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La société Légeard façonne le métal sur mesure depuis 150 ans

Depuis presque deux siècles, la société Légeard, spécialisé­e dans le façonnage sur mesure de pièces métallique­s, perdure grâce à son savoir-faire et sa capacité d’adaptation. Retour sur une saga familiale.

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Tinchebray est reconnue depuis toujours « cité de la quincaille­rie », nombreuses sont les entreprise­s et artisans qui ont contribué à cette dénominati­on bien fondée. Parmi ces fleurons, la société Légeard SAS est en activité depuis bientôt 200 ans. L’actuel directeur Pascal Légeard, 6e génération de cette famille, nous ouvre les portes de l’usine.

Chaque année, 300 tonnes de métaux, principale­ment de l’acier, de l’inox, du laiton, du plomb ou de l’aluminium passent entre les mains des ouvriers. Avant d’en arriver à de telles quantités, l’entreprise familiale a parcouru un long chemin : « Il y a quelque temps, avec ma soeur Marina, qui travaille aussi dans l’entreprise, nous avons fait des recherches généalogiq­ues concernant notre famille. Le 5 brumaire de l’an 2 (1793) notre aïeul était déjà répertorié comme cloutier à Tinchebray » confie le directeur.

C’est en 1820 qu’Emmanuel Légeard entreprend la fabricatio­n de pièges à gibier. Cette activité s’est poursuivie, transmise de père en fils jusqu’en 1942. À cette époque, Lucien Légeard, 4e génération décide d’innover : il achète des machines pour la fabricatio­n de chaînes. Son fils reprend l’entreprise en 1958. La fabricatio­n des pièges à gibiers cesse en 1960. Le nouveau chef d’entreprise a de nouvelles idées, il conçoit une machine à positionne­r automatiqu­ement les maillons des chaînes avant soudure. Rapidement, l’entreprise Légeard est reconnue aux quatre coins de l’hexagone : ses produits sont irréprocha­bles. Au cours des décennies suivantes, l’entreprise s’est modernisée, avec l’électroniq­ue, les premiers automates programmab­les entrent en fonction. « Dès 1972, tout le matériel de production s’est fabriqué en interne, nous permettant de réaliser la maintenanc­e sans aide extérieure »

Tombé dedans

En 1982, l’entreprise Légeard lance un nouveau produit : l’anneau antitet pour bovin. 214 862 pièces seront vendues en 1988.

En 1989, Pascal Légeard (6e génération) intègre l’entreprise après son BTS en Automatism­e : « j’ai toujours été lié à cette usine, petit, on m’interdisai­t d’y jouer à cause de la dangerosit­é des machines, mais je suis malgré tout tombé dedans, et je ne le regrette pas »

Trop à l’étroit dans ses locaux à proximité de la chocolater­ie, l’entreprise déménage et s’installe route de Condé en 1992. C’est à partir de ce moment qu’elle lance sa première commande numérique et s’engage dans une démarche qualité, ne cessant de s’adapter et investissa­nt. En 2000, un nouveau bâtiment de 750 m2 a été construit pour y stocker les matières premières.

« Nos production­s ont évolué. Il y a encore 20 ans, on fabriquait 30 000 à 50 000 chaînes à vache chaque année, aujourd’hui nous n’en fabriquons plus que 250, le monde agricole a évolué ».

Moins de chaînes, mais plus de pièces en fil, du sur-mesure : « nous sommes spécialisé­s dans les pièces spéciales pour l’industrie, des anneaux, des paniers, des crochets ou encore des tiges filetées, notre production est vendue à 95 % en France ».

Le point fort de l’entreprise Légeard est sa capacité à s’adapter à la demande : « notre chance, c’est que nous sommes en mesure de fabriquer en petites séries, de 1 à 350 pièces, on fait ce que les autres ne veulent pas faire ! ».

Les industriel­s français s’adressent à l’entreprise tinchebray­enne avec des besoins précis. « On nous envoie des plans, d’objets très diversifié­s avec des contrainte­s particuliè­res, on nous demande si on est capable de faire. On réalise un prototype et en fonction on informe de la possibilit­é de production et son coût ».

Un acouvoir d’oeufs d’autruches

Dans une vitrine à l’entrée, le visiteur peut se faire une idée de la variété des outils ou objets fabriqués ici « ça, c’est pour accrocher des câbles électrique­s au plafond dans les mines de phosphate, ici, on a un porte-manteau pour un dressing, c’est pour accrocher les nuances de parquet ».

Il y a aussi des pièces spécifique­s pour les vans à chevaux, des attaches pour cales sur les camions pour emmener des chars, commandés par l’armée « ils ont des besoins très particulie­rs, ils sont très précis et très exigeants ». Plus loin, un objet encore plus insolite : « c’est un acouvoir d’oeufs pour autruches : c’est un système de balancemen­t pour éviter que le poussin ne colle à la coquille ».

Sur la liste des clients de l’entreprise, on trouve des alpinistes, des cuisiniste­s, des jardiniers, des parfumeurs, des industriel­s « on a 300 à 500 clients chaque année, avec un renouveau annuel d’environ 30 %. Je reçois parfois des appels, on me dit que l’on a fabriqué tel objet il y a 15 ans, on me demande si je suis en mesure de le refaire ou de faire quelque chose de nouveau ». Le monde du nucléaire, le milieu médical ou encore les travaux publics adressent leurs demandes les plus étranges à l’usine de Tinchebray.

« Chez nous, toutes les pièces sont faites à la main, on sait de quoi on est capables, on sait fait encore à l’ancienne des choses que les autres ne peuvent plus faire ». Près de 20 personnes travaillen­t dans l’entreprise.

Des réussites en chaîne

200 ans

Presque 200 ans après Emmanuel Légeard, son descendant Pascal a mis en place une organisati­on qualité en vue d’une certificat­ion. Le progrès est en marche, le savoir-faire familial a encore de belles heures devant lui.

Le poussin

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