Les gens du voyage, sa paroisse
Rencontré lors d’une visite de la Cave du Lion à Fresnaysur-Sarthe, en compagnie de Jean-Gilles, le Père Christophe Sauvé nous parle de son ministère, comme prêtre des gens du voyage. Ce prêtre diocésain accompagne depuis près de 20 ans les familles itinérantes de son diocèse.
Il était accompagné de Tiffany qui effectue son service civique auprès de l’association ADGVC 44 (Association Départementale Gens du Voyage Citoyens de Loire-Atlantique) et de son mari Elvis, qui a prêté son camion pour venir chercher des toiles de Jean-Gilles.
Des obstacles
En effet, Christophe Sauvé était à Fresnay pour récupérer des toiles, dessins et poèmes de Jean-Gilles sur les Gitans, qui seront exposés près de Châteaubriant. Cet endroit a servi pendant la guerre 39-45 de Camp d’internement pour les Tsiganes, et même auparavant, pour les réfugiés espagnols, victimes de la guerre civile de 1936… Pas un panneau, juste une plaque commémorative, presque cachée, posée seulement début août 2010 inaugurée en toute discrétion.
« C’est un devoir de mémoire, nous voulons montrer que même des personnes issues des gens du voyage peuvent devenir des artistes…
Je suis moi-même issu de la communauté des gens du voyage et quand on parle d’eux, il faut entendre roms, gitans, manouches, tsiganes, yéniches… Ce sont des peuples itinérants qui voyagent, pas pour leur plaisir, mais pour leurs activités économiques… Il y a beaucoup de difficultés pour intégrer leur mode de vie, leur culture…
« Je négocie »
Les familles prennent contact avec moi pour savoir où trouver des places pour s’installer… Je négocie avec la police, le maire, le préfet…
La place de la religion est très importante pour ces gens.
Quand il y a un décès, on passe trois nuits à veiller le défunt, on fait mémoire, on raconte, on prie, on l’accompagne à l’église et on l’accompagne dans sa dernière demeure pour ce long voyage avec le Christ.
Je suis un prêtre sans paroisse, les familles sont itinérantes, elles bougent de terrains en terrains, avec des stationnements organisés donc autorisés dans les villes, mais j’ai aussi affaire à des stationnements illicites et non autorisés, car il n’y a pas de place… Alors, parfois, il y a des tensions ! Souvent, les familles ont du mal à vivre leurs prières avec les gadjés sédentaires, car ils ont toujours l’impression d’un regard ou ils se sentent visés ou incompris…
Créer des ponts
L’enjeu de mon ministère, c’est de créer des ponts et des passerelles entre les Tsiganes et les non-Tsiganes dans notre église, et ce n’est pas une mince affaire ! Car les chrétiens catholiques de France ont, à l’image de leur pays, un regard envers la communauté des gens du voyage, qui est plutôt un regard de rejet, d’exclusion, de peur, une méconnaissance des gens, on est considérés comme des voleurs de poules, et souvent on me dit « Vous êtes le prêtre de l’indéfendable ».
Quand on est prêtre de la communauté des gens du voyage, çà demande un détachement, une grande, grande disponibilité ! ».
Ils ne sont que deux prêtres en France à exercer leur ministère auprès des gens du voyage.
L’an prochain, le 23 mai, aux Saintes-Maries-de-la-Mer, Jean-Gilles et Laëtitia verront leurs anneaux bénis par le Père Christophe Sauvé, lors du grand pèlerinage. Alain Coutelle