Le Point

La vie des autres

Avec son « accoucheur de mots », Mohammed Aïssaoui redonne l’espoir aux funambules de la vie.

- PAR MARC LAMBRON

On s’alarme, à raison, contre la nouvelle censure qui nous arrive d’Amérique: baptisée cancel culture, elle entend faire disparaîtr­e socialemen­t celui ou celle qu’elle vise en lui faisant tout perdre, travail, réputation, avec l’aide de la puissance des réseaux sociaux. Déviance contempora­ine ? Non. Dans la Rome antique, la pratique de la damnatio memoriae (« condamnati­on de la mémoire ») avait exactement le même but, sans Twitter ni Facebook. Connaissez-vous l’empereur Geta (189-212 de notre ère) ? Non, et c’est normal. Son frère Caracalla l’a effacé de l’Histoire après l’avoir assassiné, interdisan­t même aux poètes de l’évoquer. « Il suffisait de mettre le nom de Geta dans un écrit ou seulement de le prononcer pour être aussitôt perdu », raconte Dion Cassius, ajoutant que Caracalla « s’irritait contre les pierres qui portaient ses statues, et fit fondre toute la monnaie frappée à son effigie ». Et Domitien (51-96 de notre ère) ? Sa damnatio memoriae à lui fut votée par le Sénat qui fit, selon le rhéteur Lactance, « effacer toutes ses inscriptio­ns ». La cancel culture d’État ? Pourvu que ça reste antique !

« CANCEL CULTURE » À LA ROMAINE.

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