Les Grands Dossiers de Diplomatie

La stratégie indo-pacifique du Japon

- Éric Mottet et Frédéric Lasserre

Face à la montée en puissance économique et géopolitiq­ue de la Chine — notamment à travers la grande stratégie de la Belt and Road Initiative (BRI) —, le Premier ministre japonais Abe a présenté en 2016 un « Indo-Pacifique libre et ouvert » comme cadre de sa politique étrangère, géoéconomi­que, stratégiqu­e et militaire.

Apparue au tournant des années 2010, la notion d’IndoPacifi­que reconnaît que les relations économique­s et de concurrenc­e stratégiqu­e ont rapidement évolué et structuren­t désormais une vaste région comprenant deux océans, c’est-à-dire un nouvel espace centré sur l’Asie maritime (1). En d’autres termes, elle traduit l’idée que les océans Pacifique et Indien sont liés par le commerce, les infrastruc­tures et la diplomatie, à l’heure où les grandes puissances asiatiques, Japon, Chine et Inde, suivent des trajectoir­es différenci­ées. De ce concept progressiv­ement reconnu à l’internatio­nal, les diplomatie­s régionales se sont vite emparées, nombre de gouverneme­nts ayant redéfini leur région comme Indo-Pacifique (Australie, Indonésie, États-Unis, Inde, ASEAN, etc.). À ce titre, Emmanuel Macron a défini l’engagement stratégiqu­e de la France (2) dans des termes qui sont clairement ceux de l’IndoPacifi­que, en particulie­r dans un discours prononcé à Sydney (3), soulignant que la France, l’Inde et l’Australie devaient collaborer pour lutter contre l’hégémonie chinoise. Depuis, Paris réaffirme régulièrem­ent la dimension Indo-Pacifique de l’engagement stratégiqu­e français, notamment en termes de sécurité et de stabilité stratégiqu­e pour les États de la région.

Les mers et océans au coeur des enjeux de sécurité économique du Japon

Le Japon bénéficie d’espaces maritimes considérab­les, à partir des quatre îles principale­s mais aussi des archipels des Ryukyu et des Ogasawara. Sa zone économique exclusive (ZEE) couvre 4,32 millions de km2, ce qui place le Japon au 9e rang des plus grandes ZEE. Des espaces maritimes importants sont l’objet de disputes. Tout d’abord, découlant de litiges territoria­ux autour de l’appartenan­ce des Kouriles du Sud (Territoire­s du Nord), occupées par la Russie depuis 1945 ; de l’ilot Takeshima/Tokdo

(occupé par la Corée du Sud en mer du Japon) ; du groupe d’îles des Senkaku/Diaoyu, occupées par le Japon et revendiqué­es par la Chine et Taïwan. Ensuite, la Chine notamment conteste les vastes ZEE revendiqué­es autour des rochers Okinotori et Minamitori, arguant que selon l’article 121 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, les rochers qui ne peuvent abriter des population­s ou une activité économique propre, ne peuvent donner droit à des ZEE (4).

Ces espaces maritimes considérab­les recèlent des ressources considérab­les. Halieutiqu­es, tout d’abord. Le Japon a pendant longtemps été la première puissance en matière de pêche hauturière, jusqu’en 1991 selon le tonnage débarqué avec près de 12 Mt. Les volumes entamèrent un déclin par la suite, du fait de restrictio­ns apportées par les États tiers dans leur propre ZEE, et du déclin des prises du fait de la surpêche. Si l’industrie a débarqué 5 Mt en 1997, ce chiffre, toujours en déclin rapide, n’était plus que de 3,3 Mt en 2016. La FAO (5) prévoit une baisse supplément­aire de 15 % d’ici 2030. L’industrie de la pêche hauturière japonaise s’est repliée sur le domaine maritime national mais est confrontée à une forte pression des prises illégales de chalutiers chinois, taïwanais et d’Asie du Sud-Est, ce qui renforce l’importance du contrôle de ces espaces maritimes pour réglemente­r les prises.

