Les Grands Dossiers de Diplomatie
Pologne : des médias trop curieux et menacés ?
Alors que le parti au pouvoir, le PiS (Droit et Justice), a repris en main les médias publics lors de son arrivée au pouvoir en décembre 2015 en soumettant la télévision et la radio publique au contrôle de l’exécutif, le gouvernement polonais s’est depuis attaché à étrangler financièrement plusieurs titres de presse indépendants opposés à ses réformes. Si le projet du gouvernement – qui prévoyait de limiter l’accès des journalistes au Parlement – a échoué suite à une forte mobilisation de manifestants inquiets pour la liberté de la presse, une nouvelle loi vise à « repoloniser » la presse locale en fixant des seuils de capitaux étrangers autorisés. Si la Commission européenne et un certain nombre d’ONG dont Reporters sans frontières ont plusieurs fois fait part de leur inquiétude vis-à-vis des mesures prises par le gouvernement polonais, Bruxelles a exhorté en juillet dernier Varsovie à « mettre en suspens » ses nouvelles réformes controversées sous peine de voir remis en cause le versement de fonds européens. Le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, a par ailleurs mis en garde le gouvernement polonais contre toute atteinte à la liberté de la presse en déclarant : « J’appelle toute personne impliquée dans cette discussion à cesser immédiatement toute intimidation de journalistes, même s’ils estiment que ces journalistes posent des questions trop critiques ».
Quelques jours plus tôt, le ministre polonais de la Défense, Antoni Macierewicz, déposait une plainte contre Tomasz Piatek, journaliste d’investigation au quotidien Gazeta Wyborcza et auteur du livre Macierewicz et ses secrets dans lequel il met en lumière les liens controversés entre le ministre et des personnes liées aux intérêts russes. Si le journaliste accusé précise bien qu’il ne s’agit pas d’une plainte pour diffamation ou mensonges, mais davantage d’une menace adressée à la profession, il a également fait l’objet de violentes attaques de la part de la télévision publique et des médias proches du pouvoir, qui l’ont qualifié de « dénonciateur bolchévique ».
Pour la chaine publique d’information en continu TVP Info, « les médias privés, depuis le début des gouvernements du parti Droit et Justice, font beaucoup pour parler des changements en Pologne de la pire des manières, surtout à l’étranger ».