Un siège, deux camps
Dieppe-Maritime va acquérir l’ancienne chambre de commerce de Dieppe au terme de débats houleux au sein du conseil communautaire. Des délégués ont clairement marqué leur scepticisme, fragilisant de fait la majorité du président.
Un « seigneur » recroquevillé dans son « château » assiégé, qui résiste à la révolte et emporte de peu la bataille (communautaire). Dans le rôle du « seigneur », le président Jean-Jacques Brument ainsi affublé de ce titre par le frondeur Sébastien Jumel, maire de Dieppe, opportunément aidé par des alliés de circonstance : Patrick Boulier (Varengeville) et Bruno Bienaimé (Martigny).
L’objet de la querelle : l’acquisition de l’hôtel consulaire de Dieppe – un « château » dixit Sébastien Jumel – pour y implanter le siège de l’Agglo. L’opposition était attendue, Jean-Jacques Brument avait pris soin de communiquer en amont (notre édition du vendredi 11 novembre).
« Château sans projet »
Il a redit, mardi, ses arguments en faveur d’un tel investissement (2,5 millions d’euros dont travaux), à savoir des économies d’échelle – plus de loyers à payer pour plusieurs bâtiments – et un regroupement des services pour gagner en efficacité. « Une question d’opportunité » , dit le président, saisissant l’occasion du départ de la chambre de commerce et d’industrie.
Cela n’a pas suffi. La première flèche est décochée par MarieCatherine Gaillard, adjointe aux finances du maire de Dieppe : « L’Agglo désargentée pour des projets communautaires importants est d’un seul coup devenue riche » . L’argument fait mouche : comment expliquer aux habitants qu’il n’est pas possible en l’état de construire une piscine, des salles de danse ou de sports, quand on peut investir 2,5 millions d’euros dans un hôtel d’agglomération ? « Une absence de vision stratégique, un château sans projet » , tance Sébastien Jumel.
Le renfort du maire de Dieppe vient de l’ancien président de l’Agglo, Patrick Boulier, maire de Varengeville : « Le problème du personnel n’est pas abordé. Qu’en est- il du stationnement ? Je ne vois rien dans la délibération. Je suis surpris que la question n’est pas été étudiée » , dit- il, refusant de voter sans que la question ne soit réglée. « Cette acquisition sans l’aval du maire de Dieppe me pose problème » , ajoute-t-il.
« Ne pas se précipiter »
Bruno Bienaimé (Martigny) renchérit sur le sujet, reconnaissant que l’opposition dieppoise doit être prise en compte. « On prévoit un parking quand on construit une usine ou un supermarché » , fait remarquer Claude Petiteville (Rouxmesnil). « Il ne faut pas se précipiter » , insiste Bernard Machemehl (Offranville), espérant que cet hôtel sera « suffisant quand notre Agglo deviendra grande » .
L’opposition au sein du conseil communautaire ne s’est jamais exprimée aussi ouvertement de- puis le début du mandat. JeanJacques Brument et les siens (Jean Bazin, Gill Géryl et André Gautier) tentent de répondre coup pour coup. « Il n’y a pas plus d’argent qu’hier, on va utiliser les loyers actuels pour autre chose » , argumente Jean Bazin, premier vice-président.
« Pour le stationnement, il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs. Il y a des pistes, nous ferons un sondage parmi le personnel, la Ville va nous aider à trouver des solutions. J’ai une réunion dès demain [mercredi] sur le sujet » , insiste Jean-Jacques Brument, qui a perdu son sang-froid lorsqu’Emmanuelle Caru-Charreton (Dieppe) le relance sur le financement des piscines.
Contre toute attente et malgré plusieurs abstentions, le projet est adopté in extremis : 23 pour et 21 contre. L’Agglo ne sort clairement pas grandie d’un tel épisode…