Les sanctions que choisissent les juges
d’Éliane Houlette, en présence de la garde des Sceaux, se fait dans une ambiance épouvantable. Falletti n’échange pas un mot avec Christiane Taubira. La confiance est rompue. L’anecdote a marqué un ministre : « Quelle faute politique ! On donnait l’impression d’une reprise en main du parquet au moment même où on affirmait son indépendance. »
Puis vint l’heure de la grande loterie judiciaire. Éliane Houlette s’installe, avec quelques autres magistrats, Patrice Amar, Monica d’Onofrio, Ariane Amson et Lovisa-Ulrika Delaunay-Weiss (lire p. 38), rue des Italiens dans le 9e arrondissement de Paris, dans les anciens locaux du Monde. Tout un symbole : Éliane Houlette, désormais magistrate la plus puissante de France, s’installe dans le bureau d’Hubert Beuve-Méry, fondateur du journal le plus influent du pays. La Direction des affaires criminelles et des grâces (DACG), au ministère, a d’ores et déjà pris le soin de préparer une liste d’une centaine d’affaires sensibles qui doivent arriver entre les mains d’Éliane Houlette. François Molins refuse de lâcher cinq dossiers – dont Cahuzac, Wildenstein, Wendel et Dassault –, forçant François Falletti à prendre des réquisitions écrites de transfert au PNF. C’est le temps des grandes affaires. La méthode est connue : une immense majorité des investigations (84 % des dossiers suivis par le Parquet financier, aujourd’hui) ont lieu dans le cadre d’une enquête préliminaire, connue de quelques procureurs et policiers, le plus souvent de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF). Les avocats n’ont accès au dossier qu’une fois l’enquête terminée ou bien avancée. La machine est lancée. Les peines de prison pour des faits d’atteinte à la probité augmentent, les amendes explosent.
Seule une infime partie des affaires sont confiées à des juges d’instruction indépendants, d’après une répartition opaque décidée selon le bon vouloir du président du tribunal de Paris. Pendant une décennie, une poignée de juges du pôle financier se sont ainsi partagé les informations judiciaires visant des hommes politiques de premier plan, qu’elles leur aient été envoyées par le PNF ou le parquet de
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