Au-delà de l’ENA, par Sébastien Le Fol
Emmanuel Macron ne supprimera pas l’École nationale d’administration. En revanche, il souhaite que davantage de jeunes d’origine modeste puissent accéder à cette institution, dont il est le fruit. Intention louable ! L’ENA est un symbole fort de la reproduction des élites dans notre pays. Aujourd’hui, un élève sur 100 compte un père ouvrier, contre cinq en 2006. Pour autant, la suppression de cette institution aurait-elle réglé, par un coup de baguette magique, tous nos maux ? Pour relancer l’ascenseur social dans notre pays, il aurait donc suffi de supprimer l’étage le plus élevé ? Que la haute fonction publique donne l’exemple en matière de diversité de recrutement est la moindre des choses. En revanche, on peut s’interroger sur le choix présidentiel d’insister autant sur la fonction publique dans sa nouvelle offensive contre l’inégalité des chances. L’horizon indépassable pour les jeunes Français serait-il de devenir haut fonctionnaire ? Sans rien enlever comme qualités aux énarques, on peut réussir dans la vie sans en passer par là. Le même Macron l’a répété : pour de nombreux jeunes Français, « il est plus facile de trouver un client qu’un employeur ».
Sur 14 millions de salariés en France
(en équivalent temps plein), 7 millions travaillent dans des PME et TPE. Les patrons de ces entreprises n’ont pas fait l’ENA. Tout est-il fait pour faciliter la vie de ces entrepreneurs ? Pas vraiment, si on prend le temps de les écouter. La liberté de création et d’innovation est trop entravée chez nous. Notre labyrinthe de normes et de règlements suscite de l’autocensure, bride les talents. Pour relancer l’ascenseur social, il faudrait aussi débureaucratiser et désétatiser la vie du pays.
« Les Français doivent savoir que l’avenir de l’emploi n’est plus dans la fonction publique, et que celui des entreprises n’est plus dans les subventions (…). L’essentiel de l’action est entre les mains des Français, qui devront vouloir le changement et partager une envie d’avenir… » pouvait-on lire en 2008 dans le rapport de la Commission pour la libération de la croissance française, présidée par Jacques Attali. Son rapporteur était un certain Emmanuel Macron. Au-delà de l’ENA, le ticket d’entrée dans la vie doit rester plus que valable
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