S’affirmer rural chic
Les néo-ruraux ont lu Sylvain Tesson et aimé Catherine Deneuve parlant de ses poules.
… ou tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la campagne sans jamais oser le demander. PAR CONSTANCE ASSOR, FLORENT BARRACO, VICKY CHAHINE, THIBAUT DANANCHER, GILLES DENIS, SÉBASTIEN LE FOL, YVES MAROSELLI, MARIE-CHRISTINE MOROSI, EDSON PANNIER, MARION TOURS
Voltaire et Rousseau redeviendraient-ils à la mode ? Tout se passe en effet comme si les Français, épuisés par les miasmes et les contraintes afférentes, avaient retrouvé le goût de la nature en se replongeant, sinon dans les oeuvres complètes des écrivains, du moins dans leurs extraits de Lagarde et Michard. Et les urbains enfermés de se rêver Candide en son jardin – la résidence secondaire, un temps délaissée, devenant d’autant plus désirable que son accès a été défendu. D’aucuns s’apprêteraient même à un exode pour goûter la douceur de vivre au grand air, sinon au vert, voire plus si affinités : dans le temps, ils ont écouté Blur et l’hymne de la britpop « Country House » – une acerbe vision de l’homme d’affaires choisissant la clé des champs. Et depuis leur lecture de Sylvain Tesson, ils rêvent les étangs de Sologne en lac Baïkal et les hérissons en panthères des neiges. Une manifestation d’hédonisme éclairé, forcément éclairé, dès lors que l’on fait le bon choix : voici notre guide des bonnes manières à l’usage des ruraux chics.
MAISON DE VILLAGE OU DE CAMPAGNE ?
Le curé a déserté depuis belle lurette nos campagnes. Mais jamais son jardin n’a été un objet de désir si intense. Il signe naturellement le presbytère que l’on retape et, par extension, tout espace vert clos de murs dans ces maisons de village que l’on s’arrache à prix d’or. La force tranquille de François Mitterrand posant en 1981 devant un hameau à clocher apparent n’a finalement jamais eu autant la cote. Comme si les enfants d’En Marche ! étaient les héritiers un rien indignes de Tonton – la boue, oui, mais avec un rien d’urbanité quand même. Le tout mâtiné d’un zeste de nostalgie pompidolienne – version la Maison-Blanche du couple présidentiel, à Orvilliers, dans les Yvelines. Acquise en 1954, cette thébaïde francilienne ressemblait à son propriétaire, « paysan et raffiné à la fois », selon les mots de son camarade magnoludovicien Léopold Sédar Senghor. On y vit en hédonistes férus d’art, tendance gin-rummy au coin du feu et flipper d’arcade dans la bibliothèque, anthologie de la poésie française et billard dominical, gravier blanc dans la cour et 4 L de famille – que l’on reconditionnerait électrique aujourd’hui –, lecture de l’horoscope avec le Cinzano de l’apéro et atelier fleurs coupées pour « Bibiche » – doux surnom donné par Georges à Claude. De la modestie, donc, de bon aloi, répondant à l’adage pompidolien : « Quand on prétend faire de la politique, on s’arrange pour ne pas avoir de château. Sauf s’il est dans la famille depuis au moins Louis XV. » Cette martingale déclinée en week-end par les Pompidou se délocalise lors des vacances d’été. Sur ordre du Général, jugeant un rien inappropriées les vacances tropéziennes de son Premier ministre, c’est à Fouesnant, puis à Sainte-Marine, rue Pierre-Gourlaouen, que se jouera cette partition d’un rural chic qui, même parfumé à l’iode, n’a pas pris une ride. Presque intacte – une PS5 peut parfois se glisser dans le décor, Carla Bruni apparaître en bandeson, Sylvain Tesson s’installer sur les rayons –, elle s’affirme comme l’acmé de la modernité.
