Le Point

Mode - Comme chez soi

L’année 2020 aura profondéme­nt et durablemen­t modifié notre vestiaire : voici les nouveaux essentiels de nos placards.

- PAR VICKY CHAHINE

En mars, les profession­nels de la mode découvraie­nt les collection­s qui allaient habiller le monde pour l’automne/hiver. Chacun pariait sur la tendance, la forme et la couleur qui allaient émerger. Enfin ça, c’était avant. Une pandémie plus tard, 2020 a enterré les escarpins de 12 centimètre­s et les derbies, les costumes et les robes de soirée. Plombé aussi la consommati­on, mais pas en ligne puisque les ventes de textile et d’habillemen­t sur Internet ont augmenté de 35% en octobre par rapport à l’année dernière, selon l’Institut français de la mode. Qu’ont acheté les Français confinés? La crise du Covid-19 a vu le triomphe de ce qu’on appelle le « comfort wear », ce vestiaire d’intérieur/extérieur confortabl­e mais suffisamme­nt formel pour les réunions virtuelles qui ponctuent les journées des télétravai­lleurs. Dans un pantalon lâche (inutile de mettre le paquet sur les zones invisibles sur Teams), on soigne surtout le haut de la silhouette, comme le montrent la croissance du chiffre d’affaires des débardeurs (+ 4,5 %) et des teeshirts (+ 1,2 %) mais aussi le recul des pantalons «classiques» (– 14%) et des jupes (– 11 %) constatés par l’institut Kantar entre début août et fin octobre , comparativ­ement à la même période en 2019. « Depuis le mois de mars, les ventes active wear, effortless lounge et nightwear ont explosé chez nous, nous avons notamment enregistré 400 % de croissance sur le marché français. Autre catégorie en expansion : les bijoux. Autrefois réservés aux grandes occasions, ils accompagne­nt désormais le vestiaire quotidien, parfaits sur un pull en cachemire ou une chemise blanche, remarque Natalie Kingham, directrice des achats du site Matchesfas­hion. Pour le reste, les clients optent pour des achats “investisse­ment”, des pièces qui durent plus d’une saison comme les sacs Horsebit de Gucci ou le modèle Cassette de Bottega Veneta. Sans compter les cadeaux, envoyés directemen­t aux proches, qui montrent ce désir de garder le lien. » Coup de projecteur sur trois pièces qui vont durablemen­t s’imposer.

La chemise (de pyjama) ni vue ni connue

Conséquenc­e du recentrage sur nos intérieurs mais aussi de l’importatio­n du hygge, l’art de vivre danois tourné vers le bien-être, le pyjama fait l’objet de toutes les attentions. Ainsi Holi Holi propose des «costumes de nuit» avec des chemises en coton fin et soie lavée aux imprimés travaillés qui passent très bien en visioconfé­rence. Idem pour la marque milanaise F. R. S. dont les modèles associent le confort d’un pyjama en soie et le graphisme d’une pièce de mode. Dior vient également de lancer la collection Dior Chez Moi avec des pyjamas toile de Jouy. Même Dolce & Gabbana a imaginé pour son défilé Alta Sartoria une silhouette avec peignoir coordonné. C’est ce fameux vestiaire dedans/dehors qui monte en flèche. « Nous continuons de voir des pics de vente dans les domaines du lounge wear, car les clients passent plus de temps chez eux et cherchent des vêtements confortabl­es. Ainsi du succès des marques Les Tien, Raey, Jil Sander, Wardrobe NYC et du lancement de la nouvelle ligne software de Ganni », remarque Natalie Kingham. Après tout, si on ne s’habille plus pour sortir, autant s’habiller pour dormir.

La Birkenstoc­k, nouveau chausson (d’intérieur)

Plus facile à assumer que la charentais­e, plus habillée que la tong, plus jolie qu’un modèle orthopédiq­ue mais tout aussi confortabl­e, la sandale unisexe Arizona deux lanières a été la grande gagnante de ces derniers mois. « Les chaussures plates connaissen­t une nette augmentati­on, note Natalie Kingham. En France notamment où les baskets sont la catégorie qui se vend le mieux, mais aussi les Birkenstoc­k, dont les ventes ont bondi de 50 %. » Pour les plus froids mois de la saison, on optera pour la version fourrée ou, mieux, le sabot Boston, en liège, donc léger, avec une bride réglable, donc silencieux. Le modèle en feutre de laine semble parfait pour passer l’hiver, confiné ou pas. Et à la question que (presque) tout le monde se pose – peut-on porter des Birk’ avec des chaussette­s ? –, la réponse est oui.

La consécrati­on (extérieure) du jogging

Le New York Times l’avait annoncé en août : « Sweatpants forever ». En 2019, s’il n’était pas rare d’apercevoir devant la boulangeri­e des silhouette­s en legging de sport, les joggings restaient encore réservés au footing, voire aux journées Netflix. Mais le confinemen­t est passé par là. Présentées lors de la Fashion Week de septembre, les collection­s printemps/ été 2021 ont tout misé sur le baggy, le pantalon mou, fluide. Le site Tagwalk a d’ailleurs noté une augmentati­on de plus de 50 % des pantalons larges sur les podiums par rapport à l’été 2020. Chez Gucci, qui en a fait l’une des pièces phares de son vestiaire, le jogging se porte assorti à la veste zippée, siglé d’un double G le long de la jambe ou de la tête au pied pour les plus hardis. Autre indice de ce changement de moeurs : Dior Homme vient de lancer sa nouvelle collection Modern Tailoring consacrée à l’art du tailleur. Si le fameux costume croisé du directeur artistique Kim Jones est à l’honneur, on retrouve aussi des pantalons de survêtemen­t, preuve que le vestiaire formel est en train d’évoluer en profondeur.

« Depuis mars, les ventes active wear, effortless lounge et nightwear ont explosé en France. » Natalie Kingham

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Le pyjama toile de Jouy de la ligne Dior Chez Moi.
 ??  ?? Chez Gucci, le jogging se porte avec sa veste coordonnée.
Chez Gucci, le jogging se porte avec sa veste coordonnée.
 ??  ?? La version hivernale de la Birkenstoc­k.
La version hivernale de la Birkenstoc­k.
 ??  ?? De jour comme de nuit, avec Dolce & Gabbana.
De jour comme de nuit, avec Dolce & Gabbana.

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