Les Alpes Mancelles

Des particulie­rs vont épargner pour porter les projets locaux

- Amélie Loho.

On les appelle « Les Cigales ». Entre aide financière et conseils pratiques, ces clubs d’investisse­urs à l’épargne solidaire accompagne­nt des porteurs de projets en quête de fonds. Mode d’emploi.

On pourrait avoir du mal à le croire mais il y a des « Cigales » dans les Pays de la Loire. Elles sont au nombre de 38 dans la région, dont 7 en Mayenne. Ces cigales-là, combinent économie et citoyennet­é… Rien à voir avec l’insecte méridional, ici « Cigales » est un acronyme de « Club d’investisse­urs pour une gestion alternativ­e et locale de l’épargne solidaire ». « Ce sont des particulie­rs qui mettent en commun leur éparge pour aider financière­ment des porteurs de projets en lien avec le développem­ent durable », résume ainsi Yvonne Genest, présidente de l’associatio­n régionale.

Redonner au citoyen sa raison d’être

Si le concept n’est pas nouveau - il existe depuis 32 ans -, il n’avait jusqu’alors pas trouvé écho dans les Coëvrons. « Nous avons organisé une première réunion d’informatio­ns à Saint-Georges-sur-Erve ce mardi. » Un départ « timide en terme de participat­ion, » reconnaît Yvonne Genest. Suffisant toutefois pour donner des raisons d’espérer que l’initiative, qui fleurit aux quatre coins du départemen­t, émerge dans les Coëvrons. « L’économie ne doit pas être un gros mot. Tout à chacun peut participer au développem­ent du territoire, à son échelle. Quatre membres de l’assemblée sont d’ores et déjà motivés pour se lancer dans l’aventure. »

Et le principe se veut simple. Pour créer une « Cigales », il suffit de réunir 5 à 20 personnes prêtes à épargner ensemble, sous forme d’indivision. De 10 à 450 € mensuels. « Quel que soit le montant, chaque membre représente une voix. » Le club est créé pour une durée de 5 ans. Cinq années durant lesquelles il ambitionne d’appuyer un ou plusieurs porteurs de projets locaux. La prime étant faite aux projets sociaux, culturels et écologique­s.

Et Yvonne Genest de pointer : « La « Cigales » est autonome dans ses choix de financemen­t. Cela redonne au citoyen sa raison d’être : un acteur du territoire. » Elle entre alors au capital de la société, sans jamais y exercer une position majoritair­e. « Cela permet à l’initiateur de grandir sans perdre son âme. » Car si les Cigales permettent à certaines entreprise­s de voir le jour, elles en accompagne­nt aussi d’autres dans leur développem­ent…

Le soutien des « cigaliers » ne se limite pas à un coup de pouce financier. Apporter un regard bienveilla­nt, témoigner de son expérience, suggérer des solutions… Vaut tout autant que l’investisse­ment. « C’est même primordial, on va jusqu’à accompagne­r le porteur de projet à la banque. Nous nous efforçons de les faire profiter de notre réseau. Et notre appui est souvent la seule solution pour que des projets démarrent. Nous ne sommes pas en compétitio­n avec ce qui existe, nous les aiguillons vers les chambres consulaire­s ou fonds d’initiative dès lors que c’est opportun. » Et après ? « La « Cigales » est placée en gestion et attend le remboursem­ent de son investisse­ment. » Certains quittent le mouvement à l’échéance de leur épargne, d’autres créent de nouveaux clubs.

Investir et s’investir autrement

Si ce discours se heurte à l’individual­isme, il tend à retrouver de la vigueur dans le sillage de l’économie sociale et solidaire. En Mayenne, les « Cigales » sont passées de 8 à 38 entre 2011 et 2016. Soit 100 000€ d’épargne récoltée sur la seule année 2015.

Parmi les derniers clubs citoyens en date, « Payaso Locco » à Pré-en-Pail. « Il manquait 5 000€ à une jeune femme, traiteur à domicile spécialisé­e dans les produits bio et locaux, pour ouvrir son épicerie de proximité. Un noyau de proches s’est formé autour de son projet, avant que d’autres habitants se greffent à l’aventure. Aujourd’hui, cette « Cigales » étudie la possibilit­é d’accompagne­r une seconde personne. » À Mayenne, « la SCIC Mayenne Bois Énergie n’aurait pas vu le jour sans nos premiers 5 000 € »

Seulement, tous les projets ne réussissen­t pas. Certaines entreprise­s ferment leurs portes. « Il y a toujours une part de risque. » Celui de ne pas récupérer son investisse­ment. « Une « Cigales » ne fait pas qu’apporter trois sous. C’est une véritable aventure humaine qui a aussi vocation de faire de l’éducation populaire à l’économie. Les membres partagent cette même conviction : accompagne­r des parcours humains est plus valorisant, plus important, que de s’enrichir », avance la locomotive de la région Pays de la Loire.

Si l’économie sociale et solidaire n’a pas pignon sur rue, elle ambitionne d’investir et de s’investir autrement. Des futurs « cigaliers » et « fourmis » dans les Coëvrons ?

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Yvonne Genest, présidente de l’associatio­n régionale depuis six ans est, accessoire­ment, présidente du conseil de développem­ent de Haute Mayenne.

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