Napoléon, prof d’histoire… et de géographie
2021 marque le bicentenaire de la mort de l’Empereur. D’Ajaccio à Sainte-Hélène, Le Point publie un guide qui retrace son épopée. Entre Histoire et tourisme.
Au crépuscule de sa vie, le général de Gaulle fut invité par André Malraux à disserter sur la France, l’Histoire et les personnages. Autant dire que l’homme du 18 Juin était comme un poisson dans l’eau. Rapidement, le tour de Napoléon arrive. « Où en êtes-vous avec l’Empereur ? » questionne l’auteur de La Condition humaine. « Un très grand esprit, et une assez petite âme. (…) Il a laissé la France plus petite qu’il ne l’avait trouvée, soit; mais une nation ne se définit pas ainsi. Pour la France, il devait exister. » Dans Les Chênes qu’on abat… de Malraux, de Gaulle se révèle à la fois lucide, critique mais aussi admiratif, presque jaloux. « Voyez comme les défaites ont peu atteint la gloire de Napoléon. Voyez la force de son nom, pas seulement pour les Français. Il remue les âmes. »
2021 marque le bicentenaire de la mort de l’empereur des Français et il continue à remuer les âmes émerveillées ou hostiles – les déboulonneurs ont déjà commencé à s’en donner à coeur joie en s’attaquant à plusieurs statues. Il faut dire que Napoléon a marqué de son empreinte les lieux : un immense tombeau au coeur de Paris, une maison à Ajaccio, un palais à Venise, une place à Varsovie, un escalier à Fontainebleau, une austère demeure à Sainte-Hélène… « Ici s’est assis Napoléon », « Dans cette pièce, le Premier consul a signé le décret instaurant la Légion d’honneur », « Don de l’Empereur »… Il suffit de se promener en France, ou en Europe, pour apercevoir plaques, notices d’information ou références. Dans toutes ses pérégrinations – plus de 100 000 kilomètres parcourus de la fin du XVIIIe au début du XIXe siècle –, Napoléon a laissé un souvenir : une oeuvre architecturale, une statue, une organisation territoriale ou administrative, une fontaine, un champ de bataille…
Pas étonnant donc que le tourisme napoléonien se porte toujours bien. Un phénomène pas si récent. « De son vivant, Napoléon était déjà une attraction touristique, explique l’historien Charles-Éloi Vial, auteur de Napoléon, la certitude et l’ambition (Perrin/BNF). Dès 1796-1797, des gens vont venir le voir durant la campagne d’Italie. Selon certains témoignages, Bonaparte dîne déjà en public, comme les rois de France à Versailles. Il y a une curiosité à son égard. » Le phénomène augmente quand il quitte le pouvoir (1815). Des anonymes, des dirigeants, des écrivains (Stendhal, Hugo) et des personnages de fiction (Julien Sorel) font le périple dans les lieux de mémoire : la Maison Bonaparte à
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« Voyez comme les défaites ont peu atteint la gloire de Napoléon. Voyez la force de son nom, pas seulement pour les Français. Il remue les âmes. » Charles de Gaulle