Escroquerie et abus de faiblesse : 7 commerciaux jugés
Des ex-salariés de la Société Huit-Clos comparaissent depuis lundi devant le tribunal correctionnel d’Argentan. Ils doivent répondre de faits d’escroquerie, pratiques commerciales trompeuses ou encore abus de faiblesse.
Tribunal d’Argentan. Dans cette affaire, 27 victimes se sont portées parties civiles, pour des faits qui ont été commis dans l’Orne et le Calvados entre octobre 2007 et novembre 2013, date de la liquidation de la société. Le procès durait trois jours.
Lundi, à l’ouverture de l’audience, l’identité, les préventions et les éléments de personnalité des sept prévenus ont tout d’abord été évoqués puis, le cadre et l’organisation de Huis Clos, société spécialisée dans les menuiseries PVC sur mesure et rénovation de l’habitation, pour laquelle travaillaient les mis en cause.
Lors de ce procès qui devait durer jusqu’à mercredi, les prévenus, âgés de 25 à 38 ans, devaient répondre des faits qui leur sont reprochés lors de l’étude des dossiers de 27 victimes qui se sont portées parties civiles.
Rachats de crédits
Elles estiment avoir été escroquées, dupées par les pratiques commerciales trompeuses dont les commerciaux ont usé dans le cadre de démarchages à domicile. Les ex-salariés dépendant d’une agence basée à Argentan avaient vendu des fenêtres, volets, pompes à chaleur et autres produits de la société en leur faisant contracter des emprunts auprès d’organismes de crédit tels que Sofinco.
Ils sont également poursuivis pour escroquerie en usant de manoeuvres de rachats de crédits pour pousser les victimes à conclure des contrats pour financer de nouveaux travaux. Parmi les prévenus : l’ancienne responsable de l’agence, les vendeurs et un coutier en financement spécialisé notamment dans le rachat de crédit.
Abus de faiblesse
L’enquête a débuté en 2013 suite à la plainte d’un client âgé de 65 ans au moment des faits. Entre 2009 et 2010, il a été démarché à plusieurs reprises par des vendeurs de la société Huis Clos. Il avait acheté du matériel de menuiserie (fenêtres, volets, porte d’entrée), une pompe à chaleur, un ballon thermodynamique… à l’issue de ces démarchages à domicile. Quatre ventes ont été conclues au total, les sommes sont exorbitantes. L’homme en situation d’illettrisme, pour avoir arrêté l’école au CM1, ne sait pas lire ni écrire et maîtrise mal l’euro. Par le nombre et la durée des visites, la pratique commerciale trompeuse était mise en avant, ainsi que des faits d’escroquerie, pour avoir notamment omis de mentionner les charges lors de demandes de prêt. Les prévenus concernés sont également poursuivis pour abus de faiblesse en raison de son illettrisme.
« Tout le monde fermait les yeux sur tout »
« L’instruction se faisant directement à l’audience », a précisé Catherine Courteille, présidente du tribunal, les 27 dossiers des victimes ont été examinés, un par un, lors des deux premiers jours. Les pratiques commerciales abusives notamment vis-à-vis de personnes âgées ressortent des dossiers. Les personnes âgées sont des victimes privilégiées car plus faciles à convaincre. Elles ont contracté des prêts pour des achats de matériels inadaptés parfois. Des rachats de crédits ont été mis en place, certains ont hypothéqué leur maison…
Les prévenus ont été entendus sur les faits. L’ex responsable de l’agence d’Argentan, principale intéressée dans l’affaire, a expliqué qu’elle était animatrice. « J’étais juste là pour encadrer l’équipe commerciale ». S’agissant des faits reprochés, elle se défend d’avoir trompé, abusé, escroqué les victimes. L’ancienne dirigeante se dit en colère contre la Société Huis Clos. Elle dénonce leurs pratiques, « tout le monde fermait les yeux sur tout » mais n’a reconnu à aucun moment avoir abusé de la crédulité des acquéreurs. « J’aurais dû partir plus tôt de cette société ».
« On avait des objectifs à atteindre »
Quant aux vendeurs, ils s’accordent à dire qu’ils n’ont pas non plus escroqué les victimes. Pour eux, les ventes correspondaient aux demandes et besoins des clients. À la base, les commerciaux ont des profils différents, ils ne sont pas forcément issus du domaine de la vente. Ils expliquent qu’ils commencent par une période d’essai durant laquelle « on doit réaliser un certain chiffre pour accéder à la formation ».
Ils débutent en tant que VRP exclusif avec un fixe (correspondant à leurs frais de déplacement, carburant, assurance…) et des commissions basées sur les ventes réalisées puis ils sont envoyés en formation. « On avait des objectifs à atteindre ». Ils étaient commissionnés lorsqu’ils placent un crédit et sur leur chiffre d’affaires, les vendeurs touchaient également des primes.
Durant le dernier jour d’audience, le tribunal devait entendre les plaidoiries des parties civiles puis les réquisitions du procureur de la République et enfin les plaidoiries de la défense. Les prévenus encourent des peines de prison et des peines d’amende. La décision pourrait être mise en délibéré à l’issue de l’audience.