Un statut que lui dispute la maison « de campagne ». Elle est synonyme de grands espaces – de plus en plus, à en croire les agents immobiliers un rien submergés par la demande de ces adeptes du « property porn », comme on dit outre-Manche pour qualifier ce hobby consistant à rêver de propriétés grandes comme des principautés. Des hectares rimant hier avec chasse, pêche et chevaux – le côté Rothschild de la chose – et aujourd’hui avec potagers, vergers, poulaillers. Catherine Deneuve, toujours à l’avantgarde, ne vantait-elle pas déjà le mérite et la beauté de ses poules lors de ses essayages couture chez Saint Laurent ? Un nouvel esprit « ferme » règne sur
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ces survivalistes chics, lecteurs ■ de Regain – Le Chasseur français sans fusil version néocultivateur enthousiaste – et adeptes du retour à la terre ma non troppo. Quand, dans les années 1970, on partait élever des chèvres dans le Larzac avant de vendre ses fromages sur les marchés, en 2021, on opte pour une vision de prime abord moins radicale sinon moins utopiste : il y a vingt ans, cela fleurait bon SAR Charles, prince de Galles, se lançant dans le bio sur ses terres tout en parlant à ses roses. Aujourd’hui, ce tropisme pourrait avoir la joie de vivre de la cheffe Rose Chalalai Singh, cultivant ses légumes à Majorque. Une vision réconciliant finalement ex-bobos verts, rad-soc et giscardiens bon teint. C’est Authon, domaine familial de l’ancien président de la République devenant un phalanstère autarcique, mais aussi Latche, ses arbres, ses chemins et ses ânes, sans Coup d’État permanent mais avec La Paille et le Grain. Un syncrétisme politique qui réconcilie la Sylvie de Gérard de Nerval avec la moissonneuse-batteuse – voire la charrue pour les plus extrémistes. Et, parce qu’il ne s’agit tout de même pas de se transformer en vrai paysan, on sent que le fermage, en mode permaculture évidemment, a la vie devant soi. Rien que de très hexagonal finalement dans ces tectoniques rurales : en France, depuis Rousseau, on sait que toute campagne est forcément politique. G. D.
BOIS BRUT OU TOILE CIRÉE ?
Difficile de résister à la tentation minimaliste, celle que l’on voit s’afficher à longueur de saisons dans les pages des magazines déco à la mode. Celle-là même qui voudrait, sous prétexte de chic, qu’on laisse à nu le bois brut de nos tables à manger, au risque de se choper une écharde. Et si on s’inspirait – encore – de nos voisins scandinaves ? Les ayatollahs du bon goût n’ont pas renoncé à la
Un nouvel esprit « ferme » règne sur ces survivalistes chics, lecteurs de Regain – Le Chasseur français sans fusil.
bonne vieille toile cirée, tout droit sortie des années 1950, dont la praticité n’est plus à prouver. Mieux, ils la remettent au goût du jour, en remplaçant le traditionnel vichy par des motifs graphiques et colorés tout ce qu’il y a de plus moderne. Des tableaux oniriques chez Arvidssons Textil, un feuillage en all-over chez Boel & Jan ou des fleurs psychédéliques chez Marimekko… On en trouve une grande variété en ligne chez NordicNest, ainsi que dans toutes les bonnes merceries. E. P.
À partir de 25 euros, www.nordicnest.fr.
HASHTAG « COTTAGECORE » OU SMARTPHONE DETOX ?
L’intention est louable, mais la diète digitale en milieu rural, ça va bien deux minutes. Alors on rallume son smartphone – et si on jouait plutôt à la famille Ingalls sur les réseaux sociaux ? Avec le « cottagecore », ceux qui n’ont pas peur du ridicule ont une occupation toute trouvée. Le principe est simple : arroser son fil d’actualité de clichés bucoliques, à grand renfort de filtres pastel, linge frais, napperons en dentelles et fleurs séchées. Une esthétique hautement virale – les pics de cottagecore sur les réseaux suivent de près ceux de contaminations au Covid, murmure-t-on chez Tumblr – et qui empile les références, pourvu qu’elles reflètent un univers old school fantasmé, loin de la réalité sordide. On peut citer pêle-mêle le jeu Animal Crossing, les films du Studio Ghibli, les ouvrages de Beatrix Potter ou Folklore, le dernier album de Taylor Swift. Le phénomène a littéralement explosé sur TikTok, où le hashtag indique 4,5 milliards de vues au compteur. Le succès est tel qu’on parle même de sous-culture. Et dire qu’on a failli passer à côté… E. P.
