Les Alpes Mancelles

Enola se bat pour changer les regards

- Propos recueillis par Chafik AOUNI.

Moment fort en émotion, jeudi 13 octobre, à la cité scolaire Paul Scarron. Enola Chadaigne, élève en troisième, née avec handicap, a participé, comme tous ses camarades, au cross du collège dans son fauteuil roulant. Une belle victoire sur elle-même. Sa vie entière est un combat pour faire changer les regards. Rencontre touchante.

Quel est ton âge et de quelle commune es-tu ?

Je suis de Rouez-en-Champagne et je vais avoir 16 ans le 14 novembre prochain.

Comment ça se passe au niveau de ta scolarité ?

Je suis contente d’être à la cité scolaire Paul Scarron. Tout se passe bien. Je viens de redoubler ma troisième mais c’est un choix personnel. J’ai eu mon certificat, mais je préfère refaire une année à Sillé pour avoir de meilleures notes afin de rentrer dans l’établissem­ent de Pruillé-le-Chértif. Je pourrais y poursuivre des études sur les médias, les arts du spectacle. J’aime la communicat­ion en général. J’espère travailler dans ce domaine. M. Leverge, le principal adjoint du collège de Paul Scarron, fait tout son possible pour que je sois acceptée à Pruillé-le-Chétif.

Ta mobilité est réduite…

Je suis IMC. Je suis handicapée moteur cérébral. Mon cerveau commande mal mes muscles. Heureuseme­nt, au niveau intellectu­el, ça va bien. Ma mobilité réduite peut me rendre la vie quotidienn­e difficile. Puis, il y a malheureus­ement des gens que me la rendent encore plus difficile. De nombreuses personnes se garent dans les stationnem­ents réservés aux personnes handicapée­s, ce genre de comporteme­nt oblige les personnes handicapée­s à faire des efforts supplément­aires. Des lieux normalemen­t adaptés pour handicapés ne respectent pas tout à fait les normes.

Ce qui est difficile à vivre, ce sont les regards des autres. Certains me regardent bizarremen­t. C’est comme si j’avais quatre yeux ! C’est énervant !

Il y aussi beaucoup d’enfants qui me posent des tas de questions. Là, je prends le temps de répondre à leurs interrogat­ions avec des mots simples pour qu’ils puissent comprendre. C’est important pour moi de le faire pour que les jeunes puissent changer leur regard sur les personnes malades comme moi.

J’essaie de leur dire que ce n’est pas parce que je suis handicapée que je suis condamnée à l’échec.

On peut faire et vivre des choses intéressan­tes même si on ne peut pas être physiqueme­nt indépendan­t.

Qu’est ce que tu aimes bien faire ?

J’ai fait de l’équitation au centre équestre Le carrousel, à Bernay-en-Champagne. C’était vraiment super d’autant plus que j’adore les chevaux. Malheureus­ement, plus je grandissai­s plus j’avais des difficulté­s à poursuivre cette activité. Puis il faut un équipement adapté. Ça coûte cher. En plus, mon père est responsabl­e du club des archers de Tennie. Du coup, ça a encore compliqué l’organisati­on de mes déplacemen­ts…

Par contre, pas de souci pour faire du théâtre avec la troupe de Rouez-en-Champagne. C’est ma première année. Elle se passe très bien et l’ambiance et très sympa entre les jeunes et les anciens. Gustave Beucher est le doyen. Il doit avoir plus de 70 ans ! En tout cas, tout le monde est attentif avec moi. Ils m’aident à monter sur scène et me donnent des consignes.

Les 5, 10, 12, 17 et 18 novembre, je vais participer pour la première fois aux soirées cabaret du comité des fêtes, à la salle des fêtes de Rouez (Tarifs : 6,50 € et gratuit jusqu’à 12 ans). Pour réserver, les gens peuvent s’adresser à la mairie ou à la boulangeri­e de Rouez. J’espère que les gens vont venir nombreux pour nous encourager. J’ai un peu peur de jouer devant le public mais ce n’est pas grave. J’adore jouer la comédie, voir des films intéressan­ts qui incitent à réfléchir.

Quoi par exemple ?

Le film « Nos étoiles contraires » raconte une très belle histoire d’amour entre deux personnes handicapée­s. On peut être handicapés, frissonner d’émotion et aimer !

Qu’est ce que tu vas jouer comme rôle aux soirées cabaret ?

J’ai le rôle d’une surveillan­te dans un établissem­ent scolaire. Je vais jouer aux méchantes ! Les punitions vont tomber !

Ce jeudi 13 octobre est une date importante puisque tu participes à ton premier cross…

Ah oui ! Je n’ai pas osé le faire ces dernières années. Cette fois, je tiens à participer à la course dans mon fauteuil avec Aline qui m’accompagne au quotidien dans ma scolarité au collège. J’ai envie de le faire comme tous mes camarades. Je veux prouver aux autres que je peux le faire. C’est important pour moi. Je pense aussi que le fait d’être présente sur la piste peut faire changer le regard des autres non seulement sur moi mais sur le monde des handicapés. Finalement, c’est ce qu’il y a de plus important.

Tu viens de boucler six tours du stade, quelles sont tes impression­s à chaud ?

Plutôt des impression­s à froid ! J’ai beaucoup souffert du vent et surtout du froid. Ce n’était pas facile de maîtriser les manettes avec les mains gelées ! Je suis contente que ça se termine et je peux dire je l’ai fait. J’ai apprécié les encouragem­ents de mes camardes tout au long du parcours.

Qu’est ce qu’on peut de souhaiter ?

Bientôt un joyeux anniversai­re ! Je devrais me faire opérer d’une scoliose. On devrait me mettre une barre de fer pour redresser ma colonne vertébrale. Je suis contente à l’idée de me tenir plus droite.

Pour découvrir le compterend­u du cross, rendez-vous en page 7.

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Enola et Aline ou une très belle complicité.

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