre le coeur, un cadavre dans un glacier, un éloge du surf… Le Point vous dévoile sa sélection estivale de livres de poche. Petits formats, grandes émotions.
La Goûteuse d’Hitler,
de Rosella Postorino
(Le Livre de poche, 384 p., 7,90 €)
« La capacité d’adaptation est la principale ressource des petres humains, mais plus je m’adaptais et moins je me sentais humaine. » Un Führer au faîte de sa parano, une jeune Berlinoise payée pour goûter ses plats (et, le cas échéant, mourir à sa place), quelques nuits torrides avec l’Oberstleutnant, le tout sur fond d’ « abattoir international en folie », comme disait Céline, voilà le portrait de la « little big woman » de l’été, savant mélange de La Grande Bouffe – pour le côté « manger jusqu’à ce que mort s’ensuive » et de Portier de nuit – pour la romance entre l’héroïne et le vilain SS. Après Femmes de dictateur et La Cuisinière d’Himmler, rien à dire, les tambouilles des tyrans font recette.
Lettres choisies,
de la famille Brontë (préface de Laura El Makki, Folio classique, 704 p., 9,70 €)
Juillet n’incite pas tout le monde à la joie, et il y a des âmes qui restent grises même le 17 août. Celles-là se trouveront bienheureuses au presbytère du révérend
Brontë : comme elle console, cette plongée dans l’intimité de cette extraordinaire famille de quatre écrivains, tous morts avant 40 ans, soudés autour du père, écrivant ensemble, se tenant chaud par la création et l’envie de vivre ! Voici 300 des 1 000 lettres échangées entre le père et ses enfants entre 1821 et 1855. S’il brouillarde un peu cet été, les lettres de Charlotte l’indomptable, de Marie la modeste ou d’Emily la moderne sauront nous embraser.
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L’Été des charognes,
de Simon Johannin (Points Seuil, 168 p., 6,10 €)
Lui, l’enfant qui raconte, il massacre le chien de la voisine à coups de pierres, ramasse ses parents ivres-morts dans des voitures déglinguées et prend des torgnoles dès le petit déjeuner. Lui, le « couillon de la lune », comme dit son père, il fait la guerre des boutons chez les rednecks, frappe, insulte et baise tout ce qu’il peut. À La Fourrière, son bled, il n’y a que des chiens enragés par des gamins enragés par des parents enragés par le monde qui leur pleure dessus. Radical, cru, sauvagement poétique, le jeune Simon Johannin crève les pages, boxe au ventre et au coeur, c’est Vernon Subutex à la cambrousse, le K.-O. du mois de juillet.
Luca,
de Franck Thilliez (Pocket, 608 p., 8,70 €). Le cru Thilliez 2020 est arrivé en poche, et c’est un millésime qui n’a pas un goût de banane ou de cerise mais plutôt de sang frais (et de liquide amniotique). Ça commence par des magouilles de procréation assistée, ça continue avec un ou deux crimes bien sales et ça finit dans les replis fétides du « numerdique », le tout dans un Paris crépusculaire à la Eugène Sue châtié de pluie et de misère. L’enchaînement des anicroches est stratosphérique, on manque de s’asphyxier une vingtaine de fois, mais la turbine Thilliez jamais ne s’enraye : c’est un mécano du suspense, un expert en manipulation, l’as gaulois du thriller haletant.
Petit Éloge du surf,
de Joël de Rosnay (François Bourin, 136 p., 12 €). Certaines mères font des enfants, d’autres enfantent des
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