Quand deux esprits libres refont de notre langue un objet de désir.
Textos, mails, WhatsApp et même cartes postales ou lettres, qu’elles soient d’amour ou de créance: même avant l’ère maudite du « distanciel », l’essentiel de nos communications se faisait par écrit. Et pourtant, « la plume se dessèche et nous ne savons plus quoi dire, comment le dire et comment l’écrire », observent Laure de Chantal et Xavier Mauduit dans Notre grammaire est sexy, leur déclaration d’amour à la langue française. Alors, pour nous la réapproprier, cette langue, « pour la prendre et l’apprendre », ils ont organisé une grande bacchanale. Pas seulement autour du triangle amoureux de la phrase, sujet-verbe-complément, mais avec bien d’autres invités – attributs du sujet, adjectifs, adverbes intrigants, subordonnées relatives… –, vus à travers le prisme du désir. Glissez en effet entre eux quelques liaisons (torrides) ou des points de suspension suggestifs (ces idéogrammes libertins du XVIIIe siècle qui disaient tant sans le dire…), et c’est l’orgie grammaticale qui commence.
Laure de Chantal est agrégée de lettres classiques et Xavier Mauduit agrégé et docteur en histoire. Dans leur petit essai docte et croquignolet, ils jouent les Madame Claude de la grammaire. Entre changements de genre, jeux et faux-semblants, chair des mots et « caresse des accents », ils mènent la danse rebelle et mystérieuse de cette coquine de grammaire qui comporte plus d’exceptions que de règles. Loin des mauvais souvenirs de CM2, ce livre est un strip-tease de notre langue qui, ainsi décorsetée, débarbouillée de ses smileys et autres émojis faciles et criards, nous (ré)apparaît d’une beauté renversante, sexy comme le fruit « mûr et sucré » d’une longue et fascinante histoire
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Notre grammaire est sexy, de Laure de Chantal et Xavier Mauduit (Stock, 288 p., 18 €).