Brèves
Roman. Tout commence le 19 août 1991, à Carroll Gardens, un des seuls quartiers mixtes de New York. Par accident, un chauffeur juif renverse deux enfants noirs : l’un meurt, sa cousine s’en sort avec les deux jambes brisées. En moins de vingt-quatre heures, les rues prennent feu, des gens crient « mort aux juifs », « vive Hitler », un touriste juif est sauvagement assassiné par des Noirs. Dans ce contexte, l’histoire d’amour entre Frederick – un prof de littérature, noir, marié et père de famille – et Esther – une journaliste française stagiaire, juive et beaucoup plus jeune, bien sûr –, dépasse largement le simple adultère. Derrière leur amour, il y a la peur d’être ce qu’ils sont, les jugements, les précautions qu’ils prennent et les condamnations qu’ils subissent, les « pourquoi moi » ? et les « pour rien ». Et il y a tous ces gens bien, que les circonstances convertissent en assassins, en « corps déchaînés et qui frappent », écrit Colombe Schneck. C’est un roman fragile, poignant, sur l’amour mais aussi sur la rivalité, l’envie, l’héritage de la douleur, « la comptabilité des avantages et des inconvénients », l’illusion de voir un jour la fraternité coller à toutes les peaux et puis son crash sur le bûcher des vanités. « On n’y arrivera pas, pensent les amants chacun de leur côté, ce sera toujours nous contre les autres. Nous avons moins, eux ont tout. Il ne suffit pas d’avoir, il faut que l’autre soit réduit. » ■
Nuits d’été à Brooklyn, de Colombe Schneck (Stock, 304 p., 20 €).