Les Informations Dieppoises

« Jeux » malsains et maltraitan­ce sur ses belles-filles

Un homme âgé de 38 ans a été condamné à deux ans de prison pour des actes de maltraitan­ce et agressions sexuelles sur ses belles-filles, dans le canton d’Envermeu. Leur mère était accusée d’avoir participé à la situation malsaine pendant plusieurs mois.

- Camille Larher

« J’en ai marre de rentrer chez moi la boule au ventre… » . Par ces mots, une adolescent­e âgée de 17 ans donne le signal d’alarme. A la maison, elle vit dans la peur. La peur de son beau-père, un homme colérique et qui boit trop.

« Avec maman, ils vident une bouteille de whisky tous les soirs » , se confie-t-elle. Scolarisée dans un lycée au Tréport, elle rentre le week-end dans un village du canton d’Envermeu, au domicile de sa mère. Cette dernière a la garde de ses deux filles dont la plus jeune a seulement 11 ans.

Plusieurs signalemen­ts ont été faits par la conseillèr­e pédagogiqu­e d’éducation et l’infirmière de l’établissem­ent secondaire du Tréport. Le lundi matin, la jeune fille demande à prendre un petit- déjeuner en arrivant au lycée mais aussi à laver son linge. Souvent, elle se plaint de maux de ventre ou de tête, de son dos. Il est déjà arrivé qu’elle se scarifie.

Après 11 mois d’enfer, la mère des deux jeunes filles finit par les confier à la famille de son ex-mari qui ne vit plus dans la région. Une plainte est déposée par ce dernier le 18 novembre 2016 au commissari­at de Dieppe.

A partir de ce moment- là, tout va sortir : les actes de maltraitan­ce, les privations de nourriture et de soins, les agressions sexuelles du beau-père. La situation aurait commencé à dégénérer depuis l’emménageme­nt de la famille dans un pavillon, dans un village du canton d’Envermeu. Et les témoignage­s des deux enfants sont accablants.

Elles racontent être privées de téléphone portable pour appeler leur père, qu’elles sont enfermées dehors quand le couple part en balade ; à table elles mangent dans des assiettes à dessert et n’ont pas le droit de se resservir, leur beau-père retire les ampoules de leurs chambres, elles se lavent au lavabo et n’ont pas le droit d’utiliser de shampoing.

La plus grande des filles n’a pas le droit d’acheter des tampons et des serviettes hygiénique­s. A la barre du tribunal de Dieppe, la mère tente de minimiser : « Je lui en donnais en cachette » . Toute de noir vêtue et de petite taille, cette femme âgée de 42 ans en paraît déjà bien plus.

Sans emploi, elle explique avoir des problèmes de santé mais aucun avec l’alcool. « Je peux boire un ou deux verres le week-end » , ajoute-t-elle. A l’audience ce jeudi 20 avril, elle se trouve près de son compagnon sans l’accabler. « Je l’aime et je ne veux pas le quitter » , dit-elle.

Pourtant, l’homme avec qui elle partage sa vie s’adonnait à des « jeux » malsains avec ses deux belles-filles. Le tout sous les yeux consentant de leur mère. « L’olive-cerise » ou le « pouetpouet » consistait à se toucher les parties intimes par-dessus les vêtements. « Une fois, il m’a malaxée les seins, l’un après l’autre » , indique la plus grande des filles. Il lui demande aussi de « lui faire des bisous en bas » , en désignant son sexe.

La petite fille de 11 ans, elle, se souvient de cet horrible moment où son beau-père s’est rendu dans sa chambre et a tenté de lui retirer son pantalon de pyjama. Elle s’est fortement débattue malgré les menaces : « Si tu refuses, je ferai du mal à ta mère ! » . Une mère, qui, pendant ce temps-là, cuve sur la table à manger.

Cette situation dantesque, le beau-père l’explique par des soucis d’économie. L’homme allait jusqu’à compter les capsules de lessive, retirait les ampoules… « Quand il n’y a qu’une paie dans le foyer, c’est dur, tentet-il de se dédouaner. Mais je ne les ai jamais frappées ! » .

Depuis le départ des enfants, il dit se sentir triste. « Et pourtant, vous n’avez jamais rien fait pour elle ni avec elle, aucune activité, rien » , lance la procureur de la République. Elle s’adresse alors à la mère de famille : « Vous avez privilégié votre confort personnel à celui de vos enfants. Dans une de vos déclaratio­ns, vous disiez ne pas vouloir retourner vivre dans un appartemen­t » .

A la barre du tribunal, le père des jeunes filles est présent. A la lecture des faits, il ne peut retenir ses larmes et explique que ses enfants sont traumatisé­es. Elles se méfient des hommes et même une simple main sur l’épaule peut susciter une réac- tion. « Mais que ferait-on à leur place… » , soupire-t-il.

La plus jeune des filles a des problèmes de vue et d’audition, aggravés par un manque de soins pendant des années. « Je suis là pour porter la parole de ces deux adolescent­es, commence l’avocate de la partie civile. Car tout ce qui est dit par l’une est confirmé par l’autre. Il n’y a pas de doute à avoir sur les faits » .

Enfermées dehors

La défense demande que les liens ne soient pas coupés entre la mère et ses enfants. Le beau-père est présenté comme un homme brutal, basic mais aussi aimant, travailleu­r et bricoleur. « Je ne veux pas que l’on y voie les Thénardier d’un côté et les enfants de l’autre, souhaite l’avocate. La situation n’a duré que 11 mois et il est évident que cet homme a un raisonneme­nt éducatif d’un autre âge » .

Aujourd’hui, les deux jeunes filles ont repris une scolarité normale et sont suivies par un psychologu­e. « Pour le moment, elles n’arrivent pas à se reconstrui­re » , confie leur avocate.

Par économie

 ??  ?? Les adolescent­es ont pu reprendre une scolarité normale depuis qu’elles vivent chez leur père. (Photo d’illustrati­on)
Les adolescent­es ont pu reprendre une scolarité normale depuis qu’elles vivent chez leur père. (Photo d’illustrati­on)

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