BOTTE OU SABOT ?
Pour crapahuter dans les champs parfois (souvent) boueux, inutile de penser à miser sur des chaussures de ville. À la campagne, comme partout depuis des mois d’ailleurs, c’est plat et confort. Première option : l’incontournable botte en caoutchouc dont la fonctionnalité n’est plus à prouver. Elle a fait la renommée d’Aigle ou, outre-Manche en mode plus snob, Hunter. Sous le flair du directeur artistique Hedi Slimane, qui n’a pas son pareil pour sentir l’air du temps, Celine l’a mise en majesté dans sa collection printanière 2021. Quant à Anthony Vaccarello chez Saint Laurent, c’est à une collaboration avec Hunter qu’il invite. Moins « la gadoue, la gadoue, la gadoue », comme chantait Jane Birkin, mais stylé en diable, il est un modèle qui fait son retour : le sabot. Ambiance Heidi à la ferme, il n’a jamais quitté les collections de la boutique suédoise historique Kerstin Adolphson. Sa version chic avec bride au maillon siglé est arrivée chez Celine (un bon indicateur des tendances, vous l’aurez compris), et sera pour l’été prochain bordée de clous chez Hermès.
Bottes Saint Laurent x Hunter : 495 € ; sabots Hermès, 760 € ; sabots Celine Les Bois en veau, 750 € et bottes de pont en caoutchouc, 450 € (collection printemps-été 2021) ; sabots Kerstin Adolphson à partir de 39 € ; bottes Aigle à partir de 45 €.
PIERRE, CARREAUX OU PARQUET ?
Eh bien, les trois! Et cela ne date pas d’hier. Déjà au XVIIIe siècle, les belles bâtisses provençales cultivaient la mixité, à savoir pierre ou terre cuite au rez-de-chaussée (plus salissant) et parquet à l’étage. Une tradition dont se sont emparés les hôtels de caractère jouant, comme au domaine de Fontenille, à Lauris, entre pierres de Bourgogne dans les parties communes et plancher en chêne dans les chambres, «afin d’apporter un côté chaleureux mais aussi d’amortir le bruit, explique Guillaume Foucher, son copropriétaire. L’idée étant de valoriser l’ancien et de l’adapter à son nouvel usage. » Même esprit à l’hôtel Crillon Le Brave, où la pierre incarne l’âme de la maison mais aussi celle du village. «Ici, les murs ne sont jamais droits ni les sols homogènes. C’est dans cette imperfection que réside l’authenticité du lieu », note la famille Pariente qui, au fil des rénovations, a peu à peu introduit le parquet « pour son aspect brut et élégant ». Et c’est à l’hôtellerie que l’on doit aussi le retour en force d’un autre matériau naturel: la faïence, à travers azulejos, carreaux de Delft, zelliges marocains ou encore pavements de la Renaissance. Éditeurs, designers, artisans, enseignes de grande distribution… Tous y vont de leur réinterprétation et
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diversifient les usages : sur les ■ murs, les sols, les contremarches ou les tables ; dans les cuisines, les couloirs, les salles de bains, les douches ou même les piscines. On retiendra notamment la collection Azulej signée Patricia Urquiola pour Mutina, florilège de motifs géométriques et floraux dans des tonalités allant du gris au bleu azur, en passant par le rose pâle, le beige, le terracotta et le blanc cassé : le motif vintage a la cote. Idéal pour s’accorder… avec la pierre et/ ou le parquet. M. T.
Vieilles dalles de Bourgogne, à partir de 154,20 € le m2 au Comptoir des pierres ; parquet en chêne massif Wagram, à partir de 180 € le m2 chez Origines ; carreaux de ciment base deux couleurs, à partir de 108 € le m2 chez Maison Bahya. Carreaux de faïence Leroy Merlin, à partir de 22,95 € le m2.
