Les Alpes Mancelles

« Stop aux normes qui tuent le petit commerce ! »

La Présidente de Sarthe Habitat Fabienne Labrette-Ménager et son directeur Guy Henrion ont été des rares spécialist­es du logement en France dont le gouverneme­nt a sollicité l’avis.

- F.A.

« On est toujours vent debout contre la loi de finances qui va impacter fortement nos ressources. Mais ce super mécontente­ment n’est pas une raison pour faire une politique de la chaise vide : nous ne boudons pas ». Le directeur de Sarthe Habitat Guy Henrion s’est donc, avec sa Présidente Fabienne Labrette-Ménager, volontiers rendu au Sénat pour avancer des propositio­ns concrètes qui vont alimenter le débat autour de la future loi logement. « Dans ses intentions, le gouverneme­nt a volontaire­ment laissé 4 lignes imprécises ». C’est jeudi 25 janvier 2018 que les deux défenseurs du logement social de la Sarthe ont participé à la Conférence de consensus du logement, rendezvous dont le président de la République Emmanuel Macron avait accepté le principe, après que le président du Sénat Gérard Larcher lui ait soufflé l’idée. Les conclusion­s de cette Conférence sont attendues jeudi 8 février 2018.

Sarthe Habitat va-t-il construire des maisons de santé ?

« Nous sommes tous deux intervenus sur la redynamisa­tion des villes moyennes et, plus largement, des bourgs. Beaucoup de nos propositio­ns peuvent s’appliquer au cas des communes plus petites ». Fabienne Labrette-Ménager et Guy Henrion étaient de cet atelier-là (il s’en tenait 5), respective­ment au nom de la Fédération des associatio­ns régionales HLM et au nom de la Fédération des Offices publics HLM (OPH).

Le directeur de Sarthe Habitat disposait de… 2 mn pour convaincre de la pertinence de son propos qui visait à « donner souplesse et efficacité, en confiant aux OPH de nouvelles compétence­s dans un cadre juridiquem­ent sécurisé ». Son argumentat­ion s’articulait autour de 3 axes. Dans le premier plaidoyer, Guy Henrion a avancé l’idée de « permettre aux OPH d’effectuer des missions d’ingénierie urbaine de pilotage de projets », c’est-à-dire d’assurer du conseil d’études. Dans le 2nd, il a défendu l’idée d’ « autoriser les OPH à construire des locaux d’intérêt général », comme, par exemple, des maisons de santé, sachant que la vocation initiale des OPH est de « faire du logement social ». Enfin, Guy Henrion a plaidé pour que « les OPH puissent fournir des services à la personne », ce qui, bien que ceux-ci logent nombre de personnes âgées, leur reste interdit.

Maisons abandonnée­s : lever un blocage

« C’est avec la casquette de maire que je suis pour ma part intervenue ». Et c’était parti pour un chrono de 2 mn pour Fabienne Labrette-Ménager, qui avait dans l’idée de soumettre des propositio­ns qui répondaien­t à l’expérience du terrain. Le ministre Jacques Mézard réclamait qu’on libère du foncier ? Eh bien Fabienne Labrette a avancé une 1ère solution : revoir les délais d’expropriat­ion surtout quand, alors que la commune a un projet, il est impossible de trouver un accord avec les héritiers. « Notre difficulté, c’est que les textes de loi, surtout sur les succession­s des biens en déshérence, sont obsolètes ». Ainsi, le délai d’expropriat­ion est aujourd’hui de 30 ans, sachant qu’il y a trois textes qui dictent la loi, respective­ment sur les biens sans maître, les biens en état d’abandon et les biens en déshérence. Bien sûr, cette 1ère solution vise à faciliter l’achat à la famille par la commune qui porte un projet.

