Les Alpes Mancelles

Francis Briend va être décoré chevalier de la Légion d’honneur

À 95 ans, Francis Briend va être nommé au grade de chevalier de la Légion d’honneur. Il a été l’un des combattant­s héroïques de la guerre 39/45. Portrait.

- A.L.

Francis Briend n’est pas un homme bavard. De ses années de combattant de la France Libre, sa famille ne connaissai­t rien ou presque. Seule une photo quelque peu jaunie par le temps subsistait au fond d’un tiroir. « Cela s’est longtemps résumé à ce cliché, et à ces quelques mots peints à l’avant de la jeep : « Morts aux Doryphores ! » », corrobore son fils, Gérard Briend. « Il a toujours été réservé sur le sujet. Pour lui, c’est d’ailleurs un non-sujet. Seule ma maman avait connaissan­ce de certains éléments. » Mais rien, n’est jamais gravé dans le marbre…

Francis Briend, devenu mousse à l’âge de 14 ans pour faire « une campagne de pêche à la morue » est né un jour de mai 1921 dans les Côtes-d’Armor. À Plurien précisémen­t, village du bord de côte à mi-chemin entre Saint-Brieuc et Saint-Malo. Il deviendra apprenti boulanger avant de reprendre la mer. Cette fois, ce sera dans la marine marchande, en janvier 1938. C’est la mer qui prend l’homme et le conduit jusqu’aux côtes américaine­s, trois années durant.

Soldat du Special Air Service

La guerre a éclaté quelques années plus tôt, et le gouverneme­nt du maréchal Pétain décide de réquisitio­nner les navires de la marine marchande. L’Alençon, bateau au bord duquel navigue le breton à l’époque est appelé. Son commandant refuse d’obtempérer. Francis fait un autre choix : celui de s’engager dans les Forces Françaises Libres. Certains évoqueront peut-être un acte inconscien­t, Francis est lui habité par le sentiment que sa place est, de l’autre côté de l’Atlantique.

Il rejoindra la Première Compagnie d’Infanterie de l’Air en mars 1943. Suivra le dur entraîneme­nt des commandos au sein du 4th Spécial Air Service / 2e RCP. Une unité des forces spéciales de l’armée britanniqu­e. « Nous avons depuis appris que les soldats de cette unité ont un devoir tout particulie­r de réserve et de secret », explique Gérard Briend. Le nonagénair­e aura finalement, toujours respecté cette clause.

S’il n’y avait qu’une opération à retenir du parcours héroïque de Francis Briend, il s’agirait probableme­nt de l’opération Spencer. Nous sommes le 29 août 44. Francis et les hommes des SAS sont à Nantes. L’objectif de la manoeuvre est simple, tout du moins sur le papier. Le commando est chargé d’harceler les troupes allemandes, en repli le long de la vallée de la Loire. Sur le front, les combattant­s du 2e RCP sont en permanence autonome, en contact avec l’ennemi dans un territoire où les lignes sont floues et mouvantes. L’opération est un succès, et permettra la libération de Bourges. On sait aujourd’hui que le courage et l’audace de ces hommes ont considérab­lement empêché l’ennemi d’organiser correcteme­nt sa défense. Des liens forts le lieront aux membres de son unité. Djamil Jacir, Julio Cerrilos, Maurice Fénery, Georges Berr… « Ce sont des noms dont il se souvient encore aujourd’hui », livre Gérard Briend.

Commerçant dans l’âme

Francis rencontrer­a Paulette Loche, lors d’une permission à Paris en septembre 1944. Il l’épousera en octobre 1945 après une ultime opération en Champagne au nom de code bien connu : Franklin. Il sera officielle­ment démobilisé en décembre 1945 avant de retourner à la vie civile qu’il n’a plus quittée jusqu’à l’heure de la retraite. « Il a été reçu dans le corps des forts des Halles à Paris, au pavillon de la viande. C’est un commerçant dans l’âme : il a rejoint le pavillon aux fleurs puis celui du poisson, c’est pour dire ! C’était une personnali­té du monde des Halles à Rungis, où il a terminé sa carrière. »

Il aura fallu attendre les 95 printemps de Francis Briend pour qu’enfants, petits enfants et arrière petits enfants finissent de composer le puzzle de son histoire. De leur histoire en somme. « À force de recherches, d’échanges avec les associatio­ns d’anciens combattant­s et en couplant avec les informatio­ns livrées par notre maman, nous avons pu éclaircir cette période de sa vie. »

Arrivé à Sillé-le-Guillaume il y a six ans, Francis coule une paisible retraite à l’Hôpital local. Samedi, il recevra les insignes de chevalier de la Légion d’honneur par le Lieutenant Colonel Jacques Le Cler. 71 ans après sa démobilisa­tion.

 ??  ?? Au volant de la Jeep, Francis Briend. Une des seules traces de son parcours de combattant durant la guerre 39-45.
Au volant de la Jeep, Francis Briend. Une des seules traces de son parcours de combattant durant la guerre 39-45.

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