HERA CONTRE LE COVID ?
L’Europe lance l’incubateur HERA pour lutter contre les mutations du Covid-19. Stella Kyriakides, commissaire à la Santé et à la Sécurité alimentaire, précise: « L’incubateur HERA est un exercice de prospective, d’anticipation et de réaction solidaire. Il jettera des ponts entre la recherche, l’industrie et les autorités de réglementation afin d’accélérer les processus, de la détection des variants à l’approbation et à la production de vaccins. » On la remercie, mais on n’est pas rassurés : c’est quoi, ce nom choisi pour l’incubateur ? HERA est l’acronyme de Health Emergency Response Authority (« Autorité de réaction en cas d’urgence sanitaire »), mais c’est aussi le nom de la femme la plus jalouse de l’Olympe. Épouse de l’infidèle Zeus, elle consacre toute son énergie à éliminer ses rivales, et les enfants que celles-ci ont eus avec Zeus. Héraclès en sait quelque chose, dans le berceau duquel elle envoya deux gros serpents alors qu’il n’était âgé que de 10 mois. Pour la « réaction solidaire », on repassera. L’animal fétiche d’Héra est un paon : ça colle peu avec l’humilité qui sied à la recherche médicale et au travail en commun. Bref, ça s’annonce mal, et comme, dans l’Antiquité, le nom précède souvent le destin, on s’inquiète. Est-il trop tard pour en suggérer un autre ? HEBE, par exemple, qui pourrait être l’acronyme de Health Emergency Bureau of Empowerment, ou quelque chose du genre, et placerait surtout le projet sous de meilleurs auspices : Hébé, déesse de l’Aurore, est aussi celle de l’immortalité…
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« J’espère que cette industrie sera de plus en plus safe pour les femmes et que cette nouvelle génération de femmes saura s’imposer et renverser les codes qui ne sont pas toujours faciles pour elles. Merci beaucoup pour cette Victoire. » On l’aura compris, les femmes sont au coeur des préoccupations de Claire Pommet, alias Pomme, sacrée artiste féminine aux Victoires de la musique cette année. Quelques heures après avoir dénoncé le harcèlement sexuel et moral des jeunes filles dans l’industrie de la musique, c’est avec ces mots qu’elle a raflé le prix à Suzane et Aya Nakamura (pourtant l’artiste francophone la plus écoutée au monde). Cette édition, qui a aussi couronné la chanteuse engagée (et enragée) Yseult, était décidément aussi politique que mélodique. Arborant une mèche grise comme un signe de sa maturité précoce, Pomme milite de sa voix douce pour l’égalité des sexes, l’écologie, la cause LGBT +. Élevée dans une famille chrétienne très pratiquante, elle a appris le chant à l’église avant de croquer le fruit défendu et d’explorer ses péchés. Infidélité, rivalité, anxiété, maternité assistée, mortalité, fragilité… Dans ses chansons cathartiques et mélancoliques, elle explore ses failles dans les détails, accompagnée de sa autoharpe, de sa guitare ou de son pocket piano. Pudique et réservée quand elle n’est pas sur scène, ses instruments sont les premiers destinataires de ses confessions intimes. Fan de Leonard Cohen, elle s’est installée à Montréal, où son genre et son homosexualité seraient selon elle mieux respectés. Cette Victoire est une consécration pour la Lyonnaise de 24 ans, qui remportait déjà celle de l’« album révélation » en 2020, pour son deuxième opus, Les Failles, arrangé par Albin de la Simone. Le fruit mûrit
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Les Failles cachées (Polydor/Universal).
Le Covid a rempli les salles d’attente des cabinets de psy, et Fluide glacial l’a bien compris – tout comme Arte avec la série En thérapie – en réunissant les deux tomes d’Après la psy, le beau temps ? dans un bel album écrit par Théa Rojzman et illustré par Anne Rouquette. Leur héroïne, Émilie Geoly, 30 ans, institutrice mal dans sa peau, jalouse sa soeur – pharmacienne, mariée, trois enfants –, entretient des relations conflictuelles avec ses parents et partage la vie d’un grand bêta accro aux écrans. Malgré sa dépression, Émilie se révèle pétillante et déjantée. Surtout depuis qu’elle consulte la « méchante » Mme Soulac, que lui a recommandée son collègue, le « Pr Gougueul ». Une relation complexe, faite de détestation et de transfert, se tisse entre la grande et sèche lacanienne – qui aurait été la maîtresse de Mick Jagger – et la petite instit qui n’arrive pas à grandir. Pédago (Théa Rojzman chroniquait pour la revue Le Cercle psy), drôle et pas caricatural
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Après la psy, le beau temps ? Émilie voit quelqu’un, d’Anne Rouquette et Théa Rojzman (Fluide glacial, 215 p., 24,90 €).
à l’art de le confectionner. Plus que de la cuisine, c’est un mode de vie à part entière », confesse William Ledeuil, chef de Ze Kitchen Galerie, dans son ouvrage Bouillons, paru aux éditions de La Martinière. Une profession de foi partagée par Cathy Schein. « Toute la vérité est dans le bouillon. C’est mon karma, il m’est indispensable. Je le considère comme un bonus, un révélateur qui change diamétralement les choses dans la vie de tous les jours », s’enthousiasme la cheffe du restaurant vietnamien Phénix d’or, à Bordeaux. Il est devenu au passage synonyme de bien-être, dans une vogue hygiéniste qui est désormais l’un des plus forts modèles qui soient. On surfe sur ce courant qui a le vent en poupe. L’école de la limpidité et de la pureté fait recette. Le centre La Pensée sauvage, fondé en 2006, organise des séjours sur mesure autour du jeûne et des monodiètes comportant des bouillons de légumes. L’Atelier Nubio propose depuis fin 2019 sa cure « Bone Broth ». Cinq à dix jours d’un bouillon détox quotidien de 33 centilitres riche en collagène, à base d’os de poulet cuits à basse température, de curcuma, gingembre, carotte, oignon et poivre.
UNE ICÔNE VÉGANE, MAIS PAS QUE