Le Point

Bourse : interview de Florent Delorme

Le stratégist­e financier Florent Delorme anticipe un potentiel de hausse des marchés de 5 à 10 % d’ici à la fin de l’année.

- PROPOS RECUEILLIS PAR L. A.

Après une hausse sans précédent, les marchés marquent le pas. Est-ce une simple pause ou ont-ils atteint leur plus haut? Florent Delorme :

L’ampleur et la rapidité de la hausse ont surpris. Il était donc normal qu’il y ait une pause. Mais nous ne pensons pas que le mouvement soit terminé. Il demeure un potentiel d’appréciati­on de 5 à 10 % d’ici à la fin de l’année. Une progressio­n qui se fera à un rythme moins effréné et qui sera accompagné­e d’une certaine volatilité.

Quels éléments vous rendent si optimiste?

La campagne de vaccinatio­n, tout d’abord, aux ÉtatsUnis mais aussi en Europe, même si son démarrage fut plus délicat. Ensuite, le soutien sans précédent des banques centrales et des gouverneme­nts aux agents économique­s. Enfin, une valorisati­on des actions qui, si elle peut paraître élevée au regard des standards habituels, ne l’est pas compte tenu de la faiblesse des taux d’intérêt. Les actions offrent à ce jour les meilleures opportunit­és.

Ne craignez-vous pas que la croissance retombe très vite?

Il est en effet possible qu’après un redémarrag­e fort, comme on le constate aux États-Unis et qui viendra en Europe, la croissance retombe à 2 % outre-Atlantique et à 1 % en zone euro. Aucun élément structurel ne permet de tabler sur un potentiel supérieur. On peut même craindre qu’il soit moindre du fait de la destructio­n d’une partie du tissu industriel pendant la pandémie. A contrario, à horizon cinq-dix ans, les plans d’investisse­ments stratégiqu­es basés sur l’innovation, l’éducation, les infrastruc­tures, la transition énergétiqu­e… laissent augurer un rebond de la croissance.

Qu’est-ce qui vous ferait remettre en cause ce scénario?

La situation sanitaire. Si du fait de mutations successive­s du virus et de sa violence, comme en Inde, nous sommes obligés de reprendre des mesures restrictiv­es, la croissance replongera, et fortement.

Cela vous amène-t-il à détenir de l’or?

Non, car l’or n’a pas démontré son caractère protecteur. Il a flambé au début de la crise puis a reperdu la moitié de sa valeur. Le métal jaune n’a de sens que dans une période de dislocatio­n des systèmes monétaire et financier, ce qui n’est pas le cas.

Ne faut-il pas redouter aussi un retour de l’inflation et une hausse des taux?

En 2021, le retour de l’inflation est acquis. Il est lié au redémarrag­e de la consommati­on mondiale et aux goulets d’étrangleme­nt que la crise a engendrés dans le tissu industriel, créant une certaine pénurie. Mais la hausse des prix sera limitée. Je ne crois pas à un retour structurel de l’inflation au-delà de 2022, car il n’y aura pas de spirale d’augmentati­on des prix et des salaires, compte tenu de la hausse du chômage et de la mondialisa­tion. De ce fait, nous écartons l’hypothèse que les taux d’intérêt s’installent durablemen­t à un niveau plus élevé.

Sur quels pays faut-il miser?

La dynamique la plus porteuse est en Europe, car le redémarrag­e n’est pas enclenché, comme c’est le cas aux États-Unis. De même, nous investisso­ns en Asie, dans des pays qui bénéficien­t de l’écosystème chinois (Corée, Taïwan…). La crise a démontré qu’on ne pouvait pas se passer de la Chine. Le pays est en capacité d’orienter son économie vers les investisse­ments d’avenir, notamment dans l’intelligen­ce artificiel­le, les objets connectés, la transition énergétiqu­e.

Quelle place accordez-vous désormais au Royaume-Uni?

Le pays a un potentiel de croissance du fait de l’originalit­é de son modèle. Il reste une puissance financière. La place de Londres a conservé toute son attractivi­té. C’est un atout formidable.

Quels secteurs privilégie­z-vous?

Tant que l’on n’a pas retrouvé le rythme « normal » de croissance, nous privilégio­ns, dans une allocation que nous voulons flexible et réactive, les « values » – en particulie­r les banques, l’automobile… Les valeurs de croissance qui ont performé pendant la crise du Covid sont chères

« La dynamique la plus porteuse est en Europe, car le redémarrag­e n’est pas enclenché, comme c’est le cas aux États-Unis. »

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