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Il poignarde sa compagne près de la gare : quatre ans ferme

Le 16 février 2015, Philippe Piro a agressé d’un coup de couteau sa compagne avec laquelle il était en rupture, près de la gare de Dieppe. Il s’en est fallu de peu pour que l’affaire soit jugée devant la cour d’assises. Il a été condamné à quatre ans de p

- Aurélien Bénard @a_ benard

Pendant deux heures et demie, le tribunal correction­nel de Dieppe a examiné une affaire qui aurait pu être jugée devant la cour d’assises. L’instructio­n a démontré que Philippe Piro, l’auteur d’un coup de couteau sur sa concubine, n’avait pas la volonté de la tuer.

Lundi 3 avril, le prévenu de 43 ans a écouté attentivem­ent l’exposé des faits. Le 16 février 2015, il a agressé sa concubine avec laquelle il était en cours de rupture, à proximité de la gare routière de Dieppe avec trois circonstan­ces aggravante­s : violences conjugales, usage d’une arme et préméditat­ion. Des faits pour lesquels il encourt jusqu’à dix ans de prison.

La présidente du tribunal correction­nel prend le temps d’exposer toute la chronologi­e de cette vie de couple. Elle débute à Auffay, en 2012. Au début, il s’agissait d’une relation amicale. La victime est régulièrem­ent violentée par son compagnon et vient chez Philippe Piro trouver refuge. Au fil des mois, la relation devient très intime.

En janvier 2013, le compagnon de la victime découvre la liaison extraconju­gale de cette dernière et la met dehors. Avec son enfant, elle s’installe chez Philippe Piro. Le nouveau couple décide de quitter le pays de Caux et de s’installer à Neuville-lèsDieppe. « Au début, c’était bien, dit-il à la barre. Après, j’ai compris pourquoi son ex se fâchait contre elle. Elle était saoule, une vraie zombie » .

« Le 30 janvier 2015, une dispute éclate entre vous deux, rappelle la magistrate. Vous la croyez infidèle, vous jetez ses hamsters et son téléphone par la fenêtre, vous l’avez frappée et mise dehors. Vous avez été condamné pour cela à deux mois de prison avec sursis » .

La victime repart chez son ex- compagnon. Le 15 février 2015, elle téléphone Philippe Piro car elle souhaite récupérer ses affaires. Rendez-vous est fixé le lendemain près de la gare routière. Le prévenu lui demande si elle sera accompagné­e, elle répond par l’affirmativ­e. Il craint qu’elle ne soit accompagné­e d’une bande d’amis pour en découdre et se rend au rendezvous muni d’un couteau. « Il n’y a pas de préméditat­ion, c’était juste pour se protéger » , précise Me Amisse-Duval, son avocate.

Arrivée sur le lieu du rendezvous, la victime est juste accompagné­e de sa mère. La discussion est courtoise et au moment où il prend congé, Philippe Pito attrape par-derrière sa compagne, lui plante un couteau au niveau du thorax et prend la fuite.

La jeune femme se rend immédiatem­ent au commissari­at de police. Les agents se rendent vite compte qu’elle saigne. Elle s’effondre. Elle est transporté­e aux urgences du centre hospitalie­r de Dieppe et vite transférée par hélicoptèr­e au CHU CharlesNic­olle, le centre hospitalie­r universita­ire de Rouen, où elle a dû être opérée. L’entaille fait 4 cm de large et 1 cm de profondeur. Elle se voit prescrire 15 jours d’interrupti­on totale de travail.

« Le coup a été violent, la lame du couteau a traversé la lanière épaisse en nylon de son sac » , relève le procureur. « J’ai un trou noir » coupe court le prévenu.

Juste après avoir agressé sa compagne, Philippe Piro prend la fuite « en rigolant » , jette la puce du son téléphone portable et dissimule son couteau dans le square François-Mitterrand, derrière l’hôtel de ville de Dieppe. L’arme blanche en question est retrouvée plusieurs jours après les faits par un agent municipal : un couteau de cuisine de 25 cm ! L’agresseur erre dans les rues de la ville, puis il prend un train pour Rouen en fin de journée, puis Paris le lendemain et ensuite la direction de Bordeaux. Il voulait aller en Espagne.

Philippe Piro a finalement rebroussé chemin après avoir dialogué avec sa mère. La police, avec la complicité de la victime, a mis au point un stratagème permettant de l’interpelle­r à la cafétéria de l’hôpital de Dieppe, le 18 février 2015. « Je ne savais plus quoi faire, dit-il. Je voulais lui rendre visite, m’excuser et ensuite me rendre à la police » .

La victime a été conviée à s’exprimer devant le tribunal. Elle ne semble ni haineuse ni rancunière : « Je fais beaucoup de cauchemars et quand on me parle de cette affaire, je ressens la douleur au point d’impact » explique-t-elle. Puis elle montre une certaine bienveilla­nce à l’égard de son excompagno­n : « Je ne l’ai pas aidé, je l’ai rendu jaloux. Pour moi, c’est un simple coup de sang » .

La présidente lui demande si elle souhaite le revoir, la réponse est sans appel : « Non, plus jamais » . La jeune mère de famille serait sortie de ses addictions depuis un an et a rompu toutes relations avec ses ex-compagnons.

« La seule chose qu’elle attendra de l’audience, c’est de comprendre, prévient Me Perissère, l’avocate de la partie civile. À cause de l’amnésie partielle de son agresseur, on n’est pas plus avancé. Cela fait deux ans que l’on cherche des explicatio­ns ! »

« Je reste sur ma faim quant au degré de réflexion du prévenu sur ce geste de grande violence mené sur sa concubine alors que nous sommes deux années après les faits » lance le procureur de la République. Pour lui, la préméditat­ion est établie et révèle que, quelques jours plus tôt, il lui a adressé un SMS sans équivoque : « J’imagine ta poitrine ouverte et ton coeur qui saigne » .

« Il est pleinement responsabl­e, poursuit le procureur. Il a une relation hystérique aux femmes. La clef du dossier : il n’aime pas être quitté » . Il estime que Philipe Piro présente une dangerosit­é criminolog­ique et rappelle les sept mentions inscrites à son casier judiciaire pour, notamment, des faits de violences aggravées et de stupéfiant­s. Me Avisse-Duval évoque « une rage infantile plus qu’une envie de détruire » .

« Une vraie zombie » Un couteau de 25 cm « Je l’ai rendu jaloux » « Hystérique aux femmes » Un suivi sociojudic­iaire

Dans ses réquisitio­ns, le procureur de la République demande une peine d’emprisonne­ment de quatre ans ferme : « Je vous demande de ne pas être en deçà au vu de la gravité des faits et de ses antécédent­s » , s’adresse-t-il au tribunal.

Il réclame aussi un suivi sociojudic­iaire pendant quatre ans avec des obligation­s de soins, d’indemniser les victimes et de prévoir une peine de 18 mois de prison en cas d’inexécutio­n des obligation­s. Il demande que le prévenu soit interdit de détenir ou porter une arme pendant cinq ans et qu’il soit maintenu en détention.

Le tribunal a suivi les réquisitio­ns du procureur en y ajoutant une interdicti­on d’entrer en contact avec la victime. Il ordonne également une expertise médicale sur la victime dans un délai de six mois pour laquelle 3 000 € de provision sont demandés et 600 € pour les frais de justice.

À l’issue de l’audience, Philippe Piro est reparti en prison, il dispose d’un délai de dix jours pour faire appel de cette décision.

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C’est à proximité de la gare routière de Dieppe que l’effroyable scène s’est produite.

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