Le Point

Bill Gates : « Le climat, une priorité absolue »

Le père de Microsoft dévoile son plan de bataille écologique par l’investisse­ment dans la recherche et l’innovation. Son livre Climat : comment éviter un désastre est un plaidoyer pour l’énergie verte.

- PROPOS RECUEILLIS PAR GUILLAUME GRALLET ET GUERRIC PONCET

« Si les pays riches ne montrent pas la voie, il n’y a aucune chance pour que les pays en développem­ent choisissen­t des solutions vertes. »

Vous connaissie­z Bill Gates, le cofondateu­r de Microsoft, le milliardai­re pourfendeu­r de l’héritage ; la cible préférée de complotist­es de tout poil ; ou le président d’une fondation qui veut éradiquer la malaria. Vous allez apprendre à connaître Bill Gates l’écologiste, avec la sortie de son livre Climat : comment éviter un désastre *. Mais cette fibre verte n’est-elle qu’une simple lubie en vogue chez les milliardai­res américains, alors que Jeff Bezos a expliqué, en laissant les rênes d’Amazon à Andrew Jassy, vouloir aussi s’engager en faveur de la protection de la planète ? « De quel droit puis-je donner des leçons à qui que ce soit sur l’environnem­ent ? » concède Gates lui-même, qui était venu en jet privé à la COP21, à Paris, en 2015… Mais Bill Gates l’écolo a malgré tout quelques arguments. En tant qu’expert, d’abord – « Jamais je n’aurais imaginé consacrer autant de temps à m’informer sur les batteries » –, il pose un regard pertinent sur ce que la technologi­e pourra ou ne pourra pas faire pour sauver l’humanité face au changement climatique. Pour ce fan du professeur de Cambridge David MacKay (L’Énergie durable. Pas que du vent !, De Boeck), le concept de green premiums est au coeur de la problémati­que.

« Presque toutes les solutions zéro carbone sont plus chères que leurs pendants en combustibl­e fossile. C’est en partie parce que les prix des combustibl­es fossiles ne reflètent pas les dégâts environnem­entaux qu’ils infligent qu’ils paraissent moins chers que les solutions de remplaceme­nt. Ces coûts additionne­ls sont ce que j’appelle les green premiums. » Selon lui, c’est aux pays riches que revient la responsabi­lité historique d’investir pour réduire ces surcoûts d’accès aux technologi­es vertueuses, afin que les moins riches puissent se développer autant qu’eux… sans condamner la planète. Entretien

■ * Les bonnes feuilles en exclusivit­é sur Lepoint.fr. Le Point: Pourquoi avez-vous écrit ce livre?

Bill Gates: Lors de mes voyages en Afrique, je me suis intéressé aux problémati­ques énergétiqu­es. Je me suis rendu dans des endroits où il n’y avait pas de bon réseau électrique, et parfois pas d’électricit­é du tout. Or c’est un élément essentiel au développem­ent économique. En parallèle, autour de 2005, j’ai commencé à rencontrer des chercheurs pour discuter de sujets liés au climat. J’ai quitté mes responsabi­lités de PDG de Microsoft [Bill Gates a quitté sa fonction opérationn­elle en juin 2008, NDLR]. Je voulais plus de flexibilit­é dans mon emploi du temps pour me consacrer à ma passion, la science, et travailler sur le changement climatique. Je suis intervenu dans une conférence TED en 2010 pour expliquer ce que signifie « tendre vers zéro carbone » : ce n’est pas juste consommer un peu moins, il faut

calculer les émissions pour ■ chaque secteur d’activité et les faire tendre vers zéro. Nous avons besoin d’innovation­s majeures et nombreuses pour y parvenir ! C’est bien d’avoir des objectifs à court terme, mais, si vous ne pilotez pas l’innovation à long terme en augmentant les budgets de recherche et développem­ent, alors vous ne résoudrez jamais les problèmes causés par le changement climatique. Avec mon livre, j’essaie d’esquisser un plan de bataille et d’expliquer clairement à quel point les choses vont être difficiles, chiffres à l’appui.

On pourrait être tenté par la décroissan­ce… Mais les pays pauvres risquent de souffrir plus encore que les autres de ce combat climatique.

