Sa victoire sur le tabac
Dans le cadre du « Mois sans tabac », Jean-Baptiste Langlois, 43 ans, a accepté de témoigner. Responsable du cinéma Gérard-Philipe depuis 1998, cet ancien fumeur retrace le film de son parcours.
A quel âge avez-vous commencé à fumer ?
C’était à ma communion. J’avais 11 ans. J’habitais en Seine-Maritime. Ce jour-là, à la fin du repas, on a fait tourner une assiette remplie de cigarettes. C’était une tradition à cette époque d’en distribuer à la famille, aux amis, en signe de fraternité et de partage. Mon premier paquet, c’était à 15 ans, quand j’étais encore au collège. J’ai demandé l’argent à ma mère et elle me l’a donné. C’était 10 francs je crois : des blondes avec filtres. J’ai toujours pris la même marque.
Pourquoi avez-vous franchi le pas ?
Déjà, il faut dire que j’étais entouré de fumeurs, et notamment mon père, mon grand-père. Je pense qu’au départ, c’était par curiosité, pour faire comme les autres. Mais, au début, je fumais entre une et quatre cigarettes par jour, en allant et en revenant du collège. Ensuite, quand j’ai fait mon apprentissage comme paysagiste, je travaillais donc essentiellement en extérieur. C’est plus facile d’en griller une pendant les pauses. Petit à petit, je suis arrivé à un paquet par jour, mais c’était encore un petit budget. On peut dire que je suis devenu un gros fumeur à 16-17 ans, et cela ne s’est pas arrangé quand j’ai fait mon armée. C’était en 1991. Il n’y avait pas de restriction et on pouvait donc fumer dans l’enceinte de la caserne.
Quand et pourquoi avezvous décidé d’arrêter ?
Ce ne sont pas des raisons de santé qui m’ont fait arrêter, mais plutôt l’aspect financier. Cela faisait 20 ans que je fumais et j’en étais arrivé à deux paquets par jour, avec un prix du tabac en hausse continue. J’avais fait le calcul : mon budget cigarettes était d’environ 2 300 € par an. Comme je voulais acheter une maison, il a fallu que je fasse un choix.
Stopper a-t-il été facile ?
En fait, je ne voulais pas stopper d’un coup, mais plutôt progressivement en 6, 8 ou 10 mois. Je suis allé voir un médecin tabacologue à l’hôpital de Flers. Il m’a prescrit des patchs. Je suis redescendu à 9 à 10 cigarettes par jour. Mais, j’ai fait une allergie aux patchs et c’est là que j’ai décidé d’arrêter de fumer : c’était un jeudi il y a 7-8 ans. Je m’en souviens car, ce jour-là, un ami qui ne travaillait pas le jeudi m’a invité à un barbecue. Il m’a demandé de lui ramener des petits cigares de chez le buraliste, et je n’ai pas acheté de paquet pour moi. C’était fini. Une fois seulement, j’ai testé une vapoteuse, mais je n’ai pas aimé.
Quelles conséquences ?
Financièrement, j’ai pu acheter une maison. Au départ, on ne voit pas que l’on fait des économies, mais c’est au bout de plusieurs mois. En revanche, en peu de temps, j’ai pris 20 kg à force de grignoter. Car, quand on est gros fumeur, le geste de fumer est tout le temps là et on le compense avec la nourriture. Grâce à mes économies, j’ai pu peu à peu changer mon mode d’alimentation en mangeant sainement. Aujourd’hui, je ne grignote plus. Le stress que j’avais, je le pallie autrement.
Quel ancien fumeur êtesvous ? Que pensez-vous de l’action de l’Etat au sujet du tabac ?
Chez moi, les gens que je reçois peuvent fumer, en revanche, je ne supporte plus la fumée dans la voiture. Pour ce qui est de la législation, je trouve très bien d’avoir interdit la cigarette dans les lieux publics comme les bars, les discothèques, en revanche l’interdire, pour tout ce qui est extérieur, notamment les terrasses, les quais de gare, il ne faut pas exagérer. Quant aux campagnes anti-tabac, je trouve qu’on n’insiste pas assez sur l’aspect financier. Les photos chocs, les paquets neutres, je ne crois pas à leur efficacité. On devrait plutôt mettre comme message : si vous avez le cancer, voilà ce que cela va vous coûter. Ou alors : prenez une assurance si vous tombez malade par la cigarette. Le fait de toucher au porte-monnaie aura plus d’effets.