La relance, c’est bien, le vaccin, c’est mieux
La baisse des taxes sur les entreprises va dans le bon sens pour sortir de la récession. Mais seul un retour de la confiance ferait vraiment le job.
En l’absence de contrainte européenne, desserrée par Bruxelles pour cause de pandémie, on pouvait craindre le pire du plan de relance de l’économie française. La valse des milliards d’argent public qu’il met en branle donne le tournis. D’autant plus que le projet s’accompagne de la résurrection du Plan, une usine à gaz dont le parfum soviétique fait frémir – sans même mentionner que son haut-commissariat a été confié à François Bayrou.
Et pourtant, quand on le compare à ceux de nos grands voisins, le plan de relance français se défend honorablement. Calibré à 100 milliards d’euros sur deux ans, il mobilise 4 % de notre produit national brut annuel. En proportion, c’est un peu plus qu’outre-Rhin. Surtout, et contrairement à ce que font nos voisins, il ne s’agit pas seulement d’un paquet conjoncturel destiné à relancer la demande post-confinement, mais d’un ensemble de mesures réformatrices. Elles feront vraiment du bien à l’économie française si elles sont maintenues sur le long terme.
La mieux venue d’entre elles est la diminution des impôts de production, ces taxes qui frappent les entreprises sans lien avec leurs profits. La France est championne du monde en la matière : ces impôts totalisaient 109 milliards d’euros en 2018, selon Eurostat, presque autant que dans tout le reste de l’Union européenne, Allemagne comprise ! Leur baisse de 10 milliards par an, en 2021 puis 2022, reste modeste mais justifie à elle seule le plan de relance. C’est l’unique mesure susceptible d’améliorer les comptes de résultat et, par voie de conséquence, d’enrayer un tant soit peu la poursuite des délocalisations industrielles.
Ceux qui stigmatisent le « cadeau » qui serait offert là aux entreprises doivent comprendre que les impôts réglés par les sociétés sont répercutés, en bout de chaîne, sur des personnes en chair et en os : le consommateur, qui doit débourser davantage pour acheter son produit, le salarié, moins bien payé, voire le chômeur, qui peine à retrouver un emploi si les entreprises embauchent moins pour cause de compétitivité dégradée.
Le plan met l’accent, à raison, sur la sphère privée plutôt que sur les emplois publics. Les entreprises privées, déjà très endettées, ont le plus souffert de la terrible récession engendrée par le confinement ; elles risquent de mettre la clé sous la porte par milliers dans les mois qui viennent. Jean Castex a raison également de mettre le paquet sur l’investissement plutôt que sur la consom
Un vaccin coûterait moins cher, il aurait plus d’effets positifs, et il donnerait moins de mauvaises habitudes.
mation. Avec plus d’argent, les ménages français ne feraient qu’enrichir Amazon, Apple ou les entreprises d’État chinoises, alors même qu’ils ont épargné comme jamais ces derniers mois et que la plupart d’entre eux ne manquent pas de liquidités.
Si le plan est malin, il est aussi révélateur de notre manque de marge de manoeuvre financière. Il ne consacre par exemple que 2 milliards à la formation professionnelle, alors même que l’inadéquation des compétences est une des grandes faiblesses de l’économie française et que la crise va rendre les reconversions encore plus urgentes. On paie là le prix de l’absence de réformes structurelles depuis des années, d’une sphère publique obèse, et de déficits cumulés excessifs qui ont conduit la France à un niveau d’endettement public inouï.
En fin de compte, le succès de la relance dépendra surtout du retour de la confiance des entreprises et des ménages. Le choc provoqué par la contraction d’environ 10 % du produit intérieur brut cette année n’a pas encore produit tous ses effets délétères, surtout en cas de reconfinement. Le soutien public reste indispensable mais il est contre-productif à terme, car, plus il se prolonge, plus il retarde le nécessaire ajustement structurel. Dans l’immédiat, le facteur qui aiderait le mieux à reprendre confiance serait l’arrivée d’un vaccin contre le Covid-19. Il coûterait moins cher que le plan de relance, il aurait plus d’effets positifs, et il donnerait moins de mauvaises habitudes. Et pour le produire, on compte sur l’initiative privée, pas sur les plans de l’État
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