10 milliards à nourrir
Organisé dans le cadre du 10e Festival Alimenterre, le ciné-débat du jeudi 17 novembre, a réuni 80 spectateurs.
C’est pour répondre à une question cruciale que les organisateurs ont réuni plusieurs intervenants : Annie Berger, de l’association Horizon Solidaire de Caen ; Aline Davy, du CFTA fertois ; et Pierre Gatebois, volontaire d’Horizon Solidaire. La question est en fait le titre d’un film : « 10 billions, what’s on your plate ? », traduisez : « 10 milliards, que mangeronsnous demain ? ». Les 10 milliards sont bien entendu les bouches à nourrir de la population planétaire dans un avenir proche.
Revoir la copie
Le débat qui a suivi la projection du film réalisé par le journaliste allemand, Valentin Thurn, a permis d’orienter commentaires et réflexions autour de trois questions : les nouvelles technologies sont-elles fiables pour nourrir la planète ? Faut-il repenser nos modes alimentaires occidentaux pour délaisser la viande au profit d’insectes, par exemple ? Comment nourrir suffisamment et correctement les 10 milliards d’humains que nous seront bientôt ? Le film a montré des Asiatiques friands d’insectes grillés (sauterelles, asticots et autres cafards), et qu’il est courant, en Thailande, de trouver des échoppes de ces denrées. Il a aussi mis l’accent sur le fait qu’en occident, les surfaces arables diminuent comme peau de chagrin et que les réserves d’eau nécessaires pour l’agriculture intensive en font tout autant. La soirée a démontré que les marchés alimentaires industriels ne sont pas adaptés à l’évolution démographique, dans une analyse du système alimentaire mondial. Dans la démarche actuelle du « manger autrement » , il convient de revoir notre copie au sujet du mode alimentaire occidental. Le Festival Alimenterre a donné lieu à une rencontre à la médiathèque, samedi 19 novembre, entre un producteur local, des particuliers et des représentants des deux AMAP* locales.
Le public, privilégiant déjà, ou tenté par la consommation en circuit court, a rencontré Noëlle Poirier, membre de l’AMAP StJean, et Michel Letinturier de l’AMAP des Andaines. Ces derniers ont présenté le rôle de ces organisations, qui ne sont pas toujours des associations mais surtout des regroupements de personnes privilégiant un mode de consommation incluant des produits de qualité achetés en circuits courts.
Une AMAP s’appuie sur un contrat moral entre les producteurs locaux et les « amapiens » qui acceptent le principe d’une économie solidaire et du commerce équitable permettant aux producteurs de vivre dignement de leur travail. passage, qui sont stockés en chambres froides et perdent une grande partie de leur valeur nutritive tout en voyant leur valeur sur l’étale s’élever, et parfois plus, que chez un producteur de proximité, pour une qualité jugée plus médiocre » ont observé les intervenants.
Un lien direct
Bruno Liehn, producteur de pommes de Lignières Orgères, a témoigné sur les avantages et les plaisirs qu’il rencontre à vendre ses produits localement. « De vraies rencontres humaines, des bonnes relations avec des consommateurs qui s’impliquent dans un environnement économique, écologique et social, qui sont satisfaits et dont les actions se pérennisent. 50 % de mon chiffre d’affaire est réalisé grâce à ce mode de vente directe. Je ne veux pas passer par les grossistes ». Si, dans les AMAP fertoises, le choix a été fait de ne pas dépasser une trentaine de membres pour conserver un esprit convivial, Bruno Liehn fait commerce, notamment à Mayenne, avec des AMAP intégrant plusieurs centaines de consommateurs.
Partenaire du CCFD (Comité catholique contre la faim et pour le développement), un paysan guatémaltèque est venu voir comment les paysans et les consommateurs de France se comportaient pour maintenir ou tenter de maintenir une agriculture saine et un commerce qui soit équitable autant pour les acheteurs que pour les producteurs. Il a témoigné des difficultés énormes auxquels les paysans sont confrontés au Guatémala, notamment avec la mainmise du gouvernement sur les terres cultivables qu’il vend ou loue à des grandes firmes agroalimentaires pour la production massive de palmes et autres végétaux considérés comme nocifs pour la planète. « Sur place, les habitants luttent en permanence contre le gouvernement et ces grands trusts comme Monsanto Compagny qui privilégient et développent l’utilisation des produits phytosanitaires » a-t-il rapporté. Grâce à de nombreuses actions, lui-même et d’autres paysans ont pu récupérer leurs biens. Il a encouragé les « amapiens » à continuer et développer leur mode de consommations qu’il a jugé « respectueuse des hommes et de leur travail, de la santé de chacun et celle de la planète ».
*AMAP : Association pour le maintien d’une agriculture paysanne.