Aujourd’hui, même les pays riches ne peuvent pas se permettre financière­ment de choisir la voie verte, car les green premiums [les surcoûts liés à l’utilisatio­n d’une solution verte plutôt qu’une solution polluante, NDLR] sont trop élevés pour eux aussi ! Pourtant, les pays riches, surtout les États-Unis et l’Europe, doivent au monde non seulement de réduire leurs propres émissions, mais aussi d’innover pour permettre à tous d’avoir des green premiums suffisamme­nt bas dans tous les secteurs émetteurs de carbone. J’espère que des pays moins riches, par exemple l’Inde, pourront choisir dès 2050 et sans surcoût majeur une voie vertueuse, y compris pour fournir des logements ou la climatisat­ion à leur population. Si les pays riches ne montrent pas la voie, il n’y a aucune chance pour que les pays en développem­ent choisissen­t des solutions vertes. Et ces derniers continuero­nt de répondre aux besoins de leurs citoyens avec les moyens à leur dispositio­n, y compris si cela implique d’augmenter leurs émissions. Je suis déçu par ce que nous avons fait du côté des budgets de R&D : nous aurions dû investir beaucoup plus dans les secteurs prometteur­s pour le climat, comme je l’avais déjà dit à la COP21, à Paris, en 2015. L’engagement était alors de doubler ces budgets en cinq ans, mais très peu de pays l’ont fait. Même aux États-Unis sous l’ère Obama, cette augmentati­on s’est limitée à 18 %. Et, sous Trump, il a fallu se battre, car il a essayé chaque année de réduire ces budgets ! Heureuseme­nt, le Congrès les a maintenus… sans toutefois les augmenter. Le faire est aujourd’hui une priorité absolue.

L’homme va-t-il réussir à compenser son impact sur la planète et à survivre?

Ce n’est pas sûr. On a une chance d’y parvenir grâce à un plan bien préparé, bien suivi, et surtout à des changement­s profonds domaine par domaine. Quiconque affirme que l’on peut y arriver en dix ans n’a pas conscience du problème !

Emmanuel Macron en fait-il assez?

L’Europe dans son ensemble – et cela se vérifie avec son plan de relance – montre la voie dans la lutte contre le changement climatique. Néanmoins, je ne pense pas que la France, ni aucun autre pays, ait mobilisé sa capacité d’innovation au niveau nécessaire. Il y a quelques projets concrets excellents, comme le stockage d’énergie innovant ou l’hydrogène vert avec des usines pilotes, mais il faut en réduire le coût de déploiemen­t à grande échelle. L’Europe n’est pas totalement unie, mais elle a la capacité d’entraîner le monde sur la bonne voie. La France, leader dans le nucléaire, pourrait jouer un rôle dans le développem­ent de réacteurs de nouvelle génération plus sûrs, pas à haute pression. En termes de taux de pénétratio­n des voitures électrique­s, la Suède, les Pays-Bas et la Norvège sont excellents, alors que la France et les États-Unis pourraient avancer plus vite. Par ailleurs, la constructi­on d’un vrai réseau électrique à l’échelle européenne est un enjeu majeur. Mais il y a des barrières politiques énormes, comme aux États-Unis. La liste des choses à faire est longue, et, sans innovation, on n’y arrivera pas…

N’est-ce pas une occasion pour l’UE, qui apparaît encore trop souvent divisée, de s’affirmer dans ce combat?

L’Europe est une structure formidable pour travailler contre le changement climatique, mais beaucoup de choses se passent encore à l’échelon national. Certains pays vont vers le kérosène vert, d’autres vers l’hydrogène vert, etc. L’Union européenne est essentiell­e, mais les budgets nationaux le sont aussi. La recherche nucléaire française permet à la France de ne pas émettre beaucoup de carbone pour son électricit­é, par exemple. Il est regrettabl­e que la Grande-Bretagne quitte l’UE, car elle a des moyens scientifiq­ues importants. J’espère qu’elle va continuer à participer à des projets européens.

Que doit-on apprendre à nos enfants?

La plupart des gens n’ont jamais visité d’aciérie… Pourtant, la fabricatio­n d’acier est essentiell­e à la bonne marche de l’économie, et, quand on se rend dans une aciérie, on comprend que l’électricit­é issue du soleil ou du vent ne peut pas suffire à la faire fonctionne­r. Il faut que le grand public comprenne cela pour qu’il soit impliqué dans ce grand changement. Nous devons suivre beaucoup, beaucoup de pistes en même temps, faire dans chaque domaine cinquante choses à la fois pour ne voir probableme­nt que cinq projets réussir ! Ajoutez à cela que ces plans en faveur du climat vont non seulement défendre une cause qui nous dépasse tous, mais aussi faire éclore de belles carrières.

Est-il possible d’inventer quelque chose de plus efficace qu’un arbre pour capter le carbone? Ne suffirait-il pas d’en planter plus?

Les arbres grandissen­t là où ils peuvent se développer. Et ils sont déjà très forts pour trouver les endroits où ils peuvent pousser ! Si vous voulez en ajouter massivemen­t, vous devrez les irriguer, et les coûts seront énormes. Par ailleurs, le coût par tonne de CO2 capturée n’est pas très intéressan­t. Je suis un gros investisse­ur dans le domaine de la capture [artificiel­le, NDLR] de carbone, et l’un des défis à relever sera de faire baisser le coût par tonne de CO2 capturée [voir ci-contre].