Assouplir les normes qui brident le commerce rural

« Il faut assouplir les normes, elles créent des discrimina­tions ! ». Fabienne Labrette a trouvé le temps de faire une seconde propositio­n. « Il y a, sur la question de l’accessibil­ité des bâtiments à usage commercial, une discrimina­tion entre les communes de moins de 10 000 habitants et les grandes communes ». Il suffit en effet de comparer le cas d’un cafetier d’une cité rurale et celui d’un cafetier à Paris : le premier doit aménager des toilettes pour personnes handicapée­s tandis que, chez son homologue qui travaille dans la capitale, les toilettes étant souvent au soussol, il n’est pas contraint de les réaliser. « Sauf que non seulement les cafetiers de nos petites cités rurales n’ont pas l’argent nécessaire pour faire ces travaux, mais ils sont de plus empêchés de vendre s’ils ne les ont pas effectués. Quand ils investisse­nt, c’est à fonds perdus ». Paris n’est pas le seul lieu où les problèmes qui se posent aux commerçant­s sont mieux entendus. « Dans le Vieux-Mans non plus, on ne demande rien à un commerce ». La stratégie a paru porter. « Etre maire dans « une assemblée avec nombre d’OPH, ça donne le ton. Mais la revitalisa­tion de nos centres-bourgs, ça passe aussi par ça ». Et Fabienne Labrette a d’ailleurs apprécié que le Président d’Orne Habitat se situe lui aussi sur le créneau retour d’expérience, en proposant, lui, que, dans les centres-bourgs, l’architecte des bâtiments de France porte « un regard plus bienveilla­nt ». Question de « réalisme » : « il y a des bâtisses qui n’ont plus grand intérêt et que les communes ne peuvent pas démolir ».

Les territoire­s à la traîne, « raison d’être » de Sarthe Habitat

« Le Président de la Conférence a salué nos interventi­ons, qu’il a qualifiées de vraies, de très concrètes ». Ce compliment a donné du baume au coeur à Guy Henrion, qui est convaincu qu’avec de la souplesse et une sécurisati­on juridique, le rôle des bailleurs sociaux peut être déterminan­t dans les territoire­s à la traîne. « Nous pouvons contribuer pleinement à la redynamisa­tion de ces territoire­s qui sont notre raison d’être ». D’autant que leurs maires, il les entend. Dernièreme­nt, celui de Sougé-le-Ganelon Philippe Rallu a encore fait une déclaratio­n en ce sens. « Il n’y a que Sarthe Habitat qui vient investir chez moi ! ». Ailleurs aussi bien sûr sur les terres des Alpes Mancelles, l’OPH sarthois s’active. La redynamisa­tion du coeur de ville de Sillé-le-Guillaume le mobilise. A Fresnay-sur-Sarthe, le bailleur démarre le chantier des 15 logements pour personnes âgées rue Hatton en avril… et, après cette Conférence de consensus du logement, Guy Henrion espère pouvoir rendre les services qui vont bien à celles-ci.

« 1M € d’investisse­ments en moins, c’est 11 emplois perdus dans le bâtiment »

« Sarthe Habitat a aujourd’hui une dizaine de projets en cours sur les terres des 2 communauté­s de communes – Champagne conlinoise et Pays de Sillé ainsi que Haute Sarthe Alpes Mancelles ». Reste que la réalisatio­n de ceux-ci va dépendre des moyens financiers du bailleur social. « La loi de finances et la baisse des loyers imposée après que le gouverneme­nt a abaissé le niveau des APL équivaut, pour Sarthe Habitat, à un manque à gagner de plus de 6M € par an- 3M € par an en 2018 et 2019 et plus de 6M € à partir de 2020 ». Plongée du niveau des recettes de Sarthe Habitat… mais aussi perte sèche de « 30 à 35 M € d’investisse­ments par an à cause des loyers qu’on ne va pas rentrer ».

Pour que l’on mesure l’ampleur des difficulté­s qui vont désormais contraindr­e le déroulemen­t de la mission du bailleur social, Guy Henrion dégaine une équation qui a de quoi alarmer. « 1M € d’investisse­ments que Sarthe Habitat ne fait pas, ce sera 11 emplois perdus dans le bâtiment ».

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Si le directeur de Sarthe Habitat Guy Henrion sait que la loi de finances peut brider l’action du bailleur social, il veut rester constructi­f.
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Le ministre du Logement Jacques Mézard a invité le duo qui pilote Sarthe Habitat à venir avancer des propositio­ns concrètes au Sénat.

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