Le Point

Reed Hastings : « Bill Gates m’a ouvert les yeux sur le nucléaire »

Netflix veut compenser sa production de CO2. Crédible ? Interview croisée de son cocréateur, Reed Hastings, et d’Emma Stewart, vice-présidente chargée de l’environnem­ent.

- PROPOS RECUEILLIS PAR GUILLAUME GRALLET

C’est un chiffre qui, en temps de confinemen­t, fait l’effet d’une petite bombe. D’après une étude réalisée pour Netflix par l’université de Bristol, lorsqu’on regarde une heure de film sur la plateforme de streaming, cela rejette l’équivalent de 100 grammes de C02 dans l’atmosphère, soit autant qu’un climatiseu­r de 1 000 watts pendant quarante minutes, ou une voiture à essence sur une distance de 400 mètres. Dans la foulée, la plateforme de Los Angeles a annoncé son objectif de devenir « net zéro carbone » en 2022 : cela signifie que d’ici la fin de l’année prochaine, elle s’engage à compenser l’intégralit­é des émissions de CO2 en offrant par exemple des sources de revenus alternativ­es aux braconnier­s des forêts arides du Kenya ou encore en aidant à la préservati­on de puits de carbone, comme la forêt canadienne de Darkwoods en Colombie-Britanniqu­e.

L’engagement de Netflix est-il crédible ? Dans ses calculs, le site de diffusion de vidéos assume de ne pas prendre en compte pour l’instant la pollution engendrée par les fournisseu­rs d’accès à Internet ou encore la constructi­on de téléviseur­s et de tablettes qui nous permettent de regarder les films, ce qui a été montré du doigt par des experts de l’environnem­ent, comme le polytechni­cien JeanMarc Jancovici. « Nous mettons gratuiteme­nt à dispositio­n notre réseau de 13 511 serveurs Open Connect pour diffuser nos programmes dans 142 pays au plus près des abonnés et alléger ainsi le réseau des fournisseu­rs d’accès », répond Emma Stewart, vice-présidente chargée de l’engagement environnem­ental de l’entreprise, passée par Oxford et Stanford.

Cette salutaire prise de conscience n’intervient-elle pas d’ailleurs un peu tard, alors que des acteurs du numérique comme Apple et Orange se sont fixé de tels objectifs il y a plusieurs années ? Le créateur de Netflix assure vouloir prendre le problème à bras-le-corps. S’exprimant en visioconfé­rence depuis sa maison de Los Gatos, un café à la main, Reed Hastings explique avoir consulté pas moins de 60 experts mondiaux, comme le spécialist­e suédois de la résilience Johan Rockström, ou encore la climatolog­ue canadienne Katharine Hayhoe de la Texas Tech University. Avec un double objectif : éveiller les conscience­s par le biais de documentai­res environnem­entaux et réinventer la manière de faire des films. « Nous voulons être une entreprise de taille mondiale qui ne fasse pas de mal à la planète », poursuit Emma Stewart. Interview croisée.

Reed Hastings, fondateur de Netflix

Le Point: Dans un rapport, vous expliquez que pour stabiliser le climat il est nécessaire d’agir maintenant. À quand remonte ce déclic? Reed Hastings:

Quand j’ai grandi dans les années 1970, le pétrole était adoré, et la seule crainte était de ne pas en avoir assez. Et puis, en 2016, j’ai

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