A Sillé-le-Guillaume, des maires minés par l’inquiétude
La liste des tourments des premiers magistrats était longue comme un jour sans pain.
Ils avaient envie de se retrouver, les maires, adjoints et présidents de communautés de communes. S’estimant tous logés à la même mauvaise enseigne après une série d’annonces du gouvernement du Président Macron, souvent déjà transformées en nouvelles dispositions, ils avaient besoin de se reconnaître aussi dans le tourment. Aussi ont-ils déboulé en masse à Sillé-le-Guillaume, samedi 21 octobre, pour le 69ème congrès des maires, dont la Ville avait assuré l’organisation, salle Ernest-Chevreuil. Et là, ceux qui avaient le plus de tempérament ont dit les choses. Et, à chaque fois qu’une rancoeur commune avait pu être verbalisée, on a applaudi à tout rompre.
Plaidoyer de Gérard Galpin
« Il ne faut pas nous sousestimer ! ». Après avoir pudiquement évoqué « un mandat difficile », le maire de Sillé Gérard Galpin, qui, en qualité de puissance invitante, a ouvert le congrès, a laissé supposer qu’avec tous ses homologues, ils se sentaient, à la fin, blessés par l’action du gouvernement. En effet, celle-ci, en se traduisant par « une différence de traitement entre les territoires ruraux et les territoires urbains », au détriment des premiers, évidemment, nierait… en même temps la qualité même de la fonction. Et Gérard Galpin a usé de l’anaphore. « Etre maire, c’est faire preuve d’abnégation. Etre maire, c’est faire preuve de courage. Etre maire, c’est faire preuve de disponibilité… ». On n’arrêtait plus le premier magistrat dans son vibrant plaidoyer, qui a trouvé un sacré écho dans la salle.
« Le fonds d’amorçage est maintenu jusqu’à la fin de l’année scolaire 2017-2018, mais pour 2018-2019… on attend ». Sur les questions scolaires (rythmes, temps d’activités périscolaires-TAP), la réponse du Directeur académique des services de l’Education nationale Jean-Marc Milville, qui a dû faire face le premier aux inquiétudes des maires, a été typiquement celle dont ces derniers ne veulent plus. C’est de visibilité dont ils ont au contraire besoin pour gérer leurs communes : il est urgent de savoir sur quel pied danser.
Grosso modo, tout fâche
C’est grosso modo de tout dont les maires sont chagrinés, spécialement les ruraux. Leur plainte porte autant sur les rythmes scolaires et les TAP que sur la désertification médicale, la qualité du réseau de téléphonie mobile, l’arrivée de la fibre, l’accès aux services publics, le maintien des commerces dans les bourgs, la suppression de la taxe d’habitation, la réduction du nombre d’emplois aidés, l’annonce du projet de réduire le nombre d’élus… Le départ, à mi-course du congrès, des deux députés LREM Pascale FontenelPersonne (3ème circonscription) et Damien Pichereau (1ère circonscription) ont été vécus comme un camouflet.
Verbatim
F.A.
Sur les rythmes scolaires, Christophe Rouillon, maire de Coulaines.
« Je ne trancherai pas le débat entre les chronologistes, mais il y en a marre de ces mouvements d’essuie-glace. Laissez-nous la liberté et donnez-nous les moyens ! »
Sur l’annonce du projet de réduction du nombre d’élus, Dominique Amiard, maire de Cures.
« Ces élus ne sont pas rémunérés ou si peu ! »
Sur les temps d’activités périscolaires (TAP), Yveline Limodin, maire de Vaas.
« Aurons-nous encore le soutien de l’Etat pour les TAP ? A nous, ils coûtent 17 000 € ! »
Sur les TAP, Laurent Hubert, Vice-Président de la CdC du Pays fléchois.
« Aujourd’hui, on a mis un peu le feu dans les écoles. Je me méfie de la liberté quand elle peut être source d’inégalités ».
Sur la réduction du nombre d’emplois aidés, Gilles Leproust, maire d’Allonnes.
« Les contrats aidés servent le vivre ensemble ! »
Sur le projet de loi de finances 2018, Fabienne Labrette-Ménager, maire de Fresnay-sur-Sarthe.
« J’en appelle au bon sens de nos députés. Ne laissez pas des territoires se vider car Bercy souhaite que nous soyons tous des citadins ! Le logement ne doit pas être une variable d’ajustement ! L’aménagement du territoire voulu par le Général de Gaulle a été décentralisé par les gouvernements successifs. Malheureusement, on sent que la recentralisation est en marche ! »
Sur la téléphonie mobile, François Boussard, Président de la CdC Sud Sarthe.
« Pourquoi devons-nous, nous CdC, payer alors que ça profite aux opérateurs ? »
Sur la téléphonie mobile, Martine Crnkovic, maire de Louailles.
« Oui, le Département installe des pylônes et ça coûte à chaque fois 150 000 €… pour avoir de la 2G et de la 3G ! Il nous faut de la 4G ! Les opérateurs aujourd’hui ne font pas du bon boulot ! ».
Sur la téléphonie mobile, Françoise Lebrun, maire de Ruillé-en-Champagne.
« Il faut que les parlementaires nous soutiennent car les opérateurs sont plus intéressés par les villes ! »
Sur l’accès aux soins, Gérard Galpin, maire de Sillé-leGuillaume.
« Je vous fais confiance, Monsieur Lacaze (NDLR Yves Lacaze, Délégué territorial de l’Agence régionale de santé), sur les petits soucis de Sillé avec la radiologie. Je le dis en public : vous me donnez une réponse dans 15 jours, M. Lacaze ? »
Dans la conclusion du congrès par Marc Joulaud, maire de Sablé-sur-Sarthe.
« Les premiers mois montrent que l’exécutif connaît mal les élus locaux ou ne les écoutent pas […] Il veut réduire le nombre d’élus alors que 450 000 d’entre eux sont bénévoles ? Qui travaillera à leur place ? […] Nous ne voulons plus de big-bang territorial […] Les parlementaires nous ont quittés tôt ce matin ».
Dans l’allocution de Christelle Morançais, Présidente de la Région Pays de la Loire.
« J’éprouve une émotion toute particulière. Mes pensées vont à François Fillon […] Je veux une Région de proximité […] Il y a 2 100 milliards de dettes publiques et certain voudraient que les collectivités soient coupables ? […] Si la France est en marche, la décentralisation est à l’arrêt […] Soyez assurés, messieurs mesdames les maires, que je serai toujours à vos côtés ».