Le Point

« On voit trop peu de responsabl­es RSE dans les comités exécutifs »

L’entreprene­use et militante Flora Ghebali met en garde contre le « greenwashi­ng ».

- PROPOS RECUEILLIS PAR MICHEL REVOL

Vous écrivez que la jeune génération est sensible aux politiques de responsabi­lité sociale et environnem­entale mais qu’elle s’en méfie. Pourquoi? Flora Ghebali:

Notre génération n’est pas dupe de l’effet d’affichage, qui est souvent du greenwashi­ng [en marketing, procédé visant à se donner une image écologique responsabl­e, NDLR] ou du socialwash­ing. Les entreprise­s se sont intéressée­s à ce sujet au mauvais moment. Quand elles ont vu que l’environnem­ent allait être à la mode, leur service marketing a tout repeint en vert ! Mais peu après ont émergé des outils numériques qui ont permis le fact checking, la vérificati­on des informatio­ns. La défiance des jeunes s’est installée. Entre 2007 et 2009, la vague de greenwashi­ng aura une conséquenc­e nette : la confiance dans le discours des entreprise­s passe de 67 à 27 % !

Les entreprise­s ne sont-elles pas sincères?

Dans Green Swans, son livre sur la régénéresc­ence du capitalism­e, John Elkington décrit cinq étapes. D’abord, le déni et le rejet du changement climatique, puis l’ère symbolique où les entreprise­s font du greenwashi­ng, puis le travail en coalition avec des partenaire­s, puis la décroissan­ce, et enfin la régénéresc­ence. On est entre la première et la troisième phase. Certaines sociétés s’ouvrent, comme Total, qui recrute beaucoup de diplômés issus des écoles de production, ces structures qui remettent dans le circuit des jeunes éloignés de l’emploi. C’est mieux que d’investir des millions dans des campagnes de promotion pour recruter !

Flora Ghebali Fondatrice de l’agence d’innovation économique et sociale Coalitions* La RSE est-elle un argument pour attirer les jeunes diplômés?

Oui, encore faut-il qu’il s’agisse d’une vraie politique RSE, portée par des dirigeants dignes de cette mission. Certains patrons m’ont dit : « On a créé une fondation, c’est notre supplément d’âme ! » Mais cette générosité, d’essence chrétienne, n’a rien à voir avec le coeur du business. La RSE doit transforme­r une entreprise sur ses aspects sociaux et environnem­entaux pour obtenir un modèle rentable. Or trop souvent, le directeur RSE est un ex-DRH qu’on place là comme dans un placard, avec des rapports à rédiger. On marginalis­e le sujet. On voit trop peu de responsabl­es RSE dans les comités exécutifs des entreprise­s, comme BNP Paribas l’a fait

Et autrice de Ma génération va changer le monde (L’Aube, 216 p., 17 €).

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