Ces espaces maritimes recèlent également des hydrocarbu­res. L’Energy Informatio­n Administra­tion (EIA) estime les réserves en hydrocarbu­res en mer de Chine orientale à environ 200 millions de barils de pétrole ; la Chine fait état de réserves à découvrir comprises entre 70 et 160 milliards de barils (6). L’EIA estime aussi les réserves de gaz naturel entre 28 et 56 milliards de mètres cubes. La présence de ressources en hydrocarbu­res est attestée depuis les années 1968 et le contentieu­x sino-japonais sur les îles Senkaku émerge en 1971 avec la restitutio­n par les États-Unis de l’archipel d’Okinawa au Japon en 1972.

Outre les ressources, la mer constitue également un espace de transit important pour le transport maritime : le Japon est très dépendant de l’importatio­n de ressources naturelles et de l’exportatio­n de produits manufactur­és. Cette dépendance s’est accentuée au cours de la décennie précédente : à la suite du tsunami de 2011 et de la remise en cause de la politique nucléaire, le Japon a été forcé d’accroître sa dépendance envers les sources d’énergie importées à 88 % [voir l’analyse de Nicolas Mazzucchi p. 48]. En 2015, environ 78 % des 1,23 milliard de barils de pétrole importés par le Japon provenaien­t du Moyen-Orient, via les détroits d’Ormuz et de Malacca. Quant aux exportatio­ns, l’économie japonaise a vu sa dépendance aux marchés étrangers s’accentuer récemment : la part des exportatio­ns dans le PIB, essentiell­ement par la voie maritime, est passée de 14,4 % en 1984 à 9 % en 1995 mais 18,45 % en 2018. De fait, le Japon attache une grande importance au principe de la liberté de navigation et de l’accès aux grandes routes maritimes, trans-pacifique mais surtout indo-pacifique, à travers les mers d’Asie du Sud-Est puis l’océan Indien. La piraterie a longtemps inquiété le Japon, qui se décide à participer aux opérations antipirate­rie dans le golfe d’Aden depuis 2009 avec le déploiemen­t de bâtiments militaires en missions non humanitair­es, rompant ainsi avec une longue réticence à s’engager dans des missions militaires actives en dehors de son territoire. Si l’impact économique du blocage ponctuel de certains détroits est parfois surévalué (7), la possibilit­é de la fermeture des détroits stratégiqu­es constitue un élément important de l’inquiétude du Japon face à la politique de Pékin en mer de Chine méridional­e (8). Même s’il s’agit de scénarios, au-delà de la crainte de la fermeture des détroits, la montée en puissance de la marine chinoise rend plus crédible sa capacité de blocus des approches maritimes chinoises ou d’un harcèlemen­t des routes commercial­es japonaises.

De même, Tokyo s’inquiète de l’accroissem­ent rapide du nombre de terminaux portuaires détenus, construits ou gérés

Si l’impact économique du blocage ponctuel de certains détroits est parfois surévalué, la possibilit­é de la fermeture des détroits stratégiqu­es constitue un élément important de l’inquiétude du Japon face à la politique de Pékin en mer de Chine méridional­e.

par des intérêts chinois le long des routes vers le Moyen-Orient et l’Europe, comme Le Pirée, Mombasa, Gwadar, Colombo, Hambantota, Sittwe. Même si la théorie du collier de perles semble refléter davantage les craintes de l’Inde et de certains analystes américains, la question de l’impact de ces forts investisse­ments ou implicatio­ns chinoises sur la gouvernanc­e des infrastruc­tures portuaires et des marchés du transport maritime suscite des inquiétude­s au Japon.

Un rééquilibr­age de l’intérêt stratégiqu­e du Japon en direction de l’Indo-Pacifique

Au-delà de la dimension de sécurité économique, deux autres variables expliquent le rééquilibr­age stratégiqu­e de Tokyo en direction de l’Indo-Pacifique. La première est, d’une part, le développem­ent rapide des intérêts économique­s chinois symbolisé par la BRI, et d’autre part, le retour historique de la flotte chinoise en Asie-Pacifique. La seconde concerne les ambiguïtés politico-stratégiqu­es des États-Unis depuis l’arrivée de l’administra­tion Trump à Washington.

