Le Publicateur Libre

« Stop à l’hypocrisie »

- Propos recueillis par Valentin BIRET

Visée par des critiques dans les médias, et notamment dans nos colonnes à propos des fonds saoudiens reçus par la commune de Lonlay-l’Abbaye pour le réaménagem­ent de son ancien presbytère, la sénatrice de l’Orne, Nathalie Goulet veut « siffler la fin de la récréation » et dire « stop à l’hypocrisie ».

« Aucune contrepart­ie »

« Oui, c’est moi qui ai donné l’adresse au maire de Lonlay-l’Abbaye, assume-t-elle. Mais c’est bien le conseil municipal de Lonlay qui a monté le dossier, obtenu et accepté cette subvention ». Agacée, Nathalie Goulet dénonce une sorte d’hypocrisie. « Il faut arrêter cette espèce de morale. Ou alors on demande aux gens de jeter leur Iphone fabriqué en Chine et de ne plus mettre de carburant dans leur voiture ».

Nathalie Goulet l’assure : « Il n’y a aucune contrepart­ie à ces dons. L’Arabie saoudite et le Qatar font régulièrem­ent des dons au musée du Louvre, ils ne sont pas conditionn­és non plus. Lonlay-l’Abbaye ne va pas devenir pour autant Lonlay-la-Mosquée et il n’y aura pas d’invasion de femmes en niqab à Lonlay ! »

Soft diplomatie

Si l’élue ornaise comprend que les gens puissent se poser des questions sur le caractère atypique de cette subvention, elle pense « qu’un amalgame est fait du côté de Lonlay. Nous ne sommes pas seuls au monde : nous sommes dans un monde globalisé et face à des sommes colossales. Ce n’est pas l’argent qui domine le monde, ni la morale, mais plutôt un mélange des deux ». La sénatrice Goulet, qui prône la soft diplomatie, rappelle que « la France fait 15 ou 20 milliards de chiffre d’affaires avec l’Arabie saoudite, Nicolas Sarkozy est récemment parti voir le roi d’Arabie saoudite à Tanger, et le député PS Joaquim Pueyo préside le groupe d’amitié France-Emirats Arabes Unis à l’assemblée nationale ».

« Toutes les questions sont légitimes »

Pour la sénatrice de l’Orne, « toutes les questions sont légitimes, mais j’encourage les gens à regarder les efforts effectués par ces pays qui sont, je n’ai pas peur de le dire, moyenâgeux. J’ai un discours très clair avec eux, je parle charia, peine de mort et je rencontre des femmes saoudienne­s régulièrem­ent, qui sont très investies dans les affaires commercial­es ».

« Divers commentair­es, dont celui du premier magistrat de Lonlay, notamment parus dans le Publicateu­r, concernant les fonds saoudiens donnés à la commune entretienn­ent étonnammen­t une certaine confusion entre commerce et donation… Pourtant la similitude m’avait échappé… », amorce Didier Boisbluche dans un courrier adressé à notre rédaction.

« En effet si, comme certains le font remarquer, nous ne commercion­s qu’avec des personnes, entreprise­s ou états irréprocha­bles, cela serait singulière­ment compliqué de vendre ou d’acheter… Mais, en la circonstan­ce, il ne s’agit pas de cela… Quand nous commerçons avec un tiers, nous n’avons aucune autre obligation morale que celle de respecter le contrat passé. Ainsi lorsque j’achète un produit chinois (il arrive que parfois je n’ai point d’autres choix), cela ne signifie aucunement que je cautionne le régime politique.

A contrario, il me semble que lorsque nous acceptons un don, d’une personne physique ou morale, un certain lien de reconnaiss­ance s’instaure de fait entre le donataire et le donateur. Il m’étonnerait fort, d’ailleurs, que nombre de commentate­urs ne fassent aucunement attention au profil des bénéficiai­res des dons que leur générosité les incite à effectuer… Et dont ils attendent sans doute un minimum de gratitude… »

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