Paroles d’officiers : l’École de guerre et leurs OPEX
« La question du sexe ne se pose plus dans la marine » L’École de guerre compte de plus en plus d’officiers féminins. Ancien commandant du patrouilleur de haute mer Enseigne de vaisseau Jacoubet, Marie est pourtant la seule femme officier de marine à avoir été pacha d’un grand bâtiment de combat. « Les marins sont désormais habitués à avoir des femmes officiers ! Et c’est logique, car on ne va pas se priver de la moitié de la population dans le recrutement , dit-elle. Je suis payée au centime près la même chose que mes collègues masculins. Je pense que les verrous à faire sauter sont plutôt au niveau de la population : la marine est une institution à laquelle une jeune étudiante ne va pas forcément penser », regrette celle qui allait être mère pour la deuxième fois… mais qui n’était pas en uniforme lors de l’interview : les armées n’en proposent pas pour les femmes enceintes.
« En quelques secondes, la guerre… » « On est au Tchad depuis quelques semaines, on profite d’un petit moment convivial
avant d’aller dîner, se souvient Alexandre, pilote d’hélicoptère. Je reçois un appel : il faut partir d’urgence en Centrafrique pour ravitailler un bataillon de chasseurs alpins pris à partie. En quelques secondes, on passe du mode cacahuètes et bière au mode guerrier. L’ordre arrive à 3 h 30 du matin, on décolle à 4 heures. En vol, on croise les avions de chasse qui nous expliquent que la situation est critique. Une fois posés à Bangui, on charge tout ce qu’on peut en munitions. Au décollage, on est très lourds, il fait chaud : l’hélicoptère Caracal n’arrache ses 11 tonnes que grâce à la vitesse et à la grande piste de l’aéroport. À l’arrivée, les troupes au sol protègent notre approche, heureusement : le pilote me dit qu’il n’a “plus de marge”, c’està-dire que l’appareil à faible vitesse n’est désormais plus manoeuvrable, on ne peut que descendre. On finit par se poser. Une chaîne humaine de chasseurs alpins vide 3 tonnes de munitions de la soute en deux minutes et demie. »
« En Centrafrique, le traumatisme
» Thomas-Marie a été marqué : « Mes quatre mois de capitaine en Centrafrique ont été les plus intenses de ma carrière. Notre quotidien était fait de montées de violence exacerbées et inattendues. Nous devions nous interposer en permanence entre deux camps qui commettaient des exactions au-delà de tous nos repères. Imaginez : vous avez partagé un thé dans un village, et, lorsque vous passez le lendemain, la femme est éventrée sur le bord de la route et son enfant dépecé. C’est quand même terrible ce qu’un humain est capable de faire à un autre humain. »