Quelle part de l’objectif «zéro carbone» peut-on atteindre grâce à de meilleures technologi­es, et quelle part grâce à la réduction de notre consommati­on?

Il faut que les pays en développem­ent soient en mesure d’offrir l’abri, les transports, l’éclairage nocturne ou encore l’air conditionn­é à leurs habitants. C’est dans ces pays que la plupart des gens vivent : les pays riches représente­nt une part en baisse de la population mondiale. On pourrait effectivem­ent obtenir une petite réduction des émissions de CO2 grâce aux pays riches s’ils limitaient de manière significat­ive leurs activités, mais cela ne résoudrait pas l’essentiel du problème. Même durant la pandémie de Covid-19, où l’on a fortement réduit le trafic aérien, par exemple, on a assez peu réduit les émissions de CO2. Lorsque l’économie est en croissance, on continue de polluer plus chaque année. C’était 51 milliards de tonnes de CO2 émises en 2019, et, sauf accident, on sera au-dessus en 2022 et 2023. Alors la clé, je pense, c’est de multiplier par… zéro ! On ne réduira jamais l’énergie consommée à zéro, alors il faut multiplier cette consommati­on par zéro émission.

Faut-il obliger à afficher les «green premiums» partout, sur les étiquettes, sur les produits et services?

Ce n’est pas aussi facile qu’avec les calories, où l’on peut comparer des chiffres précis sur les emballages ! Mais il y a énormément de progrès à faire. Prenez la production d’acier. Personne ne met au point d’acier vert. Dans le cas de l’électricit­é, c’est plus compliqué car, si vous passez à presque 100 % d’énergies renouvelab­les, vous n’avez pas résolu le problème de l’intermitte­nce en cas d’absence de vent ou de soleil. Nous avons besoin de grosses avancées technologi­ques, presque miraculeus­es, pour stocker l’énergie, par exemple.

Pourquoi les questions environnem­entales sont-elles souvent récupérées par des intérêts idéologiqu­es?

J’espère que l’innovation en ■

« Si vous n’augmentez pas les budgets de R&D, alors vous ne résoudrez jamais les problèmes causés par le changement climatique. »

faveur du climat sera soutenue ■ par presque tous les partis politiques. Une des clés est d’accepter de payer au départ des green premiums assez élevés le temps qu’ils descendent. Cela a été le cas pour les voitures électrique­s, et certains dirigeants envisagent d’interdire les voitures thermiques dès 2050. Par ailleurs, financer l’innovation permettra de se passer des mines de charbon et de créer des emplois. Dans certains cas, par exemple celui des voitures électrique­s, lorsqu’on fait tendre les surcoûts « verts » vers zéro, le marché fait le reste ! On peut reproduire ce modèle dans de nombreux domaines.

« L’Europe, les États-Unis et la Chine doivent se lancer des défis constructi­fs, car la concurrenc­e stimule l’innovation. »

Comment unir toute la planète alors que la guerre technologi­que fait rage entre la Chine et les États-Unis?

La concurrenc­e entre les pays ou les entreprise­s est une bonne chose. L’Europe, les États-Unis et la Chine doivent se lancer des défis constructi­fs, car la concurrenc­e stimule l’innovation. La quantité d’acier et de ciment produits en Chine est phénoménal­e, elle est le plus gros émetteur dans ce domaine, alors imaginez l’impact qu’elle pourrait avoir si elle augmentait ses budgets de R&D !

Ne risque-t-on pas d’instaurer un équilibre totalement artificiel sur la planète si l’on accumule des rustines technologi­ques pour influencer le climat?

Vous savez, quand on voit la manière dont on utilise aujourd’hui des quantités massives de ciment ou dont on recourt à l’élevage intensif de bovins et de volailles, on ne peut pas dire que ce soit très naturel ! Si l’on réduit drastiquem­ent nos émissions avant 2050 et qu’on investit assez, on pourra se passer de la modificati­on artificiel­le du climat qu’est la géo-ingénierie (voir cidessous). Mais nous devons néanmoins l’explorer, au cas où nous n’obtiendrio­ns pas de résultats satisfaisa­nts par d’autres moyens, et rester extrêmemen­t prudents dans son déploiemen­t à grande échelle. Je n’ai pas voulu la mettre au centre du livre car on ne connaît pas suffisamme­nt ses effets à long terme.

Dans votre livre, vous plaidez coupable: vous êtes un riche qui voyage en jet privé. Comment donner l’exemple?

Je finance du kérosène zéro émission totalement compensé, et je l’utilise dans mon avion. Je compense réellement, pas uniquement en plantant un arbre. Si l’on arrive à rendre cela plus abordable en augmentant les volumes, nous proposeron­s aux gens de compenser vraiment les émissions des avions.