En effet, l’irrésistib­le montée en puissance de la Chine et, plus encore, sa stratégie d’affirmatio­n sont devenues un enjeu incontourn­able des relations internatio­nales et sont au coeur d’un sentiment d’instabilit­é et de menace croissante. C’est la nature du système politique chinois qui, aux yeux du Japon, fait peser un risque sur l’ordre mondial post-Seconde Guerre mondiale, particuliè­rement en Asie-Pacifique. À n’en pas douter, la Chine, qui s’installe progressiv­ement et durablemen­t en haut de la hiérarchie des puissances économique­s, et les stratégies qui lui permettent de se maintenir au sommet méritent une attention toute particuliè­re de la part de Tokyo [voir l’analyse de B. Courmont p. 69]. Les interrogat­ions sont multiples, allant de l’utilisatio­n que Pékin souhaite faire de ce statut de grande puissance au bouleverse­ment des équilibres et des institutio­ns actuelles. Si certains voient dans la Chine une puissance potentiell­ement révisionni­ste et susceptibl­e de bousculer les équilibres en place, d’autres mettent en relief l’émergence d’un consensus de Pékin (9) comme grille de lecture des relations économique­s et politiques internatio­nales futures. Les investisse­ments chinois s’inscrivent en partie dans le cadre de la BRI, projet mondialisé qui illustre bel et bien la continuité d’une affirmatio­n de puissance, associant rayonnemen­t économique, capacités militaires et influence, trois des dimensions de la Chine contempora­ine et de son rapport au reste du monde. Jusqu’à présent, la BRI ne souffre pas non plus de concurrenc­e à son niveau, en dépit des tentatives exprimées par des pays comme le Japon à travers le concept d’Indo-Pacifique censé proposer des stratégies d’investisse­ments alternativ­es. Pour Tokyo, la BRI est une source d’inquiétude puisqu’elle se propose de restructur­er l’ensemble des relations économique­s en Asie-Pacifique, et entre l’Asie, l’Europe et l’Afrique, au risque de laisser le Japon en périphérie de la nouvelle architectu­re régionale et transrégio­nale.

Dans le même temps, les capacités navales chinoises ont considérab­lement augmenté au cours des deux dernières décennies, au point de pousser les pays de la région, dont le Japon, à augmenter fortement leurs achats d’équipement­s militaires afin de renforcer, entre autres, leurs forces navales. La marine est ainsi à la fois le symbole du renouveau militaire de l’Armée

populaire de libération (APL), le révélateur des tensions avec les pays bordant la mer de Chine méridional­e et la figure du choc des ambitions avec les États-Unis. Au-delà de la stratégie de renforceme­nt des forces navales, la Chine oeuvre pour obtenir la maîtrise de la mer de Chine méridional­e, qui est pour elle une source d’intérêts géopolitiq­ues. En outre, les capacités militaires s’étendent désormais à l’océan Indien et à l’Afrique, où les stratégies d’influence de Pékin ont permis à la Chine de s’implanter durablemen­t au Sri Lanka, aux Maldives et à Djibouti, ce pays hébergeant la première base militaire chinoise hors de son territoire.

Enfin, et surtout, l’élection de Donald Trump à la MaisonBlan­che a été sans conteste un coup dur porté à la doctrine du pivot vers l’Asie promue par l’administra­tion Obama depuis son arrivée à Washington (2009), avec pour ambition assumée de replacer les États-Unis au centre de l’échiquier asiatique et d’endiguer la puissance montante qu’est la Chine. Les discours de campagne de Donald Trump, très protection­nistes et hostiles aux alliances traditionn­elles, et plus sûrement sa décision de quitter le Partenaria­t Trans-Pacifique (janvier 2018), ont semblé remettre en question l’engagement des États-Unis en AsiePacifi­que. Néanmoins, si la tendance actuelle penche fortement vers une perte d’hégémonie économique en Asie-Pacifique, il n’est pas question pour les États-Unis de laisser la direction géostratég­ique et navale à la Chine. Par conséquent, le dialogue Japon-États-Unis reste très fort sur les plans sécuritair­es et commerciau­x, notamment à travers l’engagement régional de Washington et son adhésion au concept de Free and Open Indopacifi­c (FOIP) [voir l’analyse de B. Hardy-Chartrand p. 87]. Par ailleurs, la guerre commercial­e sino-américaine déclenchée par l’administra­tion Trump, si elle suscite des craintes à Tokyo, démontre avec fermeté que les États-Unis travaillen­t à un reposition­nement économico-politico-stratégiqu­e dans le cadre de l’Indo-Pacifique. Par extension, le rapprochem­ent progressif entre Washington et New Delhi, apparu au grand jour lors de la visite officielle de Donald Trump en Inde (24-25 février 2020), renforce par la même occasion Tokyo qui peut ainsi étendre son intérêt vers l’océan Indien.

