Le Point

ON NE PEUT PAS PRÉDIRE L’AVENIR

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ses frustratio­ns, ses colères. ■

Le président le sait, qui a suivi ses conseils en organisant le grand débat face à la révolte des Gilets jaunes. « Tout ce que j’ai prédit était juste et s’est réalisé », se targue l’oracle de Pau, au risque d’exaspérer ceux, nombreux à La République en marche, qui le jugent « ivre de lui-même ». Il a vu venir de loin la défaite de Nicolas Sarkozy en 2012, tout comme la débâcle de François Hollande cinq ans plus tard. « Le socialisme comme idéologie est mort. Le PS en a fini pour longtemps. Il ne peut pas gagner en 2017, quel que soit le candidat. Hollande ne se représente­ra pas forcément, d’ailleurs, en raison des sondages », nous confiait-il deux ans avant le renoncemen­t inédit du président socialiste.

Très tôt, il a senti l’aspiration des Français à une troisième voie qui transcende­rait les vieux clivages politiques, ces « tours jumelles vermoulues » du PS et de l’UMP. Dès l’automne 2011, six ans avant Macron, il plaidait pour « une union nationale des courageux, qui irait de la moitié du PS à la moitié de l’UMP ». « Il a toujours eu un temps d’avance, se souvient un pilier de ses campagnes. Quand il a décidé d’axer la présidenti­elle de 2007 sur la dette, on lui a tous dit : “Ça ne fait pas rêver.” Moyennant quoi, il a fait 18,5 % des voix et Ségolène Royal est venue lui chanter la sérénade au balcon ! » Il en est un qu’il n’a pas vu venir toutefois, c’est Emmanuel Macron. « Une bulle », balayait-il début 2017, cinq mois avant le sacre de la « start-up nation ». Mais quand le jeune candidat s’est trouvé en difficulté après avoir qualifié la colonisati­on française de « crime contre l’humanité », il a eu ce pressentim­ent puissant qu’il fallait acheter à la baisse et lui apporter son soutien. Son plus gros coup de dé. « Le président sait ce qu’il lui doit. Il n’a pas oublié. Sans lui, il ne serait pas là », confesse un macroniste.

Plus qu’un lot de consolatio­n, le haut-commissari­at au Plan est une façon pour Emmanuel Macron de s’acquitter de sa dette et d’acheter sa tranquilli­té. Il ne s’est pas toujours bien comporté avec son remuant allié. D’abord, à l’aube des législativ­es de 2017, le président fraîchemen­t élu avait opportuném­ent détourné le regard quand son parti avait déchiré l’accord électoral noué avec le MoDem : les 80 députés promis étaient brutalemen­t devenus une vingtaine. François Bayrou et Richard Ferrand, alors chargé des investitur­es, avaient failli en venir aux mains. Autre pomme de discorde : le cas Sylvie Goulard, ex-ministre centriste de la Défense et ennemie jurée de Bayrou, poussée (en vain) par l’Élysée au poste de commissair­e européenne. En juillet dernier enfin, lors du remaniemen­t, le Palois a dû agiter la menace de la rupture quand des ministres

« Les réunions du parti où il nous fait à chaque fois une déclaratio­n de politique générale et où on entend parler de Pau pendant des heures, ras-le-bol ! »

Un cadre du MoDem

centristes ont frôlé la rétrograda­tion. « Il s’est fâché tout rouge », confie l’un d’eux. Il n’en tient pourtant pas rigueur au chef de l’État, de vingt-sept ans son cadet, avec qui il entretient une relation d’ordre quasi filial. « Il se méfie de tout le monde, sauf de Macron », s’étonne un pilier du parti.

Bayrou se sait en position de force. Sans lui, point de majorité à l’Assemblée nationale. Sans le MoDem, pas de victoire possible en 2022. En coulisses, les tractation­s s’accélèrent pour mettre sur pied une grande coalition des partis de la macronie, dont les régionales de 2021 seraient le baptême du feu électoral. Le sujet était au menu du discret dîner politique de rentrée qui s’est tenu le mardi 25 août à l’Élysée. Autour de la table, ils n’étaient que quatre : Emmanuel Macron, Jean Castex,

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