972 Au bord d’la route !

C’est bin histouère de bavasseu un p’tit qua

Dans l’ancien temps, si tu d’meureut dans l’bourg, falleut aveu ta subite au bord d’la route. Tu veuyeus qui qu’alleut et v’neut, les gens t’parlaient, yaveut d’la convivialiteu. T’aveus mîn-me pus b’soin d’alleu à messe eul’dimanche pour éte au courant du nouviau. Tout passeut d’vant cheu ta : les cârrioles, les chârtes, les beuniaux, les peutiots qu’alleuent à l’eucole. On t’envieut paceque ta subite euteut bin piaceue.

À t’heure, c’est pus pareuil. Si ol est au bord d’la route, ta subite o vaut pus rin rapport au brit, à la circulâtion : les motos, les tracteurs, les camions qui n’arrétent pas d’passeu et d’rapasseu. Et en pus d’ça, les Ponts Déchaussés, au fil des z’années, i z’ont modifieu l’niviau d’la route. Ta cahute o s’eurtrouve enterrée. Alors tu t’embônes cheu ta, les portes bien feurmées. Tu peux pus eucouteu la teuleu teull’ment ça feut d’potin et quand qu’t’es assis à tabe et qu’tu zieutes deuhôs par la coisée, tu n’vés qu’les roues des satrés camions qui passent teull’ment la route a euteut eurleuvée de pus d’un méte de haut ! Ma j’te dis, ta subite o vaut pus rin n’en tout !

Dans le temps, si tu habitais dans le bourg, tu étais au courant de tout ce qui se passait. Ta maison avait de la valeur. Les gens te parlaient, tu n’avais même plus besoin d’aller à la messe le dimanche pour apprendre les nouvelles.

Maintenant, ce n’est plus pareil. Ta maison, située au bord de la route ne vaut plus rien en raison de l’intense circulation : les autos, les motos, les tracteurs, les camions qui passent sans arrêt. Et au fil du temps, les Ponts et Chaussées ont relevé le niveau de la route et ta maison est enterrée. Alors tu t’enfermes chez toi, les portes bien fermées. Tu peux à peine écouter la télévision et si tu regardes par la fenêtre, tu ne vois que les roues des camions qui passent. Je te dis que ta maison, au bord de la route, ne vaut plus rien aujourd’hui !