Trois heures vingt de jouissance
Cinéma. À tous les cinéphiles qui ont mal vécu la fermeture des salles au printemps, voilà de quoi vous nourrir pour les prochains mois. L’histoire se passe quelque part en Europe centrale, dans un manoir, au début du siècle dernier. Le temps des fêtes de Noël, Nikolaï, grand propriétaire terrien, accueille quelques amis aristocrates de nationalités différentes, parmi lesquels un politicien, une jeune comtesse et un général d’armée russe. Entre repas pantagruéliques et jeux de société, le petit groupe refait le monde, devisant aussi bien sur la religion que sur la politique, la vie, la mort, l’Antéchrist, le progrès ou la morale. En adaptant un texte du philosophe et poète russe Vladimir Soloviev, le réalisateur de la nouvelle vague roumaine, Cristi Puiu (découvert en 2005 avec La Mort de Dante Lazarescu) nous offre trois heures vingt de pure jouissance rhétorique et intellectuelle avec ce film-fleuve à la densité dantesque, où les répliques fusent, les arguments s’aiguisent et celui qui croyait avoir la main se fait prendre à son propre jeu. Les heures passent et les esprits s’échauffent, on perd le fil, on y revient, l’esprit divague. Pendant ce temps, sur l’écran, c’est comme si Tchekhov rencontrait Buñuel et Visconti. Prodigieux
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Malmkrog, en salles le 8 juillet.