VESTE BARBOUR OU DOUDOUNE ROCKY MOUNTAIN ?
Foulard sur la tête, la reine d’Angleterre arpente rarement la campagne anglaise sans son anorak en toile de coton enduite d’huile – un usage de country girl, qu’imita sa bru, Diana. Que ce soit le modèle Bedale ou Beaufort, les vestes Barbour ont de toute manière les faveurs de la gentry et de la famille royale anglaise (trois « Royal Warrants », tout de même) et restent un incontournable du vestiaire campagne. D’ailleurs, il suffit de voir la faune branchée s’aventurer dans les rayons de Mettez, spécialiste français des vêtements de chasse. Si l’échappée façon cow-boy dans les plaines américaines vous inspire plus qu’une partie de campagne en Sologne, offrez-vous une doudoune sans manches aux empiècements de cuir signée Rocky Mountain Featherbed. Fondée dans le Wyoming dans les années 1960, cette marque a été relancée par une entreprise au Japon, où l’on voue un culte au vestiaire outdoor de bonne facture. Plus exotique. V. CH.
Veste Barbour à partir de 250 € ; doudoune Rocky Mountain Featherbed à partir de 590 €.
COCOTTE OU ROBOT ?
Goût de l’originel versus parfum de l’original. Tout un monde sépare la cocotte du robot. La tradition de la fonte émaillée des mythiques Le Creuset et Staub face à l’innovation de l’acier inoxydable des Thermomix, KitchenAid, Kenwood et d’une ribambelle d’autres marques. Des objets iconiques des XXe et XXIe siècles qui racontent chacun à sa manière notre époque. Celle d’une cohabitation – voire d’une complémentarité parfois – entre cahiers de recettes et livres de cuisine de nos grands-mères et clichés pris par nos smartphones immortalisés sur Instagram sous le hashtag #pornfood. D’un côté, la beauté du geste, l’amour des longs mijotages démarrés doucement sur le feu et poursuivis patiemment à couvert au four – un rêve de boeuf bourguignon, de blanquette de veau ou d’agneau à la cuillère… De l’autre, la joie du temps gagné et de l’inratable, une révolution technologique reliant la cuisine au reste du monde pour une manière de couteau suisse permettant tout, du pain à la mayonnaise en passant par la purée, le curry de cabillaud, le colombo de poulet, les sorbets, les glaces, les tartes, la mousse au chocolat… Une bataille sur le feu entre localisme et globalisation de l’assiette, terroirs et nouveaux territoires du goût. Le tout avec une réconciliation possible : la taille de la cuisine de campagne peut permettre des cohabitations spatiales que la ville interdit… T. D.
À partir de 99,95 € la cocotte Le Creuset, 89,85 € la cocotte Staub.
À partir de 1 359 € le Thermomix TM6, 719 € le robot culinaire artisan 4,8 litres KitchenAid, 999 € le robot cuiseur Kenwood CookEasy +.
PERMACULTURE OU MICRO-FORÊT ?
Ce lopin de terre fraîchement acquis attend désormais d’être semé. Sans forcément avoir la main verte, plusieurs options existent. D’aucuns choisiront la permaculture – faire pousser un potager autosuffisant, de cultures diverses, en recréant un écosystème naturel vertueux. D’autres s’essaieront à la méthode Miyawaki, qui consiste à ériger, dans un espace délimité, une micro-forêt, à raison de 3 arbres par mètre carré. Des associations, comme Mini Big Forest, accompagnent collectivités, entreprises et particuliers, et détaillent la marche à suivre : amender le sol à l’aide de matériaux naturels et y planter des pousses juvéniles, en mixant les strates forestières (arbustes, moyens et grands arbres). On privilégiera les essences natives, c’est-à-dire qui pousseraient d’ellesmêmes localement sans l’intervention humaine. Cette technique en plein essor offre une croissance dix fois plus rapide qu’à l’état naturel. Il faudra tout de même patienter une bonne vingtaine d’années pour en récolter les fruits. Les plus pressés se contenteront d’un beau gazon. E. P. www.minibigforest.com.
COUCOU OU COMTOISE ?
