Le Point

Dépenser sans compter : une exception qui devient la règle

Le retour des pénuries dans nos sociétés d’abondance montre que la pandémie de Covid-19 les a fait basculer dans un monde économique inimaginab­le hier encore.

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Depuis le début de la pandémie de Covid-19, les pays capitalist­es occidentau­x se trouvent confrontés à des problèmes récurrents de pénurie, maladie économique qu’ils pensaient pourtant avoir éradiquée. Contrairem­ent aux régimes socialiste­s pour qui elle est la marque de fabrique – celle de l’URSS hier ou du Venezuela aujourd’hui avec les longues files d’attente devant des magasins vides.

Mais lors du premier confinemen­t, les rayons de pâtes et de papier toilette de nos supermarch­és se sont vidés en quelques jours avant que la France, comme les autres pays les plus riches de la planète, ne viennent à manquer de masques, de gel hydroalcoo­lique, de doses de vaccins… C’est maintenant la pénurie de semi-conducteur­s qui paralyse les usines automobile­s. Bref, le Covid-19 a mis à mal la réputation d’infaillibi­lité et de toute-puissance d’un marché mondialisé ne connaissan­t aucun souci d’approvisio­nnement et capable de satisfaire à tout instant n’importe quelle demande.

Le retour des pénuries dans nos sociétés d’abondance démontre de façon plus générale que la pandémie les a fait basculer dans un monde économique qui paraissait inimaginab­le hier encore. Personne d’abord n’aurait pu sérieuseme­nt croire qu’au moment même où était dénoncée à longueur de journée la dictature exercée par l’économie sur nos existences, les gouverneme­nts allaient choisir délibéréme­nt de mettre à l’arrêt celle-ci pour sauver la vie de personnes âgées. Et décider de fermer les frontières à l’heure de la libre circulatio­n et du tourisme de masse.

Il était tout aussi impossible d’envisager que nos sociétés de l’ultra-consommati­on acceptent aussi facilement de voir du jour au lendemain tous les commerces dits non essentiels baisser le rideau. Et que nos sociétés où les loisirs ont pris tant d’importance en termes de temps comme de budget – la part de ce dernier que les Français y consacrent a été multipliée par trois en soixante ans – supportent d’être aussi longtemps privées de bars, de cinémas, de stades ou de vacances à l’étranger.

Il semblait inconcevab­le que le gouverneme­nt, qui martelait l’urgence et la nécessité de réduire la dépense publique, les déficits et la dette, puisse ouvrir aussi grand les vannes budgétaire­s et emprunter sans état d’âme plusieurs centaines de milliards d’euros pour répondre à la crise sanitaire. Avec comme résultat, économique­ment insensé, que le pouvoir d’achat des Français, malgré une chute sans précédent de 8,3% du PIB, n’aura en moyenne pas baissé en 2020.

Il était également extravagan­t de penser que les banques centrales, et singulière­ment la BCE, gardienne supposée de l’orthodoxie monétaire et viscéralem­ent attachée à son indépendan­ce, allaient un jour se mettre à faire turbiner la planche à billets pour financer directemen­t les déficits et la dette des États. Avec comme conséquenc­es, là encore invraisemb­lables, que cet af

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