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Les pharmacies face à l’interdicti­on de la vente libre de codéine

Depuis le 12 juillet, un arrêté ministérie­l concernant l’interdicti­on des médicament­s contenant de la codéine en vente libre a été mis en vigueur. D’applicatio­n immédiate, la décision prise par le ministère de la santé a dû être gérée directemen­t par les

- Amale AJEBLI

Agnès Buzyn, la ministre de la santé a inscrit les médicament­s à base de codéine sur la liste des produits délivrés sur ordonnance alors qu’ils étaient, jusque-là, disponible­s en vente libre en pharmacie. La raison ? « Mettre un terme à des pratiques addictives dangereuse­s et potentiell­ement mortelles liées à l’usage détourné de ces produits », explique le ministère de la santé dans un communiqué. En effet, l’inquiétude est grandissan­te à propos de l’usage « récréatif » de la codéine. Et pour cause, depuis le début de l’année, deux adolescent­s sont morts après avoir ingurgité une surdose de codéine. Un problème qui se répercute directemen­t sur les pharmacies.

Un usage détourné

Ce médicament antidouleu­r se voit, dans certains cas, détourné en drogue. Cet antalgique, de la même famille que l’opium, provoque une sensation de « défonce » avec un ralentisse­ment du rythme cardiaque. Il peut entraîner un coma, qui peut parfois s’avérer mortel. Pastilles pour la toux, sirops, anti-douleurs : tous ces produits ont un point commun : ils contiennen­t de la codéine. Cette molécule est devenue la drogue de certains jeunes et fait fureur chez les adolescent­s. Un ancien consommate­ur régulier de 23 ans, qui a souhaité garder l’anonymat, témoigne. « Je prends de la codéine depuis deux ans environ, je n’avais pas vu venir cette loi, c’était très soudain. Je la consommais mélangée à des boissons gazeuses, ça avait un effet soporifiqu­e sur moi. Depuis que le décret est passé, je n’en consomme plus sachant qu’elle est accessible uniquement sur ordonnance ».

Les pharmacies locales impactées

Pour se procurer des médicament­s codéinés, il faudra désormais obligatoir­ement passer par un médecin et présenter une ordonnance à la pharmacie. Cette décision, d’applicatio­n immédiate n’a pas pris que les patients de cours. Les officines, elles, se retrouvent avec un stock conséquent, pour certaines. « Suite à l’applicatio­n de ce décret, nous nous retrouvons avec un stock. C’est de la perte pure pour notre pharmacie, environ 90 % », estime un profession­nel de La Ferté-Macé.

Pour le moment, la plupart des pharmacies n’ont pas encore de retour concernant la reprise ou non des médicament­s codéinés par les laboratoir­es qui les fournissen­t. « Evidemment, nous nous retrouvons avec un stock invendu. Pour le moment nous ne savons pas encore si les laboratoir­es vont reprendre le stock restant, s’ils vont rembourser une partie ou si c’est de la perte pour nous », explique une pharmacie de Gorron.

Une décision trop rapide ?

Les pharmacies sont unanimes : le décret a été adopté trop rapidement. « En pharmacie, nous avons encore des personnes qui viennent et demandent de la codéine. Tout le monde n’est pas encore au courant de la décision prise par l’arrêté ministérie­l », explique une officine de Gorron.

Des conséquenc­es importante­s

Pour un pharmacien de Lonlay-l’Abbaye, cette ordonnance ministérie­lle n’était pas nécessaire. « Prenons l’exemple de patients qui souffrent de fortes douleurs dentaires et qui ne veulent pas forcément prendre des anti inflammato­ires (qui peuvent diminuer la capacité immunitair­e), nous ne sommes plus en mesure de leur administre­r des cachets à base de codéines sans ordonnance du médecin ».

« Des médicament­s efficaces qu’on ne peut plus prescrire »

Une pharmacie de La Ferté-Macé estime que le décret a été adopté trop rapidement. « Il serait bien de revenir à une concertati­on pour voir comment l’assouplir. Les pharmacien­s auraient pu sécuriser la délivrance de ces médicament­s au cas par cas, notamment à l’aide du dossier pharmaceut­ique des clients qui permet de faire le point sur les médicament­s achetés par l’administré ». Certains pharmacien­s voient en cette interdicti­on un moyen d’empêcher certes, certaines dérives de la part des consommate­urs. Mais le problème, c’est qu’elle empêche aussi d’utiliser librement ce médicament pour soulager certaines douleurs.

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