Habemus Hareng !

« Arrêtez le monde, je veux descendre ! » tweetait un ami après le résultat des élections présidentielles américaines. Ah ! cette manie moderne de tout arrêter et de vouloir rejouer la partie. Et puis l’actualité a continué sa course, il y a eu nos préoccupations quotidiennes, et il y a eu vous, Thomas Pesquet avec le départ pour votre sidérale odyssée. À Dieppe, il aurait vraiment fallu être un extraterrestre pour ignorer l’événement. Il est vrai qu’avoir usé vos jeans sur les chaises du lycée Ango, ça crée des liens.

Les célébrations sur fond de fierté de clocher n’étant pas ma tasse de thé, je me contente d’être vraiment impressionnée par vous, votre simplicité, votre détermination, votre professionnalisme, votre intelligence. Impressionnée aussi par cette singulière expérience qui est la vôtre : quitter notre planète que vous ne verrez jamais plus comme avant une fois revenu.

Il paraît que les seuls témoignages humains sur la Terre qui peuvent être observés depuis l’espace sont la Grande Muraille de Chine ET le nuage de fumée qui s’échappe de notre ville tous les troisièmes week-ends de novembre. Un peu comme ce filet de fumée blanche de la basilique Saint Pierre de Rome à l’issue d’un conclave qui fait dire à la population « Habemus Papam ! » (nous avons un Pape), en vérité, je vous le dis, à Dieppe nous avons carrément un nuage sur toute la ville qui transporte de joie les habitants : « Habemus Hareng ! » (on a du hareng !). Ça se voit et ça se sent de loin.

Cette année, nous avons eu un temps de pluie et de vent, un temps à ne pas mettre un migrant dehors et malgré cela, la foire poissonneuse fut un succès. Je doute évidemment que la fumée – et le fumet ! – soient arrivés jusque dans l’espace… En tout cas, j’aime l’idée.

Cher Thomas Pesquet, vous êtes parti bosser en nous laissant face à ces grandes interrogations stratégiques qui précèdent tou- jours l’élection d’un chef d’État : « Y aura-t-il du rab de frites à la cantine pour les enfants qui ne mangent pas de porc ? Le pain au chocolat sera-t-il à 15 centimes pour les autres ? Y aura-t-il une « France apaisée » ? Un « communisme décomplexé » ? Tout ça va continuer en pire jusqu’en mai et vous allez y échapper. Alors, profitez bien de cette parenthèse en apesanteur hors du monde, petit veinard !