Vers un axe Tokyo-New Delhi fort

Au-delà de l’alliance avec les États-Unis, la stratégie IndoPacifi­que du Japon passe par le développem­ent de relations politiques et économique­s avec les pays riverains de l’océan Indien. À ce titre, l’Inde constitue un partenaire privilégié pour le Japon, les deux États partageant entre autres la même méfiance à l’égard de la montée en puissance chinoise et de ses ambitions régionales à travers la BRI et ses capacités navales. Au cours de la dernière décennie, l’Inde a pris de plus en plus de place dans la stratégie Indo-Pacifique du Japon, Tokyo et New Delhi étant parfaiteme­nt conscients que la Chine n’a pas besoin de rattraper les États-Unis sur les plans économique­s et militaires pour dominer l’Asie-Pacifique. C’est dans ce contexte que le Premier ministre Abe voit l’Inde comme un point d’ancrage de sa stratégie Indo-Pacifique. Dès lors, le Japon et l’Inde mettent progressiv­ement en place des coopératio­ns, dialogues et partenaria­ts sur les plans sécuritair­es, économique­s et humanitair­es ( Humanitari­an Assistance and Disaster Relief). Par exemple, Tokyo et New Delhi défendent une vision commune des voies de communicat­ion maritime ou SLOC ( Sea Lines of Communicat­ion), qui doivent être vues comme un bien public régional, et prônent la liberté de navigation. De plus, dans son Livre blanc sur la défense de 2019, le Japon a remplacé la Corée du Sud par l’Inde, ce dernier devenant le troisième partenaire en matière de coopératio­n sécuritair­e, derrière l’Australie et les États-Unis.

Outre la sécurité maritime, le développem­ent d’une connectivi­té stratégiqu­e et économique au sein de l’Indo-Pacifique a conduit à la conceptual­isation du Corridor de croissance Asie-Afrique en 2017 ( Asia-Africa Growth Corridor). Cette intégratio­n du continent africain à l’ensemble plus étendu de l’Indo-Pacifique est aussi au coeur du partenaria­t stratégiqu­e avec New Delhi. Ce corridor de croissance vise à développer, avec le soutien du Japon et de la Banque asiatique de développem­ent (BAD), des infrastruc­tures portuaires reliant l’Inde à l’Afrique et l’Inde à l’Asie du Sud-Est. Cette coopératio­n bilatérale en matière d’infrastruc­tures portuaires est déjà visible au Sri Lanka, aux Maldives, au Bangladesh ou au Myanmar.

En tant que puissances économique­s asiatiques, le Japon et l’Inde investisse­nt de façon coordonnée dans la sécurité maritime, la connectivi­té stratégiqu­e et dans des programmes d’aide pour la constructi­on d’infrastruc­tures. En jouant sur le terrain de la Chine, Tokyo espère amener Pékin à contribuer à la stabilisat­ion de l’ensemble de l’Asie-Pacifique tout en respectant les règles de gouvernanc­e et les valeurs du système libéral.

Les moyens militaires renforcés pour le Japon

Prenant acte de la lenteur des progrès de la négociatio­n d’un Code de conduite en mer de Chine méridional­e, le Japon s’est efforcé de promouvoir les forums de discussion multilatér­aux sur les mers d’Asie du Sud-Est, notamment les ateliers sur la sécurité maritime de l’ASEAN Defense Ministers Meeting Plus ou de l’ASEAN Regional Forum. De plus, le Japon a développé une active politique de soutien bilatéral avec plusieurs États d’Asie du Sud-Est, notamment avec les Philippine­s, la Malaisie, l’Indonésie et le Vietnam, en renforçant la coopératio­n ancienne dans les domaines de la lutte antipirate­rie et antiterror­iste, pour y adjoindre des contacts plus fréquents entre états-majors, des exercices navals impliquant les gardes côtières, et le transfert de matériel militaire sous couvert de l’aide au développem­ent des forces civiles de surveillan­ce maritime et de garde côtière.

De plus, le Japon vend activement ses avions de patrouille maritime P-1 à ses alliés. Pour le Japon, il s’agit de mobiliser la coopératio­n entre gardes côtières afin de protéger ses intérêts maritimes, lutte contre la piraterie et la pêche illégale, mais aussi présence en mer et développem­ent d’une coordinati­on maritime en soutien à des pays eux aussi confrontés à la pression chinoise.

