Comment faire peur en 2020 ? Vague de virus, femmes en noir, kidnapping et cyberharcèlement… Voici les nouvelles tendances du thriller.
La peur? «Quelque chose d’effroyable, une sensation atroce, comme une décomposition de l’âme, un spasme affreux de la pensée et du coeur », écrit Guy de Maupassant dans la nouvelle du même nom, en 1882. Un portrait à la sanguine de «l’émotion la plus forte et la plus ancienne de l’humanité», reprendra le maître de l’épouvante, Howard Phillips Lovecraft. Mais qui n’explique en rien que nous soyons là, tous, à la guetter, à l’espérer, à la désirer, comme au pied d’un grand-huit…
Depuis les cavernes, on joue à se faire peur. Fantasmedekrakensgéants,dedieuxmangeursd’hommes, de suceurs de sang des Carpates, la littérature victorienne va sublimer ces bêtes de foire, en faire des gloires littéraires. Il n’y a que les guerres qui semblent endormir nos rêves de monstres, peut-être parce que la réalité, à ce moment-là, est plus terrifiante encore. L’épouvante au fil du temps a inventé les peurs bleues, les nuits blanches, modifié les codes littéraires.
Quid de nos terreurs, en cette année du Rat du calendrier chinois, devenue l’« année du Pangolin » ? On prend le pouls de nos trouilles, tremblotantes depuis le confinement. Le roman policier s’est mis à nous hérisser le poil avec rage, déployant l’éventail de ses variantes terrorisantes : thriller psychologique, scientifique ou domestique (domestic noir). L’imagination 2020 déborde de coups tordus.
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Notre printemps confiné a fait émerger des clusters de romans infectieux. La Peste, de Camus, et Le Hussard sur le toit, de Giono, ont bataillé sec pour la première place sur le podium des meilleures ventes. Des résurgences qui s’accompagnent aussi d’heureuses coïncidences. La Menace Andromède paraît – suite d’un thriller culte des années 1970 en matière de virus, La Variété Andromède, de Michael Crichton. L’ouvrage de référence brossait, en 1967, l’arrivée sur Terre d’un virus d’origine extraterrestre. Baptisé Andromède, le mal dévastait la population de Piedmont, une petite bourgade en Arizona. Ce n’est pas Roswell, en 1947, mais ça y ressemble. Crichton posait là les bases d’un hyperréalisme que l’on retrouve traduit à l’écran dans l’insoutenable film Contagion, avec Marion Cotillard, Jude Law… Cinquante ans plus tard, la bactérie renaît sous la plume de Daniel H. Wilson, l’héritier de Crichton. Dans La Menace Andromède, le virus a muté, il va falloir à nouveau sauver l’humanité. Un enjeu de taille, qui marque le point zéro du thriller scientifique d’anticipation, d’une actualité parfois… déconcertante.
Dans « Les Yeux des ténèbres », la menace d’extinction du genre humain est endogène, née dans un laboratoire. Devinez où ? À Wuhan !