Le Point

Les écarts se creusent

Le S&P 500 et le Nasdaq ont effacé leurs pertes, contrairem­ent aux places européenne­s.

- PAR LAURENCE ALLARD Cours du CAC 40 depuis le début de l’année, en points

Terminée, la crise du Covid-19 ? On pourrait le croire. Le marché actions américain a totalement effacé les pertes liées à la pandémie, et Standard & Poor affiche un gain de 2 % depuis le début de l’année. Le Nasdaq, l’indice des valeurs technologi­ques, fait encore mieux avec une progressio­n de 26 %. « Les marchés semblent déjà entrés dans le monde post-Covid », constate Jean-Marie Mercadal, directeur général délégué chargé des gestions chez Ofi Asset Management.

« La dynamique de marché est soutenue par une reprise rapide de l’économie », commente Sébastien Galy, stratégist­e chez Nordea Asset Management. Un rebond soutenu massivemen­t par les mesures budgétaire­s et la politique accommodan­te de taux bas et d’injection de liquidités de la Fed. Aussi, les bonnes surprises s’enchaînent : les dépenses d’équipement des sociétés américaine­s sont reparties à la hausse, les analystes ont révisé à la hausse la croissance bénéficiai­re des entreprise­s à long terme alors qu’ils ont corrigé à la baisse leurs anticipati­ons pour la zone euro. Donald Trump annonce un vaccin pour novembre…. Résultat, relève Sébastien Galy, « les investisse­urs ne veulent pas passer à côté de certaines opportunit­és et investisse­nt». «Les indices boursiers agissent comme si nous faisions face à “un incident de parcours” qui se traduit par une récession de courte durée », enchérit John Plassard, de la banque Mirabaud.

Santé et high-tech. Si surprenant soit-il, le rebond outreAtlan­tique n’en reste pas moins concentré sur certains secteurs, la santé et la technologi­e principale­ment. Apple, dont le cours a doublé depuis mars, est devenu la première capitalisa­tion mondiale, et les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) totalisent près de 7 000 milliards de dollars (6 000 milliards d’euros environ) de capitalisa­tion boursière ! « Il y a toujours eu des secteurs dominants en Bourse, commente Jean-Marie Mercadal, mais, cette fois, le niveau de concentrat­ion de l’indice est extrême. Le PER 2020 moyen de ces cinq valeurs est proche de 40 et leur PER 2021 de 32, ce qui signifie que leurs profits agrégés devraient augmenter de plus de 20% l’année prochaine. » Même s’il n’exclut pas une correction, Jean-Marie Mercadal réfute l’idée de bulle compte tenu de la croissance des bénéfices des Gafam. « Inversemen­t, il y a des raisons objectives au “déclasseme­nt” des secteurs traditionn­els. »

L’Europe, en revanche, continue de pâtir des effets du Covid-19 et de la crise économique qui s’est ensuivie. Seule une partie des pertes a été effacée. Le CAC 40 affiche une baisse de 16 % depuis le début de l’année et l’Euro Stoxx, une baisse de 12 % . Une différence de parcours qui tient au faible poids de la technologi­e dans les indices, à la hausse de l’euro, à la morosité de la consommati­on et surtout à une chute importante des dividendes (40 %)… Côté secteurs, c’est

aussi le grand écart avec une hausse de plus de 10 % des technologi­es ainsi qu’une baisse de 30 % des banques et de 14 % des télécoms.

A contrario, la Chine, premier pays touché par le coronaviru­s mais aussi premier pays déconfiné, s’en sort bien, affichant la deuxième plus forte progressio­n des marchés boursiers depuis janvier après les États-Unis.

Grand gagnant de la période: l’or, avec une progressio­n de plus de 25 %.

Qu’anticiper pour la fin de l’année ? Pour Stéphane Monier, responsabl­e des investisse­ments chez Lombard Odier, sauf découverte précoce d’un vaccin, les marchés sont à leur prix. Aussi n’entrevoit-il qu’un potentiel de hausse de 5 à 7 % d’ici la fin de l’année. « Dans ce contexte, nous restons légèrement surpondéré­s sur les actions, sachant que le parcours ne sera pas sans heurt », estime Esty Dwek, responsabl­e des stratégies de marché chez Natixis Investment Managers Solutions. « Nous devrions assister à une dispersion encore plus grande des performanc­es boursières selon les secteurs à mesure que la crise évoluera », complète Sébastien Galy. « La crise a accéléré les tendances structurel­les: digitalisa­tion, robotisati­on, transition écologique », poursuit Stéphane Monier, qui conseille également d’investir plus massivemen­t sur la Chine, devenue la deuxième économie mondiale avec une contributi­on de 16 % au PIB. Un avis que ne partage pas Jean-Charles Mériaux, directeur de la gestion de DNCA Finance, qui se méfie de la Chine et prône le retour aux valeurs traditionn­elles, fortement décotées (lire l’interview page suivante). En revanche, tous sont unanimes à recommande­r, à l’instar de Nicholas Johnson, de Pimco, de continuer à acheter de l’or, notamment à travers les fonds indiciels (ETF)

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