Les Alpes Mancelles

Le juge Lambert était un artiste

Le juge Jean-Michel Lambert s’est donné la mort, alors que « l’affaire Grégory » connaît un nième rebondisse­ment. C’était un ami cher de Fabienne Labrette-Ménager.

- F.A.

« Je n’ai pas connu le juge, mais Jean-Michel ». Celui dont on a réduit le nom à un sobriquet – « le petit juge »n’évoque jamais l’affaire Grégory. Il est pourtant patent qu’elle le hante. Après qu’il en a été dessaisi, Jean-Michel Lambert a fait le gros de sa carrière de magistrat à genoux, « placardisé à Nancy, placardisé à Bourg-en-Bresse ». L’âme entaillée, il a poursuivi sa vie qui avait définitive­ment tourné au chemin de croix. C’est en mille morceaux qu’il est arrivé au Mans, en 2003.

Restaurati­on d’un quotidien acceptable

« Chez les Sarthois, il a trouvé la sincérité ». Ce n’est qu’à la cinquantai­ne que Jean Michel Lambert retrouve un quotidien acceptable. Ici, on ne lui pose pas de question sur sa vie antérieure. Son extrême sensibilit­é fait le reste. Malgré sa timidité, il se constitue donc un cercle d’amis avec lesquels il parle littératur­e et peinture, ses vraies passions. Peu à peu, il sort de sa coquille, même s’il reste toujours très réservé. Comme si la Sarthe lui servait de révélateur, Jean-Michel Lambert s’avère un type qui « adore manger » et sait faire preuve d’un humour « un peu décapant ». Il fréquente régulièrem­ent le marché des Jacobins le dimanche matin. Chez lui, un certain « équilibre » est restauré.

« Machine à broyer »

« Jean-Michel avait toujours cette histoire de culpabilit­é dans sa tête ». Reste que la blessure qu’a laissée l’affaire Grégory ne se referme toujours pas. Les moments où le dossier revient sur le devant de l’actualité sont à chaque fois une épreuve dont la violence ne faiblit pas. « Quoi qu’il ait dit, quoi qu’il ait fait, c’était alors la machine à broyer ». Alors Jean-Michel Lambert écrit, écrit. « Ses livres, c’était son exutoire ». Jean-Michel Lambert écrit sur la culpabilit­é, sur le pouvoir.

« En partance pour les vacances »

« Quand j’ai été remerciée par les Républicai­ns, c’est le premier qui m’a appelée ». Jean-Michel Lambert est ulcéré. Manifestem­ent, la peine qu’il éprouve pour son amie Fabienne Labrette est amplifiée par l’écho qu’elle trouve dans sa propre histoire. « Dans le milieu judiciaire, il devait détonner. Jean-Michel n’avait pas de carapace. Tout lui était difficile à vivre ». En outre, il a beau garder cet air de « premier de la classe », « un peu coincé », aux yeux de son amie, ce monde discipliné ne colle pas à sa personnali­té d’artiste, « à fleur de peau ». La preuve de ce qu’elle ressent, elle la trouve dans ses livres. « C’est tout à fait possible qu’il se soit trompé de métier ». Elle l’a croisé il y a environ un mois, par hasard. « Il était en partance pour les vacances, il finissait un livre… ».

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Les obsèques de Jean-Michel Lambert ont eu lieu jeudi 20 juillet, au Mans.

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