Coucou suisse et horloge franc-comtoise ont beau avoir rythmé le temps dans presque toutes les fermes de France, l’une comme l’autre semblaient vouées aux gémonies pour cause de kitsch. Voilà pourtant que la dernière campagne horlogère de Gucci signe leur grand retour. Chinée ou fraîchement dépoussiérée du grenier, l’horloge de parquet meuble autant qu’elle habite la pièce, fière du tictac vibrionnant de son balancier. Plus régressif et sonore, le coucou – à choisir chez Lötscher qui les produit à Brienz depuis cent ans – amusera les enfants comme les nostalgiques du bon vieux temps. L’heure est un éternel recommencement. C. A.
Coucou suisse Lötscher à partir de 270 €. Horloge comtoise « vintage » à partir de 220 € sur Selency.
JARDIN DE SIMPLES OU RÊVE HOLLYWOODIEN ?
Refuge et lieu d’expériences sensorielles, le jardin reste un lieu d’expression. Foisonnant et bienfaisant, sa version « simples » allie le beau à l’utile, la simplicité au durable, le ludique à la collecte. Camomille, mélisse, marjolaine, angélique, lavande et thym, organisés en carrés plantés au plus près de la cuisine, enchantent nez et papilles. On sème, on cultive et on herborise dans ce jardin-laboratoire aux vertus intemporelles. Demeure qu’à l’heure du voyage immobile, le rêve d’exotisme se plante via des plantes venues d’ailleurs recherchées pour leurs feuillages ou leurs coloris chatoyants. Par souci d’économiser l’eau et d’éviter la corvée d’arrosage, ces filles du soleil que sont les agaves,
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les palmiers bleus, les bougainvillées ■ ou les phormiums assurent un décor digne de Hollywood. M.-C. M.
Lavande officinale, 9,90 € les 3 godets chez Gamm vert, www.gammvert.fr. Palmier bleu du Mexique, à partir de 65 € le plant de 60 à 80 cm, chez Promesse de fleurs, www.promessedefleurs.com.
JACQUEMUS OU BURBERRY ?
Confinement oblige, le désir de campagne s’est invité jusque dans les défilés de mode. Pour leurs collections estivales, les créateurs ont préféré la nature et le grand air aux traditionnels podiums. Mais même à ce jeu-là, les tendances s’affrontent : plutôt balade sylvestre façon Burberry, qui diffusait en première mondiale, sur Twitch, la performance « In Bloom », avec une armada de mannequins surgissant d’une forêt embrumée. Ou marche sinueuse à travers les blés, comme chez Jacquemus, qui présentait son ode à « L’Amour » dans les champs du Vexin. De quoi inspirer nos futures promenades champêtres… Ne manquera plus que la garde-robe. E. P.
POÊLE OU CHEMINÉE ?
Limiter, voire interdire la combustion de bois ? L’idée de sacrifier ce rituel a fait long feu face à l’ardeur des défenseurs de ce petit plaisir transgressif. Et pour cause, rien de tel qu’une flamme au foyer. « Le feu réchauffe et réconforte, il invite l’âme au repos », note Gaston Bachelard dans sa Psychanalyse du feu. En suivant sa trace au fil de l’histoire, le grand penseur de la rêverie rappelle combien l’homme est attaché à cette pratique dont les plus anciens vestiges français, datant de – 400 000 ans avant J.-C., furent trouvés du côté de Lunel-Viel. Un feu naît, croît, se consume, décline et s’éteint, la flambée est une métaphore de l’existence. Un art simple aux vertus apaisantes qui transforme l’ordinaire. Déculpabilisé, il ne reste plus qu’à choisir son camp : poêle ou cheminée. « Contre toute attente, ces deux installations renvoient au même objet. Longtemps, la différence a été d’ordre esthétique, la cheminée étant ouverte et le poêle fermé. Mais il existe aujourd’hui des poêles à foyer ouvert et des cheminées à foyer fermé », explique un expert, spécialisé dans l’installation de pièces en céramique artisanale estampillées Sergio Leoni, qui comptent parmi les plus réputées. « Les nouvelles technologies de combustion étant les mêmes, elles sont aussi thermiquement performantes, énergivores et peuvent l’une comme l’autre être pourvues d’accessoires pour la cuisine. » Alors qu’importe l’âtre, pourvu qu’il y ait la flamme ! C. A.