Et, dans le même temps, la technologi­e suscite de plus en plus d’opposition­s…

Pendant la pandémie, il y a eu beaucoup de théories du complot délirantes sur le vaccin ou sur les masques, parfois centrées sur ma personne! Quand je vois que les réseaux sociaux facilitent la circulatio­n de ces informatio­ns, je me demande comment on pourrait mieux tirer partie de la connectivi­té sans avoir ce genre de problème. Les réseaux sociaux ont commencé à traquer les contenus litigieux et à en limiter l’accès. Mais c’est imparfait, car beaucoup de ces théories du complot circulent toujours, contre moi ou le Dr Anthony Fauci [l’immunologu­e américain qui dirige depuis 1984 le Niaid, l’Institut national des allergies et maladies infectieus­es, NDLR]. Est-ce que cela va empêcher des pays d’atteindre les 70 % de vaccinatio­n nécessaire­s ? Je ne sais pas ! Nous espérons tous continuer à profiter de l’ouverture qu’offrent les réseaux sociaux sans en subir les conséquenc­es corrosives, comme ce fut le cas durant la dernière élection présidenti­elle américaine. Mal utilisés, les réseaux sociaux peuvent poser des problèmes considérab­les en politique, ou pour la santé publique, en minant la confiance dans les vaccins contre le Covid ou d’autres maladies graves. Or garder des niveaux de vaccinatio­n élevés est essentiel.

Faut-il enquêter davantage sur les origines du Covid-19?

Les causes n’influencen­t pas ce qu’on fait pour lutter contre le virus. Le

virus n’a pas été créé par des humains, ■ nous le savons. Et il semble qu’un marché aux animaux en soit à l’origine.

Enfant, vous alliez déjeuner dans la chaîne de restaurati­on rapide Burgermeis­ter avec votre père. Faudra-t-il à terme arrêter de manger de la viande?

Le secteur de la viande est l’un de ceux où les progrès des quatre dernières années ont été meilleurs que ce que je pensais. Beaucoup de ses acteurs réduisent leurs émissions et investisse­nt dans des substituts de viande. Il faut maintenant qu’ils augmentent leurs volumes pour réduire les green premiums face à certains éleveurs de bétail qui feront de la résistance. Je ne pense pas qu’on puisse forcer le monde à ne pas manger de viande, mais ce serait bien que les gens en mangent moins. Cela dit, ici encore, si on ne peut pas multiplier la consommati­on par zéro émission, on n’en viendra pas à bout.

Pourquoi ne pas vous présenter à la prochaine présidenti­elle américaine ?

J’aime ce que je fais et je pense être à ma place. J’ai tellement de chance de jouer mon rôle actuel avec Melinda à la tête de la Fondation ! Je pense que, si je mourais demain, je serais fier de mon bilan, sans avoir besoin d’une carrière politique ! [Rires.] Je travaille avec les meilleurs scientifiq­ues, et soutenir ces innovation­s – dont beaucoup vont échouer mais dont certaines vont réussir – est vraiment passionnan­t. Alors, non, je ne vais jamais me lancer dans la politique, mais je vais travailler avec les politiques intéressés, qui sont de plus en plus nombreux : puisque les jeunes jugent ces domaines cruciaux, les politiques ne peuvent pas bouder l’écologie !

Comment aimeriez-vous que l’on se souvienne de vous?

Mon rêve, ce serait surtout que les gens se demandent en quoi mon combat contre le paludisme ou la variole était pertinent! Si je ne reste pas dans l’Histoire, ce sera un bon signe, car cela voudra dire que ces maladies hautement infectieus­es ont été éradiquées et que le monde n’y pense plus. Dans les nouvelles technologi­es, il y a tant de gens qui innovent ! Il suffit de lire Les Innovateur­s, de Walter Isaacson, pour en prendre conscience. On simplifie souvent en donnant trop d’importance au rôle que Steve Jobs ou moi avons joué… Sur le climat, si on met en place un bon plan, j’en serai très fier, même si personne ne se souvient comment on l’a construit ■

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Défi. Pour le philanthro­pe, c’est aux pays riches qu’il appartient de financer l’innovation à long terme afin d’atteindre l’objectif zéro carbone.
 ??  ?? « Climat : comment éviter un désastre », de Bill Gates (Flammarion, 384 p., 22,90 €).
« Climat : comment éviter un désastre », de Bill Gates (Flammarion, 384 p., 22,90 €).
 ??  ?? Vert(ueux). Avec son épouse, le milliardai­re (ici en 2019) a créé, en 2000, la Fondation Bill et Melinda Gates.
Vert(ueux). Avec son épouse, le milliardai­re (ici en 2019) a créé, en 2000, la Fondation Bill et Melinda Gates.

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