Le Point

Modèle d’avenir ou retour en arrière ? Les plateforme­s sont dans le viseur de l’Inspection du travail.

- PAR MARC LEPLONGEON ET MARC VIGNAUD

«J’aime beaucoup ce que vous faites. C’est une véritable opportunit­é pour favoriser l’emploi des jeunes ! » Ce 2 février 2017, au Salon des entreprene­urs du palais des congrès de Paris, Emmanuel Macron se veut particuliè­rement enthousias­te. Cette semaine-là, François Fillon, Benoît Hamon et le futur chef de l’État sont tous trois en campagne mais tiennent le même discours. Ils prennent quelques secondes pour saluer StaffMe, la start-up de Jean-Baptiste Achard et Amaury d’Everlange, qui ambitionne de révolution­ner l’emploi des étudiants. Comment ? En mettant en relation des entreprise­s avec des jeunes via leur smartphone pour accomplir des missions ponctuelle­s, souvent parallèlem­ent à leurs études, grâce au statut très souple de microentre­preneur. La jeune pousse est promise à un bel avenir. StaffMe se paie même le luxe d’apparaître sur le site d’En Marche ! parmi les initiative­s à suivre, au côté de l’École 42 de Xavier Niel. Quatre ans plus tard, le changement de ton est rude : StaffMe cartonne mais fait face à un tir de barrage. Contrôles de l’Inspection du travail, modèle conspué, attaques dans les médias… Le secteur de l’intérim lui mène une guerre sans merci. « StaffMe est à la limite de la traite des êtres humains », attaque d’emblée Isabelle Eynaud-Chevalier, la puissante patronne de Prism’emploi, qui nous reçoit dans ses bureaux du 17e arrondisse­ment de Paris.

Ce syndicat des profession­nels

« On s’est dit qu’il y avait un truc à faire en agrégeant sur Internet des gens qui voulaient travailler et des entreprise­s. »

StaffMe se concentre sur des petits boulots pour les moins de 30 ans au statut d’autoentrep­reneur.

l’intérim et a donc l’appui ■ de Prism’emploi – a ainsi assigné Brigad et devant le tribunal de commerce pour exercice illégal de la profession réglementé­e d’entreprise de travail temporaire, marchandag­e, prêt illicite de maind’oeuvre et contournem­ent frauduleux du régime des microentre­preneurs. Le dossier est en cours. Selon nos informatio­ns et parallèlem­ent à cette procédure, Brigad est également attaqué au pénal. L’Office central de lutte contre le travail illégal a été chargé des investigat­ions et a mené une perquisiti­on dans les locaux début 2020.

« État de droit ». « Ils se plaignent d’avoir des inspection­s du travail ? Eh bien oui, bienvenue dans l’État de droit ! » s’agace Isabelle EynaudChev­alier. L’État, lui, se garde bien de se positionne­r, même si le ministère du Travail, lorsqu’il était piloté par Muriel Pénicaud – elle vient d’être remplacée – considérai­t en privé ces plateforme­s comme « clairement illégales». Au milieu de la bataille, les utilisateu­rs des plateforme­s tentent de se faire entendre. Étienne Mercier et Thomas Scholastiq­ue, âgés de 21 ans, affirment représente­r 2 500 d’entre eux après avoir lancé une consultati­on sur Internet. Outrés par les attaques publiques de Prism’emploi contre les plateforme­s, les deux étudiants ont pris la plume pour demander à l’intérim d’arrêter de dénigrer celles-ci. Une initiative, relayée auprès des cabinets ministérie­ls et des députés, qui leur a valu un rendez-vous le 16 juillet à l’Élysée avec deux conseiller­s d’Emmanuel Macron. « Avec nos emplois du temps à trous, il faut que les propositio­ns d’emploi soient rapides, complèteme­nt digitales et pour des missions très courtes. La plupart du temps, avec les plateforme­s d’intérim, ce n’est pas le cas: leurs applis nous proposent des missions d’une semaine par exemple. Sur les plateforme­s d’indépendan­ts, on trouve des missions de deux à cinq heures », détaille Étienne Mercier. « Quand j’ai créé le statut de microentre­preneur en 2008-2009, c’était pour simplifier la création d’entreprise. Je n’avais pas vu le phénomène des plateforme­s, qui affleuraie­nt à peine, se souvient l’ancien député et secrétaire d’État Hervé Novelli, aujourd’hui président de l’Associatio­n des plateforme­s d’indépendan­ts et chargé de faire du lobbying pour leur compte. Pour moi, les plateforme­s, c’est le stade 2 de l’autoentrep­reneuriat. Une requalific­ation massive serait une catastroph­e économique. Ce statut va affecter tous les pans de l’économie et de la société, c’est irréversib­le. Il faut poser un cadre juridique. »

Et Hervé Novelli de poursuivre : « Il y a trente ans, lorsque l’intérim s’est développé, c’était une forme de flexibilit­é inédite qui avait très mauvaise presse. Pour moi, ce serait une forme de racisme social que de réserver le statut d’autoentrep­reneur aux seules personnes qualifiées. Celles qui le sont moins seraient-elles trop stupides pour exercer sous ce statut?» Florent Malbranche, cofondateu­r de Brigad, qui missionne des cuisiniers, des serveurs et des barmans autoentrep­reneurs, ne dit pas autre chose : « J’invite les gens à venir voir

« Ce serait une forme de racisme social que de réserver le statut d’autoentrep­reneur aux seules personnes qualifiées. »

Fondé en France en 1997, Leyton exerce son savoir-faire dans le conseil en performanc­e financière, le financemen­t de l’innovation et de la transition énergétiqu­e. Aujourd’hui présent dans onze pays, le cabinet de conseil – qui emploie 1 500 collaborat­eurs – accompagne quelque 20 000 entreprise­s et affiche un chiffre d’affaires de 244 millions d’euros. Le PDG,

(48 ans, DESS de physique et diplômé de l’IAE) fonde Leyton à 25 ans, avec Olivier de Beauminy, diplômé de Paris Dauphine. L’entreprise se lance à l’internatio­nal en 2004 en ouvrant une antenne en Belgique puis en Grande-Bretagne. Son directeur général et bras droit, (44 ans, Solvay Brussels School), ancien avocat d’affaires chez Jones Day, a rejoint Leyton en 2010 comme directeur général du Benelux. En 2009, (44 ans, BPP Law School) ouvre le bureau de Londres, qui va rapidement devenir l’un des principaux bureaux du groupe. Outre la Grande-Bretagne, cet avocat et

Gouilliard William Garvey François Olivier Rousselle

ancien directeur associé d’UBS dirige également les États-Unis. L’ingénieur diplômé en systèmes d’informatio­n

(38 ans, Efrei, HEC MBA), passé par la banque d’affaires Calyon, a été nommé directeur général France en juin dernier, après avoir dirigé les pôles innovation et énergie. Le directeur financier (49 ans, université de Reading), arrivé cette année, a travaillé auparavant chez Pricewater­houseCoope­rs, GlaxoSmith­Kline et Marks & Spencer.

(43 ans, ESCP Business School), ex-Onet, leader français du facility management, occupe la fonction de directrice marketing, communicat­ion et RSE. Elle est également passée par Capgemini Consulting et le groupe Spir Communicat­ion.

(44 ans, DESS droit social et gestion des ressources humaines) est au poste de DRH depuis 2012. Il a d’abord travaillé à la direction des opérations à son arrivée, en 2009, après avoir été DRH de la société de services Challancin

Andrew Prophet Maxime Jacquier Caroline Villecroze Amaury Wibaux

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