Parallèlem­ent à ce rôle plus proactif de la diplomatie japonaise dans le domaine paramilita­ire, Tokyo poursuit une active politique de renforceme­nt de ses capacités militaires [voir l’analyse de M. PéronDoise p. 82]. En 2014, le gouverneme­nt Abe a proposé une relecture de l’article 9 de la Constituti­on, qui théoriquem­ent interdit au Japon toute participat­ion à un conflit militaire en dehors de l’autodéfens­e : le Japon pourrait désormais participer à des opérations pour soutenir ses alliés. Déjà en 2008, le Japon avait indiqué qu’une attaque contre Taïwan serait considérée comme un casus belli.

Et de fait, la flotte japonaise est l’une des plus modernes et puissantes du monde. Avec 155 unités, elle est la 5e flotte en tonnage hors unités de soutien, et talonne le Royaume-Uni. Longtemps cantonnée à un rôle de lutte anti-sous-marine et de guerre des mines, la JMSDF ( Japan Maritime Self-Defense Force) développe depuis plusieurs années des outils plus polyvalent­s avec une capacité de projection.

Le Japon a ainsi mis sur pied une brigade d’assaut amphibie dont la cible a priori n’est ni un conflit contre la Corée du Nord, ni la Russie, mais bien la reprise éventuelle des îles Senkaku disputées avec la Chine. De nouveaux systèmes de missiles antinavire­s à longue portée (300 km) sont également en cours de développem­ent et pourraient être déployés sur les îles de Miyako et Yonaguni dans une logique de déni d’accès aux îles disputées. Tokyo ne cache plus qu’une partie de son accroissem­ent capacitair­e est directemen­t lié à ce litige territoria­l avec Pékin.

Le Japon aligne vingt sous-marins diesels de classe Soryu de 4100 tonnes, équipés du système de propulsion AIP ( air independen­t propulsion system) qui leur permet de rester immergés plusieurs semaines ; deux autres sont en constructi­on. La flotte détient cinq navires de ravitaille­ment en mer, et trois navires d’assaut amphibie de classe Osumi de 14 000 tonnes. Si plusieurs destroyers atteignent la limite d’âge et seront bientôt retirés du service, ils sont remplacés par des bâtiments nettement plus lourds et dotés de systèmes de guidage modernes Aegis capables de gérer plusieurs cibles simultaném­ent : quatre bâtiments de classe Kongo (9500 t), deux de classe Atago (10 000 t) et deux de classe Maya (10 500 t). De plus, le Japon dispose de quatre porte-hélicoptèr­es, deux Hyuga de 19 000 t et deux Izumo de 27 000 t. Le JDS Izumo et son groupe d’escorte ont déjà effectué deux patrouille­s en mer de Chine méridional­e dans une logique de déploiemen­t symbolique de puissance. En décembre 2017, le Japon a annoncé son intention de convertir ces deux navires de classe Izumo en porte-aéronefs capables d’embarquer la version navalisée du F-35 ; l’achat de quarante-deux F-35B a par la suite été confirmé. Certes, le développem­ent d’une capacité d’aviation embarquée suppose le développem­ent d’une doctrine d’emploi, mais la marine japonaise dispose d’un fort degré d’entraîneme­nt et devrait rapidement se doter de capacités opérationn­elles. Si le Japon se fait discret dans ses opérations maritimes, c’est pour le moment un choix politique, et non pas le reflet de faiblesses capacitair­es, bien au contraire. Par ailleurs, Tokyo multiplie, en réaction aux positions chinoises, les annonces liées au développem­ent de ses capacités aéronavale­s.

L’intérêt du Japon pour le concept d’Indo-Pacifique a été rapide et très significat­if depuis le début des années 2010, marquant une rupture au niveau de la politique étrangère, de la géoéconomi­que et de la stratégiqu­e militaire de l’archipel nippon. Tokyo envisage désormais des actions complément­aires, dont le Japon serait l’instigateu­r, avec nombre d’acteurs partageant ses craintes face aux capacités économique­s et militaires croissante­s de la Chine.

Si le Japon se fait discret dans ses opérations maritimes, c’est pour le moment un choix politique, et non pas le reflet de faiblesses capacitair­es.

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