Qui paie quoi ?
Après qu’on lui a soufflé qu’on ne savait pas trop qui faisait quoi pour l’église, l’Abbé Gaëtan de Bodard a invité les élus pour faire le point sur l’usage de l’édifice.
Pari gagné, une petite vingtaine de maires et conseillers municipaux ont rejoint l’abbé et son renfort, le Père André, mardi 7 novembre, salle Saint-Léonard. A moins de trois mois de l’ouverture du synode, le Vicaire général Paul Antoine Drouin a jugé opportun d’assister lui aussi à cette réunion.
Chacun son sacerdoce
En demandant aux élus à quels problèmes ils étaient éventuellement confrontés avec l’église de leur village, l’Abbé Gaëtan les a finalement encouragés à parler de… leur sacerdoce. Il n’y a donc eu de place que pour les questions concrètes qui se posent aux communes, au quotidien. En effet, depuis 1905, elles sont propriétaires des églises… et le clergé en est affectataire. Autrement dit, il y a « tous les droits » . Une situation dont l’Abbé Gaëtan était curieux de connaître la mise en musique.
Ligne budgétaire
« Les cloches qui tombent en panne, c’est tout de suite 5 000€ » . C’est la première traduction pratique de la loi de 1905 qui est venue à l’esprit des élus. L’entretien de l’église, qui leur revient, est, déjà, une ligne budgétaire. « Il vaut mieux faire un peu de travaux régulièrement » . Le maire de Sougéle-Ganelon Philippe Rallu a fait valoir son expérience d’empêcheur de catastrophe, le résultat à ses yeux inexorable de la procrastination. « Il faut faire jouer la concurrence » entre les entreprises de réparation. La recommandation est venue du Vicaire général, qui a ainsi montré, s’il le fallait, que croire au ciel ne coince pas la tête dans les étoiles.
Attachement
« L’église, c’est du patrimoine culturel » . Aujourd’hui, les communes veillent sur leur édifice, qu’elles croient au ciel ou qu’elles n’y croient pas, pareillement. « C’est touchant » . L’Abbé Gaëtan a aussitôt retenu qu’en tout état de cause, il existait un attachement. Difficile de ne pas y voir matière à se rassurer.
Prise directe avec le terrain
« L’éradication des pigeons, c’est 900 € par mois pour la commune » . Curieux des vicissitudes du quotidien des églises, l’Abbé Gaëtan s’est bien toujours trouvé en prise directe avec la vraie vie des élus. Et il a pu parfaitement mesurer la place que l’entretien courant des clochers occupait… toujours sans qu’il ne soit besoin de revendiquer des convictions. Cette réunion était, nul doute, telle qu’il l’avait souhaitée : une épreuve de réalité. Sauf que si les élus ne lui épargnaient rien, ils ne plaignaient pas du tout non plus.
Sécurité
« Nous, on a eu les troncs cassés 20 à 25 fois […] On a fini par mettre un écriteau : ne défoncez pas les troncs, ils sont relevés tous les soirs » . Dire comment, à Saint-Léonarddes-Bois, la commune s’était débrouillée pour protéger l’église des voleurs, a logiquement amené à rappeler que c’est toujours celle-ci qui décide d’ouvrir ou pas l’édifice au public. En optant pour l’ouverture, il lui faut inévitablement trouver une solution… pour la fermeture. Si des portes automatiques ont été installées, c’est quand même plus généralement un employé de la cité qui en est chargé, mais il peut aussi s’agir d’un administré bénévole, précisément comme à Saint-Léonard-des-Bois. Celui-ci assure aussi la préparation des lieux quand il y a un mariage ou un enterrement. Il avait tenu à accompagner son maire Pascal Delpierre pour lancer un cri d’alarme. « Je remets la clé à Pascal au 31 décembre, au bout de 25 ans. Personne ne s’est encore porté candidat pour me remplacer… Il n’y a pas de relève ! » . Les élus n’ont pas embrayé sur ce sujet qui ne les concerne cette fois pas dans l’exercice de leur mandat et l’Abbé Gaëtan s’est contenté d’enregistrer l’information. En revanche, le maire de Sougéle- Ganelon Philippe Rallu a conseillé à ses homologues de photographier le mobilier précieux avec un identifiant de la cité, comme une médaille, afin de réduire la possibilité, pour des voleurs, de l’écouler sur le mar- ché. Pour mémoire, le mobilier qui se trouve dans l’église qui date d’avant 1905 est la propriété des communes.
Sougé plein d’allant
« La loi stipule que c’est la communauté chrétienne qui doit faire le ménage » . Reste que l’usage veut que les communes donnent un sérieux coup de main. En annonçant qu’il comptait instituer « une demijournée ecclésiastique » dans l’année « pour faire le ménage à fond » , Philippe Rallu toujours a comblé l’Abbé Gaëtan. D’autant que le premier magistrat a une idée pour motiver les troupes : ponctuer la corvée par « un rillettes-Jasnières » .
Et les concerts ?
« Le curé est responsable de tout ce qui se passe dans l’église » . En rappelant les termes de la loi de 1905, le Vicaire général a jugé utile de s’attarder sur la question de l’utilisation profane de l’église : pour qu’un concert y soit donné ou qu’une exposition y soit organisée, le maire doit demander l’autorisation au curé, après lui avoir décrit le contenu de la manifestation. « La seule limite fixée est l’interdiction de toucher à l’autel » .
On avait cette fois épuisé l’ordre du jour… et démontré que la farce Peppone-Don Camillo sentait la naphtaline.