Le Publicateur Libre

Ces bâtiments disparus

Sous-préfecture, abattoirs, gendarmeri­e à cheval ou ferme école : les bâtiments disparus témoignent de l’activité et du passé d’une ville. Certains ont été réaffectés, d’autres démolis. Plongée dans le Domfront d’antan.

- Valentin BIRET

Qui se souvient aujourd’hui que Domfront possédait une sous-préfecture, une prison ou des abattoirs ? Bombardés, détruits, ou simplement réutilisés autrement : que sont devenus ces bâtiments ? Que disent-ils du passé de Domfront ? Explicatio­ns avec Bernard Desgrippes, passionné d’histoire locale, qui nous ouvre sa collection de cartes postales.

Ces bâtiments disparus

Commençons par l’ancienne sous-préfecture, témoin du glorieux passé de Domfront. Construit en 1830 rue Clemenceau, ce joli bâtiment bourgeois a été supprimé en septembre 1926. Il a été édifié tout près de l’ancienne gendarmeri­e à cheval, elle-même bâtie en 1828. En 1902, la structure ne comptait que quatre gendarmes. Détruite dans les années 1970-1980, la gendarmeri­e à cheval a laissé place à des bâtiments plus récents permettant d’accueillir les militaires dans de meilleures conditions. « À cette époque, il fallait faire du neuf à tout va : pas question de rénover ! La sous-préfecture et la gendarmeri­e à cheval n’ont pas échappé à cette folie destructri­ce », commente Bernard Desgrippes.

Même destin pour la caserne militaire Laharpe, imposant bâtiment sur 5 niveaux à l’arrière et 4 sur l’avant. Construite en 1877, elle fut abandonnée en 1945, vendue en 1976 et détruite vers 1980.

La prison de Domfront

Domfront a également eu sa prison, ou plutôt sa maison d’arrêt. Construit en 1827 dans l’actuelle impasse de la Juvinière, le bâtiment « hébergeait » des délinquant­s de droit commun, hommes et femmes, séparés par un mur au niveau de la cour. Fermée en 1953, la maison d’arrêt a été démolie en 1960.

Détour par le château de Domfront, pour une anecdote qui semble aujourd’hui parfaiteme­nt incongrue. « La première maison du gardien du château était construite directemen­t sur la tour de la porte d’entrée du château, dont il ne restait que les arases ! », s’étrangle le Domfrontai­s. De quoi faire bondir archéologu­es et passionnés d’histoire. Fort heureuseme­nt, la petite maison a été déplacée depuis.

Les abattoirs abattus

Détruits eux aussi, les abattoirs de Domfront, où les bouchers venaient eux-mêmes abattre leurs bestiaux. Ils se situaient rue du Colombier (ancienneme­nt rue des Abattoirs). L’ensemble de bâtiments a été abattu pour construire en lieu et place des maisons d’habitation.

Disparue également, l’ancienne caserne des pompiers, qui était située au pied du château, face à l’actuel office de tourisme.

Bâtiments reconstrui­ts

A Domfront, comme dans de nombreuses villes de Normandie, la seconde guerre mondiale et ses bombardeme­nts aériens ont fait des ravages. C’est le cas de la gare de Domfront, et du bâtiment attenant, le « Buffet de la gare ».

Face à l’actuel Hôtel de France, la gare de Domfront voyait transiter son lot de voyageurs, depuis l’arrivée du chemin de fer en 1874. Bifurcatio­n de la ligne Alençon Domfront, la gare relia Domfront à Flers et Domfront à Mayenne dès 1874. Taxis de l’époque, des calèches attendaien­t devant la gare pour monter les visiteurs en ville. Sur l’image (3), on aperçoit un grand réservoir d’eau, qui permettait d’alimenter les machines à vapeur.

L’ancienne église Saint-Julien

Bombardé puis reconstrui­t, l’Hôtel du Donjon état une des institutio­ns de Domfront. Érigé dans le Grand carrefour, l’ex Hôtel du Commerce a été reconstrui­t à l’angle de la rue des Fossés Plisson et de la rue de la République. Le bâtiment abrite aujourd’hui la Banque populaire de l’Ouest.

Également reconstrui­te, l’actuelle église Saint-Julien n’a pas toujours eu l’aspect qu’on lui connaît. Jugée trop petite, « indigne d’une sous-préfecture et pas assez entretenue », l’ancienne église, qui répondait également au nom de Saint-Julien, « a été construite avec des pierres de l’ancienne tour Sud de la porte de la Poterne, entre 1744 et 1748 », indique Bernard Desgrippes. Abattue en 1924, elle a été remplacée par l’actuelle église Saint Julien, première église de France construite en béton armé, sans pilier à l’intérieur.

Détruit lui aussi, le Manoir de la Grésille en haut de la rue de la Gare. On y a reconstrui­t une station essence, qui s’étalait sur les deux côtés de la route. Elle aussi disparue, la station a laissé place aux assurances Generali.

Les changement­s d’affectatio­n

Au fil du temps, de nombreux édifices de Domfront ont vu leur affectatio­n changer, en fonction de l’époque et des besoins. Ainsi en est-il de l’usine électrique de Domfront, qui fut d’abord un moulin, avant de devenir une maison d’habitation. Rue Porte de Normandie, les bains douches, utilisés jusque dans les années 1990, sont devenus une menuiserie, aujourd’hui fermée. L’Hôtel de Panorama, face au cimetière, et l’ancien hôpital, juchés à flanc de rocher rue Montgomery, sont également devenus des maisons.

Le tribunal, toute une vie

Exemple criant de réaffectat­ion, le Palais de justice, dont la constructi­on fut achevée en 1839. Tribunal de grande instance jusqu’en 1859, il témoigne d’une activité judiciaire importante dans le Domfront d’alors. Six avocats, huit avoués, trois huissiers, un président de tribunal… « C’était toute une vie. Domfront était une ville bourgeoise, qui en a souffert. À l’époque, on ne voulait pas d’usine, pas d’ouvriers, on a augmenté terribleme­nt les impôts, et cela se sent encore aujourd’hui », analyse Bernard Desgrippes. « Cela a découragé les gens de venir s’installer ici. Les bourgeois ne voulaient pas fréquenter le menu peuple ! », estime ce passionné d’histoire locale.

La réforme de la justice, menée par la ministre Rachida Dati entre 2007 et 2011, aura raison de l’activité originelle du tribunal, devenu depuis, lieu de culture et d’exposition­s.

Situé rue du Champ de Foire, votre journal Le Publicateu­r Libre n’échappe pas à ces réaffectat­ions, puisqu’il a été implanté dans l’ancien Hôtel du Nord, à une époque où la fontaine coulait encore au milieu de la place et où l’on attachait ses chevaux aux murs, le temps d’une pose.

Nostalgie, quand tu nous tiens…

 ??  ??
 ??  ?? 1. La maison d’arrêt. 2. L’ancienne église Saint-Julien. 3. La gare de Domfront, avec à gauche le réservoir d’eau. 4. La caserne Laharpe.
1. La maison d’arrêt. 2. L’ancienne église Saint-Julien. 3. La gare de Domfront, avec à gauche le réservoir d’eau. 4. La caserne Laharpe.
 ??  ?? L’ancienne maison du gardien du château, construite sur les arases d’une tour.
L’ancienne maison du gardien du château, construite sur les arases d’une tour.
 ??  ?? Les abattoirs de Domfront.
Les abattoirs de Domfront.

Newspapers in French

Newspapers from France