Hongkong : la liberté
Avec sa nouvelle loi sur la sécurité nationale, Pékin a déclaré une guerre sans merci aux militants démocrates. Reportage.
Cet été, les juges de Hongkong ne vont pas chômer. Rien que ce lundi 6 juillet, deux procédures défraient la chronique. Au tribunal de Kowloon-Ouest, la partie continentale de l’ancienne colonie britannique, Tong Ying-kit, 23 ans, comparaît pour la première fois après avoir été inculpé pour « incitation à la sécession » et « terrorisme ». Son crime ? Le 1er juillet, en marge d’une manifestation, il conduisait sa moto de course Honda à l’arrière de laquelle il avait planté un drapeau « Libérez Hongkong », slogan populaire chez les manifestants, connoté d’un appel à l’indépendance selon le gouvernement.
Inoffensif et non dénué d’un certain panache, le geste était téméraire, alors qu’une nouvelle loi promulguée la veille criminalise précisément ce slogan. Des policiers antiémeute se sont jetés sur lui, le percutant de plein fouet. Cinq jours plus tard, on l’a tiré de son lit d’hôpital, et c’est la jambe fracturée, en fauteuil roulant, qu’il a été traîné devant le juge. La cour a refusé de lui accorder une libération sous caution, qui est pourtant la norme à Hongkong, surtout pour un prévenu incapable d’aller bien loin. Grâce à l’article 42 de la fameuse loi sur la sécurité nationale (LSN), fini l’habeas corpus hérité du droit britannique. Le procès est ajourné au 6 octobre. Tong Yingkit passera trois mois en détention préventive pour sa chevauchée hautement subversive. À l’autre bout de la ville, sur l’île de Hongkong, une autre salle d’audience est pleine à craquer. Distanciation sociale oblige, un siège sur deux est barré de bandes de sécurité rouge et blanc. Résultat : une bonne partie de l’assistance est debout. Aux premiers rangs, une armée d’avocats discute fiévreusement et compulse ses dossiers. Les trois prévenus entrent les derniers : un binoclard avec un tee-shirt « Ils ne peuvent pas tous nous tuer » et son sac d’étudiant sur l’épaule, un autre pluslarged’épaulesavecunmasque noir et des lunettes embuées, et une jeune fille à frange bien comme il faut en chemisette bleu clair et pantalon marine.
Superstar. Personne ne les remarque d’abord, et pourtant ce sont eux que tout le monde attend : la superstar du mouvement des parapluies Joshua Wong, son copain de toujours Ivan Lam et leur camarade Agnes Chow. Ensemble, ils avaient fondé un parti politique prodémocratie, Demosisto, il y a quatre ans. Celui-ci s’est dissous le 30 juin, se sachant directement visé par la nouvelle loi. Dans la semaine, les deux livres de Joshua ont été retirés des bibliothèques publiques, suspectés d’enfreindre la LSN. Et aujourd’hui, il comparaît avec ses camarades pour incitation et participation à un rassemblement interdit le 21 juin 2019, à l’acmé du grand mouvement qui a troublé la cité autonome chinoise l’année passée. Une vieille affaire, bien moins
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