Poêle à bois Sergio Leoni à partir de 2 880 €.
PLAID OU QUILT ?
C’est peut-être un détail pour vous mais pour un citadin, fraîchement converti aux charmes du champêtre, cela veut dire beaucoup. Indissociable de la campagne, le choix de cet accessoire se révèle souvent riche d’enseignements. Un grand tissu épais de laine sergée, en tartan ou pas, se veut le porte-étendard du bourgeois décomplexé, sportif dans l’âme, adepte du Scrabble au coin du feu. Une couverture molletonnée en patchwork est à l’inverse le signe distinctif des néoruraux ascendant bohème, nostalgiques des années 1970, convertis à la cause du recyclage. Les uns comme les autres aiment la sophistication. Ceux-ci jetteront leur dévolu sur l’authentique couverture d’équitation (en laine et non en cachemire !) Rocabar d’Hermès, les autres sur les quilt APC réalisés par l’artiste Jessica Ogden. C. A. Couverture Rocabar Hermès, 435 € ; quilt APC x Jessica Ogden, 440 €.
CHIEN DE RACE OU CLÉBARD ?
Si la campagne appelle le canin, la ligne de partage s’affirme entre adeptes du pedigree assuré par l’élevage et sauveurs de toutou mouillé. Les premiers s’affirment volontiers au grand air avec chiens de chasse ou d’eau, le mode fini du genre, comme disait Spinoza (avec son concept du chien qui aboie), demeurant le labrador. Présidentiel depuis Jupiter, le mâle chocolat des Pompidou, il s’affirme avec Samba, offert à VGE par Elizabeth II, qui éclipsa dans l’imaginaire public Jugurtha, braque de Weimar auquel le président ne parlait, dit-on, qu’en anglais.
De Nil (Mitterrand) à Philae (Hollande), via Clara (Sarkozy) et Maskou (Chirac) – le labrador est demeuré un attribut esthétique du pouvoir auquel ne déroge pas le locataire actuel de l’Élysée. Signe des temps, Nemo fut pour le coup adopté par les Macron. Un syncrétisme qui donne au chien de race la décontraction du clébard – Nemo fut surpris par les caméras pissant avec détachement dans les cheminées XVIIIe du palais présidentiel. Demeure qu’à ce jeu de la Belle et le Clochard, ce dernier, en version un rien hirsute, n’a jamais eu autant la cote parmi les néoruraux – adeptes de ces réseaux sociaux qui sont devenus les derniers refuges des abandonnés. Comment résister au « cute factor », comme on dit en marketing, que sont les rescapés de l’association Sauvade ou de la SPA ? G. D. http://asso-sauvade.fr.
MINI OU MAXI-LÉGUME ?
La miniature face à la proéminence dans le potager. Ou l’art du mini et du maxi-légume. Au départ, la même technique de culture. On sème des graines dites paysannes ou anciennes. Carottes, choux, navets et autres radis s’épanouissent sous des serres, châssis ou mini-tunnels en automne et hiver et à l’air libre au printemps et en été. Deux écoles s’affrontent ensuite. La première, d’une simplicité biblique, laisse la nature faire son oeuvre jusqu’à pleine maturité, voire plus. La seconde, minutieuse, consiste à surveiller scrupuleusement le vivant. « Il faut observer très régulièrement la taille des feuilles et du collet [partie entre la tige et les racines, NDLR] et gratter légèrement dans le sol afin de récolter tout petit », explique Éric Roy, pape du mini-légume à Saint-Genouph en Indre-et-Loire. Un choix industrieux.
À partir de 1,80 € le sachet de 1 500 graines de carotte.
Rien de tel qu’une flamme au foyer. « Le feu réchauffe et réconforte, il invite l’âme au repos », note Gaston Bachelard dans sa Psychanalyse du feu.